(Québec) Dès la fin de février 2020, donc avant que les CHSLD du Québec ne soient frappés de plein fouet par la COVID-19, le ministère de la Santé a mis à jour ses plans de préparation pandémique pour ces établissements. Les plans étaient « bien écrits », mais « la réalité du terrain » était toute autre, selon la coroner Géhane Kamel qui dirige actuellement l’enquête publique sur les décès survenus en CHSLD durant la première vague de la pandémie.

Durant son audience mardi matin, la coroner Kamel a souligné à plusieurs reprises les différences « entre ce qui est écrit et la réalité terrain » dans les CHSLD. « Vous portez, malheureusement, quelque chose sur vos épaules qui est très lourd », a commenté MKamel en s’adressant à la sous-ministre adjointe à la direction générale des aînés et des proches aidants au ministère de la Santé, Nathalie Rosebush, invitée à témoigner.

Mme Rosebush a détaillé les actions prises par le gouvernement pour se préparer à la pandémie en CHSLD. Le guide de préparation à une pandémie en CHSLD, revu en février 2020 et diffusé le 12 mars, prévoyait par exemple que les CHSLD trouvent du personnel supplémentaire pour faire face à la pandémie. Mais avant même la pandémie, les CHSLD étaient « en sous-effectifs », a commenté la coroner Kamel.

« Quelle est la place que les aînés ont prise dans cette crise-là ?, a demandé MKamel. Ou la place qu’on vous a accordée, comme direction au ministère, pour prendre soin de ces aînés-là alors que tout ce que vous avez écrit était prévu et planifiable ? Mais rien de ça n’a été au rendez-vous ».

La coroner a mentionné que le dévouement de Mme Rosebush a été souligné par plusieurs personnes durant son enquête. La fonctionnaire était notamment facilement joignable tout au long de la crise. Mais la coroner Kamel n’a pas caché son agacement devant le peu de préparation des milieux de vie pour aînés. « Si on avait parlé d’enfants, on serait probablement tous dehors à se déchirer la chemise », a-t-elle dit.

La coroner Kamel et son assesseur, le DJacques Ramsay, ont tous deux souligné qu’alors que les CHSLD étaient submergés de cas de COVID-19, un comité d’experts de gériatres n’a été créé qu’à la mi-avril à Québec. « Votre groupe arrive le 11 avril, il est un peu tard », a affirmé le DRamsay. « On a mis beaucoup d’actions sur les milieux hospitaliers, et c’est comme si vous, vous étiez là, mais toujours sur la voie d’accotement, à côté du gros système de santé. […] Comment vous expliquez ça ? », a demandé la coroner Kamel.

Mme Rosebush a répété à plusieurs reprises que des plans avaient été faits. « À la fin février, on était déjà en action pour la mise à jour des documents », a-t-elle dit. La coroner a répliqué que les plans étaient « bien écrits ». « Mais là, je vous parle du terrain. […] Qu’est-ce qu’on a fait pour planifier ce raz-de-marée-là qui a touché les CHSLD ? », a demandé la coroner.

Mme Rosebush a mentionné que des capsules ont été diffusées à la mi-avril pour aider le personnel qui allait prêter main-forte en CHSLD. « Mais cette formation est arrivée alors que vous étiez en train de brûler », a dit la coroner.

L’audience se poursuit mardi après-midi avec le témoignage de Luc Desbiens, sous-ministre adjoint à la direction générale des infrastructures, de la logistique, des équipements et de l’approvisionnement.