La vague d’éclosions de COVID-19 qui a déferlé au sein des usines de transformation de viande du pays n’a pas épargné les inspecteurs en salubrité et les vétérinaires fédéraux. Le syndicat qui les représente rapporte que 40 d’entre eux ont contracté le coronavirus, dont six inspecteurs et un vétérinaire au Québec.

Fait à noter, les chiffres fournis par l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) diffèrent légèrement du décompte syndical. Officiellement, on recense 38 employés infectés, dont 11 au Québec. Ce ne sont pas tous des inspecteurs, insiste l’agence fédérale, mais la vaste majorité d’entre eux travaillent au sein d’abattoirs ou d’usines de transformation de protéines animales.

Alors que le gouvernement Trudeau vient d’allonger 77 millions pour permettre aux entreprises de transformation alimentaire d’acheter de l’équipement pour protéger leurs travailleurs, le syndicat des employés de l’ACIA reproche à Ottawa de ne pas fournir un équipement adéquat à son propre personnel. Il exige l’achat de masques N95 pour les fonctionnaires fédéraux qui sont en poste dans les usines de transformation de viande et les abattoirs.

« Le gouvernement du Canada doit assumer ses responsabilités », a indiqué Fabian Murphy, président national du syndicat Agriculture de l’Alliance de la Fonction publique du Canada, en entrevue avec La Presse.

[Si Ottawa] désigne ces employés comme un service essentiel et l’industrie de la viande comme une source critique de nourriture, qu’il aille de l’avant en fournissant l’équipement nécessaire pour que les personnes cessent continuellement de tomber malades.

Fabian Murphy, président national du syndicat Agriculture de l’Alliance de la Fonction publique du Canada

M. Murphy explique qu’en tant qu’employeur, l’ACIA a certes fourni des visières et des masques de papier ou de tissu à ses employés, mais que cet équipement est insuffisant. Seul un masque de grade N95 peut réellement protéger la personne qui le porte, souligne-t-il. Malgré les mesures de distanciation physique mises en place au sein des abattoirs, comme l’installation de plexiglas, garder deux mètres de distance n’est pas toujours possible, dit-il.

« Le problème, c’est que les usines de transformation de viande sont des endroits très humides. Les visières deviennent embuées, et les masques, trempés. La COVID-19 est un danger biologique qui circule sur les gouttelettes d’eau, donc il faut s’assurer qu’elles ne passent pas à travers les masques de tissu. »

Au Canada, des inspecteurs fédéraux et des vétérinaires sont postés en permanence au sein d’usines de transformation qui détiennent des permis pour exporter des denrées hors de leurs frontières provinciales. Les inspecteurs se portent garants de la salubrité alimentaire, tandis que les vétérinaires s’assurent du bien-être des animaux. Ils seraient environ un millier à l’échelle du pays.

Un problème nord-américain

Partout en Amérique du Nord, les usines de transformation alimentaire et les abattoirs sont particulièrement frappés par le coronavirus. Au Canada, plusieurs dizaines d’entreprises ont recensé des éclosions de COVID-19 de différentes envergures.

Le plus gros foyer d’éclosion de COVID-19 au Canada s’est d’ailleurs déclaré dans un abattoir appartenant à l’entreprise Cargill à High River, en Alberta. Près de 1000 travailleurs y ont été infectés. On y a aussi déploré trois morts.

Au Québec, l’usine d’abattage et de désossage d’Olymel, à Yamachiche, a dû fermer deux semaines à la suite d’une importante éclosion. Au début de mai, on y recensait 129 cas.

Plus récemment, 73 des 500 employés de l’usine de transformation de viande Cargill à Chambly ont été infectés. L’usine a rouvert lundi après une pause de quelques jours, le temps de tester la quasi-totalité de ses employés.

L’ACIA n’a pas confirmé au sein de quelles entreprises travaillaient ses employés qui ont été infectés, et nous a plutôt fourni un portrait par région.

Répartition des travailleurs de l’ACIA atteints par la COVID-19

Ouest canadien : 22

Québec : 11

Ontario : 4

Région de la Capitale-Nationale : 1

Selon le syndicat Agriculture, 18 des 37 inspecteurs travaillant à l’usine Cargill de High River, en Alberta, ont reçu un diagnostic positif à la maladie. « Le taux d’infection chez Cargill est plus grand que celui de toutes les provinces atlantiques réunies. Cela vous donne une bonne idée de l’ampleur du problème. »

Aide fédérale

Le 5 mai dernier, le gouvernement Trudeau a annoncé une aide de 77 millions pour aider les entreprises à mettre en place des mesures de distanciation physique ou pour acheter des équipements de protection individuels, comme des visières, des masques ou des lunettes.

« Des masques et des écrans faciaux sont mis à la disposition de tous les inspecteurs des viandes de l’ACIA qui ne peuvent pas pratiquer la distanciation physique », a quant à elle ajouté l’ACIA dans un courriel qu’elle nous a fait parvenir lundi.

« Les employés de l’ACIA suivent les directives en matière de santé et de sécurité publiées par l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) et Santé Canada, ainsi que par les autorités locales de santé publique, et suivent les protocoles mis en place dans les établissements où ils travaillent pour atténuer les risques d’exposition au virus de la COVID-19 », a ajouté le service des communications de l’ACIA dans son courriel.