Le gouvernement Legault a confirmé samedi qu’il permettrait « exceptionnellement » aux personnes ayant reçu une ou deux doses d’un vaccin qui n’est pas reconnu dans certains pays d’obtenir une troisième dose de vaccin contre la COVID-19, afin de pouvoir voyager. Il faudra toutefois en faire la demande.

« Exceptionnellement, les personnes pour qui il est nécessaire d’avoir une dose additionnelle de vaccin [à ARNm] peuvent l’obtenir via les services de vaccination en place et sur demande de leur part, si le besoin de se déplacer à l’extérieur du pays l’exigeait et qu’ils avaient reçu initialement un calendrier mixte », a indiqué la porte-parole du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) Marie-Hélène Émond.

Le MSSS n’a pas précisé à La Presse si les personnes ayant reçu deux doses du vaccin d’AstraZeneca pourraient demander une troisième dose.

Par « calendrier mixte », on entend toute personne qui aurait reçu une dose Covishield (le vaccin d’AstraZeneca produit en Inde) ou d’AstraZeneca, puis une dose de vaccin à ARNm, soit ceux de Pfizer ou encore de Moderna. Un tel scénario de vaccination pourrait se buter à un refus d’entrée dans plusieurs pays, notamment en Europe, où le vaccin de Covishield n’est pas officiellement reconnu par les autorités locales.

Ainsi, le même principe s’appliquera pour une personne ayant déjà reçu deux doses de Covishield. « Cette dernière pourrait aussi, de manière exceptionnelle et si sa situation le requiert, recevoir une dose additionnelle de vaccin (ARNm) pour pouvoir se déplacer dans certains pays ne reconnaissant pas ce vaccin », ajoute Mme Émond.

Il est donc possible d’obtenir une dose supplémentaire si les vaccins reçus au Canada ne sont pas reconnus dans le pays visité. Ces personnes doivent prendre un rendez-vous de dépannage ou se présenter à un centre sans rendez-vous.

Marie-Hélène Émond, porte-parole du ministère de la Santé et des Services sociaux

Une annonce « prématurée »

Le vaccin Covishield est en voie d’être approuvé « probablement dans la majorité des pays de l’Union européenne », selon André Veillette, professeur de médecine et directeur de l’Unité de recherche en oncologie moléculaire à l’Institut de recherches cliniques de Montréal. Le vaccin d’AstraZeneca est toutefois approuvé par l’Agence européenne des médicaments et le Royaume-Uni.

Aux États-Unis, les mélanges de vaccins à ARNm ne sont toujours pas acceptés, de même que le produit d’AstraZeneca. Cependant, « je pense que c’est une question de temps avant que ce soit résolu », a déclaré samedi M. Veillette.

« Je pense que c’est un peu prématuré, tout ça », a néanmoins conclu le professeur, en réaction à l’annonce gouvernementale.

Le MSSS n’a pas été en mesure de préciser si les personnes ayant reçu la combinaison de Pfizer et de Moderna pouvaient demander une troisième dose de vaccin.

Un autre constat s’impose : pour être admissible au passeport sanitaire européen, il faut avoir eu deux doses de vaccins à ARNm. Ainsi, « même avec une seule dose de Pfizer [les personnes ayant reçu Covishield] ne seront pas capables de rentrer [dans les pays] non plus », a renchéri M. Veillette.

Pour le professeur, la question à soulever est plutôt de savoir si les gens qui ont reçu le vaccin d’AstraZeneca ou le Covishield auront besoin d’une troisième dose de vaccin à ARNm pour consolider leur protection contre le virus.

AstraZeneca et Covishield sont très efficaces contre les formes graves de la COVID-19, mais ils le sont contre les formes moins sévères de la maladie, a expliqué M. Veillette.

Sur la plateforme Quebec.ca, les autorités précisent toutefois que « cette mesure est exceptionnelle et [que] la personne devra être conseillée adéquatement pour être informée des risques potentiels associés à cette dose additionnelle, en comparaison des bénéfices du voyage planifié ». « Il n’existe actuellement aucune étude pour évaluer l’impact de cette dose additionnelle », convient-on également. Ce que confirme André Veillette. Une étude est en cours au Canada et aux États-Unis, mais ses résultats ne sont pas encore divulgués, a-t-il précisé.

Cependant, « il serait surprenant que des effets secondaires sévères soient présents pour un tel protocole », a affirmé Benoit Barbeau, professeur au département des sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal, par courriel. Comme certains pays et provinces recommandent aux gens ayant contracté la COVID-19 de recevoir deux doses de vaccin, la contraction de la maladie équivalant en quelque sorte à une troisième dose, les autorités auraient déjà été alertées si des complications survenaient dans ces cas, a expliqué le professeur. Enfin, le Royaume-Uni et Israël autorisent déjà l’administration de troisièmes doses, a souligné M. Barbeau.

Québec réitère néanmoins que partout au Canada, un calendrier mixte « incluant un vaccin à vecteur viral [comme AstraZeneca et Covishield] et un à ARNm est accepté comme tout à fait valide ». « Les gens qui ont reçu deux doses de Covishield, ou deux doses de vaccin d’AstraZeneca, ou l’un et l’autre, ou encore un de ces vaccins suivi d’un autre vaccin à ARNm (soit Pfizer-BioNTech ou Moderna) ont une bonne protection contre la COVID-19 », assure-t-on.

Par ailleurs, le gouvernement a aussi indiqué samedi qu’il « est actuellement en discussion avec le fédéral afin que des représentations soient faites pour que les vaccins [AstraZeneca] et Covishield soient reconnus de manière plus large au niveau international, de même que le calendrier mixte ».

58,0 %

Pourcentage des Québécois de 12 ans et plus ont reçu deux doses de vaccin, en date du 22 juillet

Source : INSPQ

83,3 %

Pourcentage des Québécois de 12 ans et plus qui ont reçu leur première injection contre la COVID-19, en date du 22 juillet

Source : INSPQ

La tranche d’âge des 18 à 29 ans est la portion de la population la moins vaccinée. Le 22 juillet, 70 % d’entre eux avaient reçu leur première dose de vaccin.

Source : Compte Twitter de Santé Québec