« Le gouvernement l’a échappé avec les CHSLD. Il est en train de l’échapper avec les prisons », affirme Mathieu Lavoie, président du Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec.

Les détenus de deux des plus grands secteurs de l’Établissement de détention de Montréal (Bordeaux) sont maintenant confinés à leur cellule en raison de la propagation de la COVID-19 qui semble vouloir se poursuivre dans la plus grosse prison du Québec.

Selon le Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec, on dénombre ce matin 15 agents correctionnels infectés, et trois pour lesquels les autorités attendent encore les résultats de tests de dépistage.

Quant aux détenus, il y en aurait ce matin 17 officiellement infectés, et 16 qui ont été soumis hier à un test de dépistage dont les résultats ne sont pas encore connus.

Le premier cas de COVID-19 chez les personnes incarcérées est survenu dans le secteur E qui abrite 170 détenus qui travaillent dans l’établissement. « Le secteur complet a été placé en quarantaine depuis vendredi et la santé publique le considère comme contaminé », explique Mathieu Lavoie.

Toutefois, un premier cas a été diagnostiqué dans l’aile C, un autre grand secteur de la prison qui abrite autant de personnes incarcérées. Le détenu infecté a toutefois quitté le secteur vendredi. Malgré tout, les détenus de ce secteur qui date d’une centaine d’années ont aussi été placés depuis hier en confinement, c’est-à-dire 24 heures sur 24 dans leur cellule.

Quatorze d’entre eux présentent des symptômes et ont subi hier des tests de dépistage dont on attend les résultats.

Ce matin, on apprend que deux détenus du secteur D, qui présentent des symptômes, ont également été testés. Ce secteur est toutefois un secteur rénové, divisé en plusieurs petites sections, ce qui pourrait permettre de limiter les risques de propagation.

Ce sont des infirmières de la Santé publique qui se rendent dans la prison pour effectuer les tests de dépistage.

« À Bordeaux, avec 1100 détenus, on est plus gros qu’un CHSLD, mais on n’a pas les ressources et les effectifs d’un CHSLD. Il va falloir augmenter la cadence et le nombre de tests dans les prisons. Nous sommes exposés à un risque auquel nous ne sommes pas habitués. On travaille avec des masques, des visières et des jaquettes. On ressemble à des employés de laboratoire. Cela augmente notre niveau d’anxiété et notre niveau de risque », décrit M. Lavoie.

« Nous n’avons pas la formation pour faire face à une telle situation. Les éclosions surviennent dans les deux pires secteurs où il ne fallait pas que ça arrive. Il y a beaucoup de déplacements dans ces secteurs et il va sûrement falloir envoyer des agents correctionnels à la maison de façon préventive, car ils ont été en contact avec des détenus. Il est peut-être temps que l’on commence à parler des prisons », conclut M.  Lavoie, qui aurait souhaité que la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, soit questionnée sur le sujet lors du point de presse quotidien du gouvernement hier.

Par ailleurs, un détenu de Bordeaux s’est adressé à la Cour supérieure hier, pour obtenir sa libération, notamment en raison des risques de contracter la COVID-19. Le juge Guy Cournoyer a pris la cause en délibéré et rendra sa décision le 8 mai.

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