(Toronto) Lorsque la Santé publique de Toronto a annoncé en fin de semaine qu’elle suspendait temporairement ses efforts de recherche de contacts, plusieurs se sont demandé quel impact cela pourrait avoir sur une pandémie en croissance rapide.

Alors que les experts en santé publique affirment que la gestion des cas et des contacts n’est qu’une des étapes dans l’approche à multiples facettes pour ralentir la propagation du virus, il s’agit tout de même d’une étape importante.

La décision de la Santé publique de Toronto résulte d’un nombre écrasant de tests positifs signalés au cours des dernières semaines ; les efforts de traçage devenaient alors insurmontables. Les autorités locales assurent toutefois que le traçage sera toujours effectué dans des établissements collectifs comme les foyers de soins de longue durée.

La docteure Fatemeh Alsadat Sabet, résidente en santé publique à l’Université de Calgary, admet qu’il peut être long et ardu de retracer les contacts des personnes déclarées positives — surtout si elles en ont fréquenté plusieurs autres alors qu’elles étaient contagieuses. Mais cet investissement en temps est généralement payant pour empêcher la pandémie de prendre de l’ampleur, soutiennent les experts.

Par contre, il est vrai qu’une augmentation des cas a un impact direct sur la capacité des traceurs de contacts à accomplir leur travail, rappelle le docteur Jeff Kwong, de l’Université de Toronto. Et si le grand confinement comme celui du printemps rend ce travail plus facile, parce que les rassemblements sont plus limités, ce n’était plus le cas depuis l’été. Le docteur Kwong rappelle aussi que la recherche des contacts « n’est utile que si vous pouvez attraper le contact suffisamment tôt, avant qu’il ne commence à infecter d’autres personnes ».

Auriez-vous été imprudent ?

Puisque la recherche des contacts est suspendue à Toronto, les personnes déclarées positives seront responsables d’en informer elles-mêmes leurs contacts étroits. Si ce système « basé sur l’honneur » fonctionne dans certaines situations, ce n’est pas le cas dans d’autres — comment retracer ses contacts dans un commerce, un restaurant ou un centre de conditionnement physique ?

Il peut aussi y avoir une certaine stigmatisation liée à la COVID-19 — votre infection est-elle due à un comportement imprudent ? Les chercheurs connaissent déjà ce phénomène avec les infections transmises sexuellement. « De même, il peut être très difficile pour les gens d’admettre leur état à leurs patrons et leurs collègues de travail », rappelle le docteur Zain Chagla, infectiologue à l’Université McMaster, en Ontario.

Certes, la notification des contacts peut être facilitée par l’application Alerte COVID, qui prévient de façon anonyme les utilisateurs qui auraient été exposés à une personne déclarée positive. Mais le docteur Chagla précise que ce système n’est pas non plus parfait : il oblige tout le monde à posséder l’application et le système Bluetooth sur son téléphone, et les cas positifs doivent d’abord sonner l’alerte dans l’application.

Le docteur Kwong rappelle finalement que les gens peuvent contribuer à alléger la pression sur les bureaux de santé publique en limitant leurs contacts. Et s’ils choisissent de sortir de chez eux, ils devraient noter leurs allées et venues dans un journal, pour faciliter un éventuel traçage des contacts.

« En fin de compte, on doit réduire nos cercles sociaux, résume-t-il : si on reste à la maison, si on porte un masque en sortant et si on réduit nos interactions à l’extérieur, et bien on pourra arrêter la propagation du virus. »