L’ancien ministre de la justice libéral Irwin Cotler accuse la Chine d’avoir facilité la transmission de la pandémie, dans des lettres ouvertes publiées en Israël et au Canada. Selon lui, des poursuites contre la Chine sont en préparation et des sanctions devraient être adoptées.

« Il y a plusieurs cas de médecins chinois qui ont été punis parce qu’ils avaient sonné l’alarme à la fin décembre ou au début janvier », dit en entrevue MCotler, qui dirige le Centre Raoul-Wallenberg, ONG vouée à la défense des droits de l’homme à Montréal. « Et la Chine n’a pas voulu que l’OMS écoute l’avertissement de Taiwan fin janvier. »

La Chine a mis Wuhan et la province environnante du Hubei en confinement le 23 janvier, en plein congé du Nouvel An lunaire. Plusieurs des voyages entourant cette fête ont eu lieu. L’essai de MCotler donne neuf cas de médecins chinois punis auparavant pour avoir discuté de la nouvelle maladie infectieuse et note qu’un microbiologiste renommé de Hong Kong, Ho Pak Leung, avait sonné l’alarme le 4 janvier, mais a été obligé de se dédire, affirme MCotler.

Taiwan a dévoilé le 11 avril le contenu d’un courriel envoyé le 31 décembre à l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) demandant « des informations pertinentes » sur « sept cas de pneumonie atypique » à Wuhan, affirmant n’avoir pas eu de réponse. L’État insulaire n’est pas membre de l’OMS, la Chine s’y opposant. L’OMS a affirmé fin mars être en contact régulier « avec des experts taiwanais », mais n’a pas commenté ce courriel du 31 décembre.

« L’OMS a accepté jusqu’au 22 janvier les assurances de la Chine qu’il n’y avait pas de transmission communautaire de la COVID-19, dénonce Me Cotler. Pendant ce temps, Taiwan envoyait des experts à Wuhan et se préparait. Résultat, Taiwan a très peu de cas. » 

Si la Chine avait été plus transparente, il n’y aurait peut-être pas de pandémie.

Me Irwin Cotler

La Chine a répliqué plusieurs fois à ce type d’accusations, notamment relayées par le président Donald Trump, affirmant avoir toujours collaboré avec l’OMS.

La Chine devant les tribunaux ?

Le professeur émérite de l’Université McGill a envoyé à La Presse une évaluation des avenues permettant de poursuivre la Chine dans différents tribunaux, pour sa lenteur à réagir à la pandémie et à en informer les autres pays. Cette analyse, estimant à 4000 milliards US le montant d’indemnisation que les pays du G7 pourraient demander à la Chine, a été faite par la société Henry Jackson, un groupe de réflexion britannique voué à la défense de la démocratie.

« Il faudrait que les pays démocratiques prennent des sanctions contre la Chine pour son rôle dans la pandémie », affirme Me Cotler, qui défend des dissidents chinois depuis 40 ans. Selon lui, la COVID-19 pourrait être un « Tchernobyl chinois », minant la confiance de la population en son gouvernement.

« Une simplification »

Me Cotler appuie sa thèse de la responsabilité chinoise sur une étude publiée en mars sur le site Medxiv par des épidémiologistes de l’Université de Southampton, qui ont conclu que si la Chine avait pris des mesures d’isolement trois semaines plus tôt, elle aurait connu 95 % moins de cas. « Dire que des mesures d’isolement trois semaines plus tôt en Chine auraient évité au monde la pandémie est une simplification de nos résultats », a dit à La Presse Andy Tatem, l’un des auteurs de l’étude de l’Université de Southampton. « Personne ne peut être sûr qu’une action trois semaines plus tôt aurait empêché une pandémie. Les pays du monde ont eu beaucoup plus que trois semaines pour se préparer et n’ont pas pu empêcher sa propagation. » Medxiv accueille des études qui n’ont pas encore été acceptées par des revues avec comité de lecture (peer review).