(Ottawa) La hausse rapportée des cas de violences contre les femmes dans les communautés autochtones en confinement en raison de la pandémie de la COVID-19 a ramené à l’avant-plan le dévoilement prévu en juin du plan d’action national au sujet des femmes autochtones disparues ou assassinées.

L’Association des femmes autochtones du Canada (AFAC) a effectué une série de consultations à travers le pays pour déterminer les impacts de la pandémie de COVID-19 auprès des femmes des communautés des Premières Nations, inuites et métisses du Canada.

Les résultats préliminaires ont marqué une hausse très inquiétante du nombre de femmes autochtones disant avoir été victimes de violence depuis le début de la pandémie, souvent de la part de leur partenaire intime.

Un sondage effectué auprès de plus de 250 femmes autochtones a révélé qu’une répondante sur cinq a déclaré avoir été victime de violence physique ou psychologique au cours des trois derniers mois.

De plus, les résultats préliminaires de ce sondage et de deux autres consultations laissent entendre que la plupart de ces femmes craignent plus la violence conjugale que le virus pendant la pandémie.

La présidente de l’AFAC, Lorraine Whitman, s’est dite « choquée » par ces chiffres et très inquiète pour la sécurité des femmes autochtones du Canada, cependant que les responsables de la santé publique continuent de demander aux gens de rester confinés dans leur maison.

« Nous savons que dans un monde idéal, la maison est un endroit sûr. Mais le monde n’est pas parfait et la maison n’est pas sûre pour certaines femmes et familles, a rappelé Mme Whitman. Avec la distanciation physique et la quarantaine volontaire, des femmes doivent rester à la maison où elles sont confinées avec leur agresseur et ne peuvent s’enfuir. Elles ont nulle part où aller. »

Même avant le début de la pandémie, les femmes autochtones du Canada vivaient avec des risques élevés de violence et d’abus — une réalité désolante révélée par l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (FFADA).

La ministre des Relations Couronne-Autochtones, Carolyn Bennett, avait affirmé en décembre que le gouvernement fédéral dévoilerait un plan d’action en réponse aux découvertes de l’enquête en juin 2020, ce qui marquerait le premier anniversaire de la publication de 231 appels à la justice.

Samedi, à Ottawa, le premier ministre Justin Trudeau a indiqué que l’élaboration de la réponse nationale se poursuivait et que ce travail était « plus important que jamais ».

« Le gouvernement travaille depuis le début pour offrir un meilleur appui et des refuges aux organisations et réseaux qui appuient les victimes de violence familiale ou basée sur le genre. Nous continuons à faire ce travail, a-t-il dit. Nous allons continuer à travailler très fort sur le plan d’action national à la suite de l’Enquête. C’est une priorité continuelle et même intensifiée en raison de la crise. »

Michèle Audette, qui a été l’une des commissaires de l’Enquête, a dit que même si le plan d’action avait été mis en place avant la pandémie, elle n’était pas convaincue qu’il aurait changé la triste réalité que vivent les femmes autochtones pendant la crise.

« Je ne sais pas si nous aurions vu un changement immédiat puisque c’est un problème enraciné profondément dans la culture, dans le système colonial, a noté Mme Audette. Parce que nous voyons l’impact du colonialisme, nous ne sommes pas une priorité et nous pouvons le voir pendant la pandémie. »

Mme Audette a rappelé que tous les niveaux de gouvernement — fédéral, provincial, municipal et autochtone — devaient s’assurer que les refuges, les travailleurs sociaux et les premiers répondants au service des populations autochtones sont suffisamment bien appuyés pour répondre aux problèmes de violence contre les femmes.