Le directeur national de la santé publique du Québec, le DHoracio Arruda, témoignera jeudi à l’enquête publique du coroner qui se penche sur les décès survenus en CHSLD durant la première vague de COVID-19.

Mercredi, une experte de l’Institut national de la santé publique du Québec (INSPQ) a témoigné à l’effet que les risques pour les milieux de soins de longue durée étaient connus dès février au Québec.

« Vers la fin janvier début février, ce qu’on disait c’était que s’il y avait transmission communautaire, les milieux de soins de longue durée pourraient être impactés », a témoigné la Dre Jocelyne Sauvé, vice-présidente aux affaires scientifiques à l’INSPQ.

Dans les scénarios pandémiques présentés au ministère de la Santé le 9 mars 2020, l’INSPQ mentionnait que de tous les groupes d’âge, les aînés seraient les plus touchés. Mais c’est surtout l’impact de la hausse des cas sur les hôpitaux québécois qui y a été détaillé, a expliqué la Dre Sauvé. « Dans les scénarios les plus catastrophiques, c’est que ça soufflait le réseau de courte durée, comme ce qu’on voyait en Italie », a dit la Dre Sauvé.

Submergé de questions

Le 17 mars 2020, le DArruda, a confié à l’INSPQ le mandat de vigie sanitaire de la COVID-19 et de coordination et d’intégration de la production scientifique.

Le défi a été immense, a expliqué la Dre Sauvé. « Il y avait des milliers d’articles produits chaque jour » sur la COVID-19, a-t-elle déclaré. L’INSPQ, qui rend normalement des avis en 6 à 12 mois, devait maintenant en produire en 30 minutes. Plus de 8000 questions ont été posées à l’INSPQ dans les quatre mois de la première vague de COVID-19.

La Dre Sauvé a tenu à rappeler que l’INSPQ « n’est pas une autorité de santé publique » et « ne prend pas de décision ». La mission de l’INSPQ est de « soutenir le ministre et les autorités régionales » en produisant des connaissances scientifiques.

Questionnée à savoir si l’INSPQ tenait compte des manques de stock, dont de matériel de protection, dans ses avis, la Dre Sauvé a dit que son collègue Jasmin Villeneuve du Comité sur les infections nosocomiales du Québec (CINQ) détaillera cet aspect dans son témoignage, reporté au 29 novembre. Elle a toutefois mentionné que des praticiens terrain se trouvent dans les comités de l’INSPQ. « On essaye d’être réaliste dans ce qu’on propose », dit-elle.

Vision de santé publique qui prime sur la santé au travail ?

Rappelant que 14 000 travailleurs de la santé ont été contaminés par le virus, le coroner DJacques Ramsay a demandé à la Dre Sauvé si la vision de santé publique a primé sur la vision de santé au travail dans les avis de l’INSPQ. La Dre Sauvé a assuré que l’INSPQ tente de « protéger les individus, qu’ils soient travailleurs ou bénéficiaires ». Elle a rappelé que les divisions sur le mode de transmission de la maladie étaient mondiales. Elle a mentionné que l’INSPQ a tenté de déterminer « c’est quoi le mode de transmission le plus fréquent en milieu de soins ». « C’est là-dessus qu’on base nos recommandations pour à la fois les travailleurs et à la fois les personnes à risque d’être infectées », a déclaré la Dre Sauvé, tout en disant que « ça demeure, même aujourd’hui, une controverse ».

La Dre Chantale Sauvageau, médecin à la direction des risques biologiques et santé au travail à l’INSPQ, a mentionné qu’en début de crise, le mode de transmission par gouttelettes a été retenu comme le mode principal de transmission de la maladie.

L’INSPQ a fini par reconnaître en janvier 2021 que la transmission de la maladie se fait via un continuum de particules de différentes grosseurs. La Dre Sauvageau a toutefois répété qu’à ce jour, « la masse de données montre que la transmission de ce virus se fait à courte distance ». La Dre Sauvageau a rappelé que dans les maisons où se trouve un cas de COVID-19, entre 15 % et 20 % des autres membres de la famille sont infectés. La maladie ne se transmet donc pas aussi facilement que, par exemple, la tuberculose, reconnue pour se transmettre de façon aérienne.

La Dre Sauvageau a aussi mentionné que des études cliniques démontrent qu’il y a peu de différence entre l’utilisation de masques ordinaires ou de masque N-95 pour les travailleurs de la santé. « On ne voit pas la supériorité du N-95 », a-t-elle dit. Parmi les hypothèses soulevées, selon la Dre Sauvageau : le fait que les masques de type N-95 soient moins confortables et qu’il soit donc « plus difficile de bien garder ces masques ».

En plus du DArruda, le DRichard Massé, conseiller médical stratégique à la direction générale de la santé publique témoignera jeudi.