Photoreportage À l’école des « injecteurs »
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PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE
Dans un local du Palais des congrès, sept personnes sont installées à des tables remplies de seringues, d’aiguilles, de tampons désinfectants et de diachylons. Une plaquette de « fausse peau » est aussi disposée devant elles. À l’avant, la formatrice Martine Lebeau amorce le cours en expliquant la théorie. Combien de millilitres prélever pour chaque type de vaccin. Quel type de seringue utiliser. Quoi inscrire dans le dossier du patient…
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Physiothérapeute qui travaille en gestion des risques à Urgences-santé, Anne-Marie Cliche fait du télétravail depuis le début de la pandémie. Elle s’est inscrite à la formation pour aider. « À la première vague, on nous disait que de rester sur notre divan aidait. Mais mon divan est assez usé. Et ce n’est pas toujours aux autres de faire des efforts », dit-elle. Mme Cliche prévoit notamment de travailler durant les week-ends à la vaccination.
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PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE
Au cours des derniers mois, le gouvernement a adopté différents décrets qui autorisent maintenant de nombreux professionnels à vacciner, explique Geneviève Beaudet, directrice adjointe aux pratiques professionnelles au CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal. C’est notamment le cas de nutritionnistes, de dentistes, de vétérinaires, d’acupuncteurs, d’étudiants en médecine… Une formation théorique en ligne a été créée par le gouvernement. Les CIUSSS ont aussi créé en quatrième vitesse des formations pratiques offertes depuis janvier.
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Au Palais des congrès, 20 infirmières retraitées qui se sont inscrites par l’entremise du site Je contribue sont maintenant formatrices. « Elles sont précieuses. Parce que comme ça, on n’est pas obligés d’aller puiser dans nos ressources déjà rares sur le terrain », explique Mme Beaudet. Retraitée depuis 11 ans, l’infirmière Louise Lefebvre, qui est gestionnaire en chef de la vaccination au Palais des congrès, explique que dans la chaîne de vaccination, seules les infirmières, les médecins, les pharmaciens et certains inhalothérapeutes et sages-femmes peuvent poser les questions d’évaluation au départ. On les appelle des « vaccinateurs ». Tous les autres professionnels autorisés sont quant à eux des « injecteurs » et peuvent administrer les doses. Ici, l’infirmière retraitée Mireille Rocher guide Guylaine Deshaies.
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À l’avant de la classe, Martine Lebeau enchaîne les explications simples et claires. Coller ses coudes près du corps quand on manipule la seringue pour plus de stabilité. Ne pas travailler avec des gants. Laver ses mains à plusieurs moments. Ne pas vacciner trop haut sur l’épaule d’un patient pour éviter de créer une capsulite.
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Chef de service formation et développement de la pratique à la direction des soins infirmiers du CIUSSS du Centre-Sud, Esther Cimon explique qu’il est faux de dire que vacciner, c’est « facile ». « Ce n’est pas un geste banal. Il y a beaucoup de science derrière ça. Ça change tout le temps. Pour quelqu’un qui n’a jamais manipulé de seringue, c’est un petit défi », dit-elle. La formation doit aussi constamment être ajustée pour tenir compte de l’évolution de la science.
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Après la théorie, les élèves passent à la pratique. Leur nervosité est palpable. Ils sont invités à prélever une dose de vaccin dans une fiole contenant essentiellement de l’eau, en s’assurant qu’il ne reste aucune bulle dans la seringue et que la bonne quantité de vaccin est prélevée. Opticienne et professeure de cégep retraitée, Guylaine Deshaies était très concentrée pour la période pratique.
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Prélever les doses demande un certain doigté. Pour accélérer le débit de vaccination, le Palais des congrès a créé une zone de prélèvement dans sa clinique de vaccination. En alternance durant leur quart de travail, les injecteurs sont isolés dans une pièce et prélèvent pendant une heure ou deux des doses à la chaîne. Les seringues sont ensuite apportées aux injecteurs, qui peuvent plus rapidement les administrer aux patients.
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Une fois la dose prélevée, les élèves doivent ensuite désinfecter leur table, préparer leurs outils et procéder à une vaccination sur une plaquette qui reproduit la texture de la peau. Mis à part le liquide du vaccin, tout le matériel utilisé est vrai, pour que les élèves aient vraiment une impression de réalité. Le formateur Daniel Malouin guide Anne-Marie-Cliche durant cette étape. « N’oublie pas de prévenir ton patient en disant une petite phrase du genre : “Attention, je pique” ».
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En après-midi, les élèves sont déjà amenés à tester leurs capacités sur de vraies personnes. Accompagnés d’un formateur, ils doivent réussir trois injections sans faute pour avoir le droit de voler de leurs propres ailes. « Certains ne sont pas à l’aise après une journée de pratique et reviennent pour une deuxième pour être sûrs d’être à l’aise. Des fois, il ne leur manque qu’un peu de rapidité », explique Mme Beaudet.
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À une autre table, Guylaine Deshaies reçoit Julie Loiselle, visiblement ravie de se faire vacciner. « J’attends ça comme une enfant de 5 ans qui attend Noël ! », lance-t-elle. Guylaine Deshaies vaccine sans problème la femme, qui repart joyeusement. « J’ai voulu aider pour être une poussière sur le bouclier de la COVID. J’ai pris ma retraite en janvier 2020. Je devais partir en voyage. Je n’ai pas pu. Je prévois d’aider trois jours par semaine », dit Mme Deshaies.
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À sa table, Anne-Marie Cliche semble déjà à l’aise. Didier Godin se présente pour se faire vacciner. La physiothérapeute accomplit toutes les étapes de la vaccination facilement. « Je m’excuse si c’est plus long. J’ai les mains pleines de Purell et ça commence à être collant ! », lance Mme Cliche, qui travaille sous l’œil attentif de Martine Lebeau. Des formatrices sont présentes tous les jours au Palais des congrès. Elles sont facilement identifiables par le dossard bleu qu’elles portent. « Elles peuvent corriger les petites erreurs si elles en voient. Ou répondre aux questions. Ça sécurise beaucoup les gens », note Mme Cimon.
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Au Palais des congrès, la formation est offerte sept jours sur sept. Plus de 500 personnes ont ainsi été formées à ce jour. Et on continue. Les candidats travaillent à temps plein ou partiel. « Ça demande beaucoup d’adaptation. Certains sont très loin de leur zone de confort. On leur donne beaucoup de soutien. Ceux qui ne sont pas à l’aise malgré ça, on les aide à trouver un autre endroit pour aider ailleurs », explique Marie-Hélène Lavallée (à droite sur la photo), clinicienne en pratique avancée à la direction des soins infirmiers du CIUSSS du Centre-Sud. Le chiropraticien Jean Seveno ne cache pas qu’il est vraiment loin de sa zone de confort. « Mais c’est une nouvelle expérience. Un nouveau défi. Et je veux aider », dit-il.
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