Les vacanciers peinent à trouver des solutions pour rentrer au pays depuis que le ministre des Affaires étrangères du Canada, François-Philippe Champagne, a avisé les voyageurs de revenir « par des moyens commerciaux pendant qu’ils sont encore disponibles ». Certaines compagnies d’assurance ont quelques pistes de solution qui pourraient rassurer les expatriés, mais rien n’est joué, alors que la situation évolue de jour en jour.

Beaucoup sont préoccupés par la propagation de la COVID-19 en Europe ou ailleurs, mais craignent aussi la fermeture des frontières canadiennes dans un contexte de pandémie qui évolue à vitesse grand V. C’est une véritable course contre la montre pour les Québécois qui tentent de regagner la province.

Alexandre Vignola-Côté et sa conjointe Mali Navia sont en Grèce. Ils terminaient un long périple dans le sud de l’Europe après sept mois passés en Belgique pour des études supérieures. Témoins des balbutiements de la crise en Italie, début mars, ils sont partis pour la Grèce. Depuis une semaine, ils ont changé trois fois leurs plans et tout autant de fois leurs vols pour écourter leur voyage et rentrer au pays.

« On avait un billet pour revenir le 7 avril, de Lisbonne [Portugal], puis on a décidé de revenir directement de la Grèce, le 29 mars. Vendredi, après l’appel aux voyageurs de rentrer le plus tôt possible, on a devancé au 22 mars », laisse tomber M. Vignola-Côté, au bout du fil.

Ça nous a coûté au moins 2500 $ de plus, jusqu’à maintenant. Pour revenir encore plus tôt, c’était des billets à 2000 $ par personne. On n’a pas les moyens. On ne peut pas.

Alexandre Vignola-Côté

Leur plan de retour est déjà prêt : un proche leur laissera une voiture à l’aéroport et fera une épicerie qu’il laissera à la maison qu’un autre proche leur prête. Ce sera l’isolement pour 14 jours… S’ils réussissent à rentrer à temps.

Assureurs en mode urgence

Le premier ministre canadien s’est montré rassurant dimanche en point de presse. 

Jamais on n’empêcherait un Canadien de rentrer au Canada. Mais il faut savoir que les transporteurs aériens vont prendre des décisions dans les jours ou les semaines à venir qui pourraient rendre cela difficile.

Justin Trudeau 

« Donc, on encourage les gens à essayer de revenir bientôt », a continué Justin Trudeau.

Il est conseillé de prendre un vol le plus rapidement possible, peu importe le prix. « Les gens qui ont acheté une assurance avec volet annulation et interruption peuvent interrompre leur voyage, acheter un billet de retour et tenter d’obtenir une indemnisation à leur arrivée au pays », explique Pierre-Olivier Fortin, conseiller en communication chez CAA-Québec. Si l’indemnisation est possible, son montant peut varier. « On est dans une situation d’urgence, où le risque sanitaire pourrait dépasser le risque financier, insiste M. Fortin. On le fait chez CAA-Québec, mais ça ne veut pas dire que tous les assureurs vont procéder ainsi », poursuit-il. 

Souvent, avec les assurances collectives de cartes de crédit, certaines personnes pourraient y avoir droit sans le savoir, confirme Charles Tanguay, porte-parole de l’Office de protection du consommateur.

Les voyageurs qui sont passés par une agence de voyages sont avantagés. S’ils ont acheté un fonds d’indemnisation destiné aux clients des agences de voyages, ils peuvent obtenir un remboursement de leur billet, explique-t-il.

En principe, si vous êtes coincés à l’étranger, on peut rembourser le vol de remplacement. Il faut toutefois définir si la personne est coincée. Le simple fait de vouloir revenir ne représente peut-être pas un motif en soi.

Charles Tanguay, porte-parole de l’Office de protection du consommateur

Une personne peut être couverte à la suite d’un retour hâtif au Canada si elle détient une assurance annulation et interruption de voyage et si un avertissement de niveau 3 ou 4 du gouvernement du Canada d’éviter tout voyage non essentiel vers le pays où elle se trouve a été émis. C’est le cas pour l’ensemble des pays actuellement, confirme Jean-Pascal Lavoie, relationniste chez La Capitale Assurance et services financiers. Même chose si un vacancier doit retarder son retour en cas de mise en quarantaine.

Par ailleurs, les Canadiens détenteurs d’une assurance voyage pourraient avoir droit à d’autres avantages. Par exemple, une allocation quotidienne pour les repas ou l’hébergement s’ils doivent rester à l’étranger, confirme Dominique Biron-Bordeleau, de l’Association canadienne des compagnies d’assurance de personnes (ACCAP).

« La situation actuelle évolue rapidement. Chaque compagnie d’assurance pourrait bientôt adapter son approche en fonction de l’évolution de la situation. Il est très important de s’informer auprès de son assureur pour avoir toute l’information nécessaire », ajoute-t-elle.

Ne pas prendre de risque

C’est une véritable course contre la montre pour les Québécois qui tentent de regagner la province.

Membre du réseau de la santé, une mère de famille qui préfère garder l’anonymat n’avait aucune réponse d’Air Transat vendredi. Elle a donc déboursé 1500 $ pour que sa fille revienne de Lisbonne, au Portugal. « Les billets sont excessivement chers. Le prix variait entre 1500 $ et 3000 $. » La famille n’a pas pris de risque et a opté pour un vol vers Montréal avec escale d’une nuit à Bruxelles. « On craignait qu’à Bruxelles, on demande à ma fille de s’isoler pour deux semaines si elle passait la nuit à l’hôtel, puisque les cas se multiplient au Portugal. On lui a dit que ce ne serait pas le cas », explique-t-elle, inquiète et à bout de souffle.

Des recommandations à la réalité 

La recommandation d’Ottawa est difficile à appliquer. Les prix des allers simples atteignent des sommes faramineuses, et les compagnies aériennes peinent à répondre aux demandes.

En ces temps incertains, beaucoup se rabattent sur des outils d’aubaines aériennes. Sur le site internet KAYAK, le prix d’un aller simple entre Madrid et Montréal se situait à 932 $ dimanche matin, mais pouvait monter jusqu’à 3493 $, bagage en soute inclus. Il faut également être prêt à faire une escale ou deux… ou même trois.

Pour les vols entre Paris et Montréal, on parle de 1033 $. Rome-Montréal, 1574 $. Un trajet entre Malaga et Montréal était annoncé au prix de 1041 $ et incluait le déplacement en train jusqu’à Madrid. Le vol le moins cher pour Montréal en partance du Portugal coûtait 1665 $.

Mais attention : ces offres par l’entremise de KAYAK disparaissaient déjà très rapidement. La plupart des vols impliquaient de longues escales et le réenregistrement des bagages, et possiblement un changement d’aéroport dans une même ville. Pour certaines destinations de départ, les trajets allers-retours étaient moins chers que les allers simples.