(Vancouver) Une équipe internationale de chercheurs a utilisé les données de stations sismiques de 117 pays pour déterminer que les restrictions visant à empêcher la propagation de la COVID-19 ont entraîné une baisse sans précédent du bruit.

L’étude publiée jeudi dans la revue américaine Science montre que le bruit sismique, ou les vibrations générées par l’activité humaine, ont chuté de 50 % en mars et avril, en particulier dans les zones urbaines.

Les scientifiques ont surnommé ce phénomène : l’anthropause. Pendant cette période, la circulation automobile, le trafic aérien et maritime, les concerts, les joutes sportives et autres rassemblements ont fortement ralenti, quand ils n’ont pas tout simplement cessé.

« Nous pouvons constater une coupe très nette à partir de la Chine et de l’Italie, puis partout ailleurs au moment où la pandémie se propage et que sont adoptées des politiques de confinement », a déclaré l’une des autrices de l’article, Mika McKinnon, qui enseigne à l’Université de Colombie britannique.

Et si ce phénomène a été plus prononcé dans les villes, il a aussi été constaté dans des endroits calmes, comme le puits d’une mine abandonné en Allemagne.

Selon les données d’une station sismique à Vancouver, le niveau du bruit a chuté lorsque la Colombie-Britannique a fermé les écoles, les bars, les restaurants et autres établissements.

À Seattle, non loin de là, le bruit sismique a aussi chuté un peu plus tard, avant de remonter plus rapidement.

« Il y a une quantité différente de bruit de fond au départ. Mais si on regarde le pourcentage de diminution, les gens de Vancouver sont restés chez eux beaucoup plus rapidement », souligne Mme McKinnon.

Elle dit que les données de cette période de calme aideront les scientifiques à détecter davantage de tremblements de terre et leur permettront de mieux différencier les bruits sismiques d’origine humaine et naturelle.

« Nous avons une bien meilleure compréhension de ce que sont ces formes d’ondes générées par l’homme, ce qui facilitera à l’avenir la possibilité de les filtrer à nouveau. »

Mme McKinnon prévient que les dernières données ne permettront pas de prédire quand des tremblements de terre se produiront, mais elles offrent aux scientifiques un aperçu plus approfondi de la sismologie et de l’activité volcanique de la planète.

Les données sismiques sont également rassurantes, a-t-elle déclaré, car elles montrent que de nombreuses personnes font toujours moins de bruit tout en restant plus près de chez elles et en suivant les directives de santé publique pendant la pandémie.

La baisse du bruit a aussi été constatée dans les océans de la Terre, mentionne Richard Dewey, directeur adjoint des sciences à Ocean Networks Canada, à l’Université de Victoria.

Il compare la pandémie à une expérience imprévue pour les chercheurs en acoustique marine qui espéraient depuis des années une occasion d’étudier l’océan sans pollution sonore provenant de pétroliers, de navires de croisière, de traversiers, de navires d’observation des baleines et de bateau de pêche commerciale.

Les données de deux emplacements de surveillance au large de la côte de l’île de Vancouver montrent que le bruit sous-marin a chuté de semaine en semaine, en particulier en avril, lorsque l’activité économique a ralenti, dit M. Dewey.

Un océan plus calme fait partie de la formule qui aiderait au rétablissement des épaulards résidents du sud, une espèce en voie de disparition, qui reviennent chaque année dans la mer des Salish autour du sud de l’île de Vancouver, mentionne-t-il.

C’est une tâche ardue d’évaluer si le comportement des orques a changé à cause de la baisse du bruit, avance M. Dewey, car leur cri est unique. Les chercheurs n’entendent des extraits que lorsque les résidents du sud passent devant des hydrophones qui les enregistrent.

« On les entend parfois une seule baleine faire des vocalises. Parfois, elles discutent toutes en même temps. Nous ne savons pas nécessairement comment interpréter cela. »

Mais l’hypothèse générale est que si l’océan était plus calme, les baleines pourraient communiquer entre elles, naviguer et évaluer leur environnement et acquérir de la nourriture plus efficacement, a déclaré Dewey.