François Legault, jeudi : « On peut pas accepter que tant de gens fassent des efforts et que ces efforts soient anéantis par quelques personnes… »

Dans son point de presse de jeudi, le PM a ciblé les récalcitrants, ceux qui pensent que la distanciation sociale et physique ne s’applique pas à eux.

Ça peut causer des morts, a-t-il rappelé.

La police va sévir, a dit M. Legault, en invitant les policiers à sortir le calepin à tickets. Et il a invité les Québécois à dénoncer ceux qui ne respectent pas les règles…

Bien fait, bien dit.

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Heille, drôle de détour, mais je vous jure qu’il y a un lien avec les propos tenus par François Legault, jeudi. Parlons coquetterie, une seconde…

Confinement oblige, les manucures se dégradent et les repousses de cheveux sont de plus en plus visibles dans les chaumières. Les services d’esthétique ne sont pas des services essentiels et des millions de reflets dans le miroir en témoignent…

Comme l’a facétieusement statué une amie Facebook : « Dans trois mois, on va savoir qui avait du Botox dans le visage et qui n’en avait pas. »

Car il semble que les injections de Botox soient comme la vidange d’huile d’un véhicule : il faut faire ça ponctuellement. Ce serait tous les trois mois, dans le cas du Botox. Sinon… Paraît que ça paraît.

Je garde le cheveu court, généralement. Mais là, ça commence à frisotter. Ça commence à ne plus tenir. Ça s’en vient long. Ça commence à ressembler à une terre laissée en friche. Hors confinement, je suis à ce stade déjà dû pour ma coupe de cheveux ponctuelle…

Ça me gosse, bien sûr. Si bien qu’il y a une semaine, dix jours, je faisais en mon for intérieur des simulations de pacte avec le diable. Comme dans les dessins animés, le petit ange sur une épaule, le petit diable sur l’autre…

Dialogue intérieur : « Disons que je demanderais à X de venir me couper les cheveux… »

« Je porte un masque… »

« Elle porte un masque… »

« On-fait-attention, on-fait-très-attention… »

« Et en plus, on va pas parler, et… »

« Et… Et… »

Et, me suis-je dit, t’es complètement taré, arrête d’essayer de faire des deals avec ta conscience.

Bref, je vais bientôt passer le rasoir électrique là-dedans, c’est tout, à la guerre comme à la guerre.

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Je parle de coquetterie, mais pas tant que ça, finalement. Je parle du fond bien plus que de la forme.

Parce que nous sommes nombreux à avoir ce dialogue intérieur, ces jours-ci. Nous sommes plusieurs à vivre ces tiraillements entre le diable et l’ange sur nos épaules, eux qui murmurent dans nos oreilles, qui nous disent que-c’est-pas-si-grave, que si-on-fait-attention, où-est-le-problème…

Je parle de ces laissez-passer qu’on quête à notre conscience en ces temps de pandémie.

Ça donne un mariage célébré alors qu’il n’aurait pas dû être célébré, histoire rapportée par Vincent Larouche dans La Presse de jeudi. Ce mariage, organisé dans l’hôtel d’un promoteur immobilier de Montréal, est devenu un foyer d’éclosion de la COVID-19.

Ça donne des parcs pleins de Montréalais qui se promènent au soleil et qui s’agglutinent en petits groupes, très certainement en-faisant-très-très-attention.

Ça donne des ados affranchis de l’autorité de leurs parents qui se réunissent dans des lieux publics. Ce qui fait passer les autres parents – les parents qui tiennent leur bout avec leurs ados confinés – pour des emmerdeurs.

Ça donne des voyageurs qui reviennent au pays et qui ne se sentent pas visés par ces règles de quarantaine, qui débarquent à l’épicerie, à la pharmacie. Mais ils font attention, voyez-vous, EUX, c’est pas pareil pour EUX…

Ça donne ce propriétaire d’un marché Metro de Saint-Alphonse-Rodriguez qui revient de Floride et qui va dans son épicerie en pleine nuit, au mépris des instructions sur le confinement. L’histoire sort dans La Presse, c’est une fessée publique à la grandeur du Québec…

Mais le lendemain, le même gars a reçu deux employés de son épicerie chez lui. Metro a mis son épicerie en tutelle, puisque le proprio semble avoir laissé son jugement sur la route entre la Floride et le Québec.

Ça donne aussi des chicanes larvées dans des édifices de condos, ces jours-ci, au moment même où vous lisez ces lignes. Des propriétaires qui envoient promener le syndicat des copropriétaires qui « ose » leur envoyer le décret ministériel 222-2020 du gouvernement du Québec qui proscrit les rassemblements. Les syndicats de copropriétaires rappellent que, non, vous ne pouvez pas faire de souper d’amis à la maison…

Et des proprios de répondre : « Tu me diras pas quoi faire ! Libaaaarté ! »

Il y a aussi des divorcés du réel, comme ce snowbird revenu du Mexique qui m’écrivait jeudi, qui plaide qu’il n’a pas tellement suivi l’actualité d’ici là-bas et qui dénonce ce Québec plongé en pleine « propagande » de la « peur » et qui s’étonne même que son gendre lui ait ordonné de se mettre en quarantaine chez lui sans faire d’escale à l’épicerie…

Le snowbird a obéi. Je le cite : « Mon beau-fils semblait même prêt à se battre avec moi ! »

Je félicite votre beau-fils, monsieur.

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François Legault, encore : « C’est injuste pour la majorité qui respecte les règles de voir quelques personnes nuire à nos efforts collectifs. Je dis à ceux qui ne respectent pas les consignes : vous allez recevoir des amendes. »

Les amendes oscillent de 1000 $ à 6000 $.

J’écoutais le PM et je me demande si ça va aller aussi bien qu’on se le répète, qu’on se le répète comme un mantra, « Ça va bien aller, ça va bien aller, ça va bien aller… »

J’espère que « ça va bien aller », comprenez-moi bien. Les hospitalisations en soins intensifs – sous contrôle – donnent espoir, en ce sens. Je trouve émouvante la majorité qui se soucie de son prochain et qui est solidaire des règles. Mais en temps de pandémie, on le voit, la tyrannie de l’individualisme et de sa cousine pas-vu-pas-pris ne prend pas forcément congé.