Les inquiétudes croissantes concernant les variants plus contagieux de la COVID-19 ont conduit certaines personnes à se demander si nos masques faciaux ont besoin d’une mise à niveau.

Devrions-nous superposer deux masques l’un sur l’autre, comme l’ont fait des politiciens et des spectateurs lors de l’inauguration présidentielle américaine plus tôt ce mois-ci ? Devrions-nous remplacer les masques en tissu par des masques de qualité médicale, comme le recommandent désormais certains pays d’Europe ? Et devrions-nous porter des masques même à l’extérieur ?

La Presse Canadienne a posé ces questions à des experts.

MASQUE DOUBLE

Le Dr Anthony Fauci, conseiller médical en chef du président américain, a déclaré récemment que le port de deux masques « avait du bon sens », mais certains experts ont des réserves relativement à cette affirmation.

L’idée derrière le port de deux masques est d’ajouter des couches supplémentaires de filtration, ce qui rend plus difficile la propagation des gouttelettes virales d’une personne à l’autre.

La Dre Jane Wang, professeure clinique à l’Université de la Colombie-Britannique qui a étudié les masques faciaux de manière approfondie, a déclaré dans un courriel que le port de deux masques pourrait améliorer l’ajustement et augmenter cette « efficacité de filtration ».

Si les deux masques ne sont pas bien ajustés autour du visage, cela n’aura toutefois pas d’importance.

Stephen Barr, un expert des agents pathogènes viraux à l’Université Western, note que les masques fonctionnent en filtrant l’air entrant et sortant pendant que nous respirons. Si trop d’air arrive à se faufiler à travers les espaces sur les côtés, « ce ne sera pas aussi efficace ».

Donc, un masque unique bien ajusté serait mieux qu’une approche doublée si des espaces laissent toujours passer l’air.

Si ce n’est pas scellé sur la peau, cela ne sert à rien, à mon avis.

Stephen Barr, expert des agents pathogènes viraux à l’Université Western

La respirabilité peut devenir un problème avec les masques superposés, et M. Barr prévoit que les gens tireront ou retireront plus souvent leurs couvre-visages doublés, leur donnant « plus de risques d’être infectés ».

La Dre Wang reconnaît que le double masque perd de son efficacité s’il est « trop chaud, qu’il respire mal ou qu’il cause des problèmes de rétention [de dioxyde de carbone] ».

L’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) ne recommande actuellement pas le double masque, affirmant dans un communiqué que « le contexte du Canada est différent de celui des États-Unis ».

« Nous continuerons de surveiller la situation et adapterons nos conseils si de telles preuves émergent », a déclaré l’ASPC dans un courriel à La Presse Canadienne.

Le CDC, établi aux États-Unis, n’a pas non plus publié de directives sur le port de deux masques à la fois.

La Dre Lisa Bryski, médecin à Winnipeg, n’est au courant d’aucune étude sur l’efficacité du masque double, mais elle est toujours d’accord avec l’affirmation du DFauci.

« Tout ce qui augmente les barrières ou la “course à obstacles”, comme on l’appelle, et qui permet la respiration en toute sécurité… cela a du sens », a-t-elle déclaré.

La Dre Bryski dit cependant qu’il y a des choses à garder à l’esprit lors de la superposition de couvre-visages. Les deux masques doivent être portés avec le bon côté comme couche intérieure, et « doivent tous les deux s’ajuster parfaitement sur votre nez, votre bouche et votre menton, sans espaces ».

« Et pensez à choisir un masque médical pour l’une des couches, ou les deux », a-t-elle ajouté.

MASQUES DE QUALITÉ MÉDICALE

Des endroits comme la France et l’Allemagne recommandent désormais des masques chirurgicaux ou des respirateurs de qualité médicale au lieu de masques en tissu faits maison pour ralentir la propagation de variants plus transmissibles.

Les directives actuelles de Santé Canada pour le grand public consistent à utiliser un masque non médical à trois couches, ajoutant que les masques chirurgicaux et les N95 devraient être réservés aux fournisseurs de soins de santé et à ceux qui s’occupent des patients atteints de la COVID-19.

La Dre Bryski pense que les Canadiens devraient envisager de passer aux masques jetables de qualité médicale, qui sont disponibles dans de nombreuses pharmacies et épiceries, ou même aux N95 avec les désignations NIOSH ou ECAN95 appropriées, qui, selon elle, deviendront plus largement disponibles.

Les masques chirurgicaux sont constitués de trois couches de matériau de qualité médicale, y compris des sections externes non résorbables et un milieu en polypropylène non tissé qui les rend plus efficaces pour filtrer les particules virales.

Ils sont notés par l’American Society for Testing and Materials en fonction du niveau de protection qu’ils offrent, de niveau 1 à 3.

La Dre Byrski suggère également des écrans faciaux en plus des masques, car les nouveaux variants ramènent la pandémie « presque à la case départ » en ce qui a trait à ce que nous savons de la transmission.

« Tout ce que nous pouvons faire pour améliorer la protection, nous devrions le faire », a déclaré la Dre Bryski, ajoutant que les recommandations peuvent être flexibles à mesure que de plus en plus d’informations émergent.

M. Barr dit que les masques en tissu pourraient encore suffire dans la plupart des scénarios, mais que nous devrions également garder une bonne distance avec les autres pendant qu’on les porte — et envisager d’augmenter cette distance de six à 12 pieds (1,8 à 3,65 mètres).

Alors que des études sont en cours pour évaluer le degré de transmissibilité des nouveaux variants, M. Barr dit que la propagation pourrait nécessiter moins de contact avec une personne infectée et moins d’expositions aux gouttelettes.

« Dans ce cas, vous voudriez probablement porter un masque plus ajusté, ou garder vos distances encore plus que la recommandation normale », a-t-il indiqué.

La Dre Wang dit que le port du masque vise « à réduire les risques et non à éliminer les risques », et que l’accent devrait être mis sur la bonne façon de porter le masque.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Un masque N95

« Si ce critère n’est pas satisfait, peu importe qu’il s’agisse d’un masque à trois couches, d’un double masque, d’un masque N95 [ou] chirurgical », a-t-elle déclaré.

LE MASQUE À L’EXTÉRIEUR

Les environnements extérieurs se sont généralement révélés plus sûrs, puisque l’air frais et la possibilité de prendre ses distances réduisent le risque de transmission. Cela devrait toujours être vrai avec les variants, dit M. Barr, mais nous devons être plus prudents.

Même une brève interaction, comme marcher à côté de quelqu’un sur un trottoir, pourrait suffire à transmettre des formes plus contagieuses du virus, souligne-t-il, bien que le temps exact d’exposition posant un danger reste à déterminer.

Faire une promenade en solo sans personne autour peut sans doute se faire sans masque, mais il pourrait être sage de le porter dans un sentier bondé.

« Cela dépend de la durée pendant laquelle le virus restera dans l’air, a-t-il déclaré. Une fois qu’il est confirmé que le variant est définitivement plus transmissible, je doublerais certainement la distance à 12 pieds si je ne portais pas de masque. »

La Dre Bryski dit que nous devrions normaliser le port de masques faciaux chaque fois que nous quittons notre maison et suggère d’en transporter plusieurs afin de pouvoir les remplacer s’ils deviennent souillés.

Le climat hivernal facilite également le port du masque à l’extérieur, ajoute-t-elle, puisqu’il offre l’avantage supplémentaire de la chaleur.

« Le Canada a de la chance à certains égards d’avoir cela », a-t-elle dit en riant. « Mais je pense que nous devrions commencer à porter un masque à l’extérieur parce que nous ne savons pas à quel point ce virus est plus contagieux maintenant […]. »

« Nous devrions prendre du recul et renforcer nos protections pour les autres et nous-mêmes. »