Comme la fumée secondaire d’une cigarette, le virus de la COVID-19 peut rester en suspension durant de longs moments dans l’air d’une pièce – même après que la personne infectée est partie.

Cette transmission, la transmission par aérosols, a été occultée au profit de la transmission par gouttelettes depuis le début de la pandémie, selon des experts en santé publique. Or, elle pourrait causer plus d’infections alors que le retour au travail en présentiel est amorcé, et que la chute des températures pousse les gens à passer plus de temps à l’intérieur.

« Les preuves de la propagation du #SARSCoV2 montrent que les particules expulsées peuvent se propager sur des distances et s’attarder dans des aérosols fins », a écrit la Dre Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada, sur Twitter en fin de journée, vendredi.

Le virus peut rester suspendu dans l’air, et ceux qui se trouvent à proximité de la personne infectée inhalent plus d’aérosols, surtout dans les espaces intérieurs et mal ventilés.

La Dre Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada, sur Twitter

La Dre Tam recommande aux gens de porter un masque « capable de filtrer les particules fines du virus ». Pourtant, ces masques, aussi appelés N95, ne sont pas ceux qui sont distribués dans les écoles, les hôpitaux et les autres établissements publics. Dans ces endroits, les gens qui apportent leur propre masque N95 se font dire de le jeter et se font donner un masque médical dit « de procédure », qui protège beaucoup moins.

Pour Benoit Barbeau, virologue et professeur au département des sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), il est plus que temps que le gouvernement provincial s’attaque à la transmission par aérosols.

« Dès le début de la pandémie, on a fait une erreur : on s’est beaucoup plus axé sur des mesures qui concernent les gouttelettes, mais on a laissé de côté tout ce qui était aérosols, dit-il. Je crois qu’on doit dès aujourd’hui adopter des mesures plus efficaces vis-à-vis de la transmission par aérosols. »

Retour en présentiel

Avec le retour en présentiel des employés de bureau et l’hiver qui arrive, les conditions sont propices à une hausse des risques d’exposition au virus, dit M. Barbeau.

Pour minimiser les risques, au-delà de demander la preuve vaccinale, on peut faciliter le travail en mode hybride afin de ne pas surcharger les espaces de travail, dit-il.

« Oubliez la notion que vos plexiglas vont vous protéger. Au niveau des aérosols, ce n’est pas suffisant. »

Dans une aire ouverte, par exemple, il faudrait porter un masque de type N95, qui filtre mieux, et pas seulement quand on se déplace, même quand on est à son poste de travail.

Benoit Barbeau, virologue

Au Royaume-Uni, le gouvernement a lancé une vaste campagne sociétale afin d’inciter les gens à ouvrir leurs fenêtres pendant dix minutes toutes les heures lorsqu’ils ont des invités à la maison, dans le but de diminuer les risques de propagation par aérosols.

Le professeur Benoit Barbeau recommande lui aussi de miser sur une plus grande ventilation des pièces. « Il y a des pays qui le font. En Allemagne, ouvrir la fenêtre pour laisser circuler l’air, c’est monnaie courante. C’est la meilleure façon de s’assurer que ces aérosols soient dilués. »

Une bonne façon de voir si une pièce est adéquatement ventilée est d’utiliser un détecteur de CO2, dit-il. Une pièce mal ventilée où se trouvent plusieurs personnes verra son taux de CO2 augmenter.

Sybille Jussome, conseillère en communication à l’Institut national de santé publique du Québec, note que la position de l’Institut « est la même que celle de la Dre Tam, des CDC américains et de l’OMS. C’est-à-dire que le virus se transmet surtout à proximité (moins de 2 mètres) par aérosols inhalés ou par déposition des gouttes et aérosols sur les muqueuses. Le risque de transmission du SRAS-CoV-2 est augmenté dans des espaces restreints, ventilés de façon inadéquate, à forte densité d’occupants et lorsque la durée d’exposition est prolongée ».