Le microbiologiste Marco Bergevin croit que les tests d’échantillons nasopharyngés pourraient être remplacés d’ici quelques mois

Cet été, à la fin de sa journée au laboratoire de microbiologie à la Cité-de-la-Santé de Laval, Marco Bergevin prenait la liste quotidienne des personnes ayant eu un test positif de COVID-19. Il contactait certaines d’entre elles pour leur demander de participer à l’élaboration d’un test de salive ; si elles acceptaient, il se rendait chez elles pour avoir un échantillon. Ensuite, il revenait au laboratoire vers 20 h ou 21 h.

« J’ai vu dès le mois d’avril qu’il faudrait avoir un test de salive pour faire du dépistage massif », explique le DBergevin, dont les efforts ont été récompensés au début de septembre par l’introduction d’un programme limité de tests de salive à Laval. « Je savais qu’il fallait travailler fort pour vérifier que la sensibilité soit comparable aux tests sur des échantillons nasopharyngés. » La sensibilité d’un test diagnostique permet d’établir son taux de faux négatifs.

Les résultats sont assez encourageants pour que le DBergevin envisage que les tests de COVID-19 soient, d’ici le milieu de 2021, faits sur la salive plutôt qu’à partir d’échantillons nasopharyngés. « On a fait un test sur une unité où il y avait une éclosion », dit le DBergevin, qui a travaillé étroitement avec ses collègues Maude Saint-Jean et Olivier Haeck. « On faisait auparavant un écouvillon nasopharyngé. Là, on a fait un test de salive par jour. On a détecté une soignante qui était positive, mais n’avait pas de symptômes, et on a pu la retirer avant qu’elle n’infecte des gens. »

Les seuls groupes qui devront continuer à avoir un écouvillon dans le nez sont les personnes âgées qui ont moins de salive à cause de médicaments, les patients atteints de démence et les très jeunes enfants. « Il faudra aussi voir si on pourra faire les tests d’influenza et de virus respiratoire syncytial avec la salive. Si ce n’est pas le cas, il faudra garder l’écouvillon pour les patients qu’on veut tester pour tous ces virus. »

Une étude publiée la semaine dernière dans le New England Journal of Medicine montrait que le léger déficit de performance des tests de salive par rapport aux échantillons nasopharyngés était plus que compensé par des tests plus fréquents.

Capacité des laboratoires

N’y a-t-il pas un manque de capacité d’analyse en laboratoire ? « Nous faisons déjà des combinaisons [pooling] d’échantillons pour les échantillons nasopharyngés et je devrais avoir mardi les données d’une étude sur le pooling de salive, dit le DBergevin. J’ai un feeling que ça va marcher. S’il y a trop de dilution, j’ai un plan B, on modifiera le test commercial. »

Cette stratégie de combinaison s’applique à trois échantillons : si l’échantillon est négatif, il y a trois résultats d’un seul coup. S’il est positif, il faut refaire trois tests individuels. Actuellement, un peu moins du tiers des 1500 à 1700 échantillons analysés chaque jour par le laboratoire du DBergevin sont combinés. Un autre tiers des analyses est fait sur la salive.

De 6 à 11 : nombre de jours passés par 11 échantillons de salive à la température ambiante, avec des résultats identiques au test initial de COVID-19

Le DBergevin a fait l’analyse sur 270 paires d’échantillons salive-pharyngés, dont 70 étaient positifs. Il pense qu’il sera possible d’offrir seulement le test de salive pour la grande majorité des patients quand il aura le double d’échantillons positifs. « On est allés de l’avant pour certains groupes pour des motifs humanitaires, et aussi parce qu’il y a beaucoup d’études dans le monde qui montrent que la salive donne de bons résultats. »

Les collègues du DBergevin travaillent en ce moment sur un plan de tests de salive dans les écoles, pour avoir des résultats rapidement et limiter la fermeture de classes.

Est-ce que les tests de salive pourraient aider à la réouverture des lieux publics comme les restaurants et les bars ? « Je pense que pour les bars, la solution sera dans les tests antigéniques, dit le DBergevin. C’est comme un test de grossesse, on a le résultat très rapidement. Les bars pourraient faire payer des frais d’entrée pour couvrir les tests. Si une personne est positive, elle ne rentre pas et doit aller se faire tester par la salive. »