La Ville de Montréal a décrété l’état d’urgence local, vendredi après-midi, à la demande du directeur national de santé publique. Cette nouvelle mesure accorde à la municipalité les pouvoirs nécessaires pour réquisitionner des lieux d’hébergement privés et pour acheter du matériel d’urgence et de la nourriture pour les personnes qui y seraient hébergées. Qu’en pensent les Montréalais pour qui la situation est préoccupante ? Sont-ils inquiets d’un possible confinement total de la ville, qui compte plus de 900 personnes atteintes du virus ? Faudrait-il aller plus loin ?

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Serge Levesque

« On a peur », lâche Serge Levesque, qui attendait en file près de la Mission Old Brewery. Le risque de propagation est élevé pour les sans-abri qui dorment dans des refuges bondés, où la distanciation sociale se pratique difficilement. « On couche à côté de quelqu’un pour qui c’est difficile de se confiner, on ne sait pas où les gens sont allés dans la journée. C’est dur, il y a des gens qui n’ont pas vraiment accès à l’information en tout temps et qui sont à risque. »

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Denis Chalifoux (à gauche)

Denis Chalifoux voit d’un bon œil les mesures annoncées par la mairesse pour freiner la propagation du virus à Montréal. L’état d’urgence est nécessaire pour protéger les personnes vulnérables, dit-il en fumant une cigarette près du refuge pour sans-abri. « Mais je ne sais pas si ça va être suffisant. On ne peut pas contrôler tout le monde, ce qu’ils font, ce qu’ils touchent », nuance-t-il. Tout récemment, l’accessibilité au dortoir du refuge a commencé à être contrôlée, pour s’assurer qu’il y ait le moins d’entrées et de sorties possible. « Il y a trois bedchecks pendant la nuit. À 9 h, à minuit et à 2 h. Si tu n’es pas là, tu perds ton lit. »

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Bertrand Fréchette

Bertrand Fréchette a été pris d’une vive inquiétude quand il a appris qu’il y avait un cas détecté à la Mission Old Brewery chez un autre sans-abri. Il s’est rendu à la clinique sans rendez-vous de la place des Festivals, ouverte au début de la semaine dernière. « J’attends mon résultat encore. C’est long », explique-t-il. Selon les quelques personnes en situation d’itinérance interrogées par La Presse vendredi à la Mission Old Brewery, les mesures déployées pour les protéger sont venues un peu trop tard.

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Matt Whykes et Frédérique Tremblay

La mairesse Valérie Plante a assuré qu’il demeurait possible jusqu’à nouvel ordre d’entrer dans la ville et d’en sortir. Si Montréal était mis en quarantaine, cela ne dérangerait guère Matt Whykes et son amie Frédérique Tremblay, qui se baladaient vendredi dans Parc-Extension. Beaucoup de gens ne comprennent pas la situation et les symptômes n’apparaissent pas automatiquement. Résultat ? Des gens atteints propagent la maladie sans le savoir, plaide la jeune femme. « S’il faut en arriver là pour garder les gens chez eux, qu’on le fasse. »

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Jean-Eudes Patrick Augustin

L’état d’urgence local ne change absolument rien dans la vie de Jean-Eudes Patrick Augustin, dit-il. Vendredi en fin d’après-midi, dans le quartier Parc-Extension, l’homme s’occupait de livrer des médicaments le sourire aux lèvres. « Je pense que le gouvernement du Québec et la mairesse font du bon travail jour après jour. » Toutes ces nouvelles décisions sont nécessaires et il faut rester positif, pense-t-il.

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Ali Marcel

Ali Marcel juge que les mesures adoptées vendredi par la Santé publique sont efficaces. Il ne faut toutefois pas s’inquiéter outre mesure, a-t-il dit à La Presse alors qu’il faisait quelques courses au coin de la rue Jarry et de l’avenue Querbes. La possibilité d’une présence policière accrue ou d’une mise en quarantaine pour tous en contexte d’état d’urgence ne le tracasse pas. Il continuera à sortir uniquement pour subvenir à ses besoins essentiels et à faire des marches quand il fait beau.