J’ai fait un petit exercice de revue de presse qui va, je l’espère, vous intéresser. J’espère aussi qu’il illustrera bien à quel point la fiscalité municipale n’est plus appropriée pour le XXIe siècle.

Mise en contexte

Il y a deux siècles, quand la taxe foncière a été inventée, l’immense majorité des services offerts par les villes visaient les propriétés : déneigement, asphaltage, sécurité, incendie, aqueducs, etc. D’ailleurs, le mot « foncier » veut dire « relatif à un fonds de terre, à sa propriété, à son exploitation ». C’est on ne peut plus clair.

Aujourd’hui, la même taxe foncière sert à offrir des services dont la plus grande part ne vise plus les propriétés, mais bien les personnes : culture, loisirs, développement social, développement économique, sport, etc.

La revue de presse de novembre, oui, juste novembre, mois de présentation du budget pour plusieurs municipalités dont Montréal cette semaine, nous donne une bonne idée de ce que font les villes modernes.

Immigration

La MRC de Rivière-du-Loup se dote d’un tout premier plan en matière d’accueil en immigration (1er novembre), la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu fait de même le lendemain (2 novembre), Repentigny organise un forum sur le vivre-ensemble (9 novembre). Lévis (10 novembre), La Côte-de-Gaspé (11 novembre), la MRC Les Moulins, Terrebonne et Mascouche (14 novembre) organisent des activités d’accueil des immigrants.

Aînés

La Municipalité de Bois-Franc annonce qu’elle se donnera une politique d’aide aux aînés (2 novembre) et la Municipalité de Lanthier renforce la sienne (9 novembre). La Municipalité de Tingwick forme ses employés municipaux au repérage des aînés vulnérables de son territoire (14 novembre).

Économie

La Ville de Lévis s’associe à la Chaire de recherche en intelligence artificielle de l’Université du Québec à Rimouski (4 novembre).

Les municipalités sont partenaires de 45 marchés publics pour le temps des Fêtes (15 novembre).

Mirabel tente de consolider sa place de choix dans l’industrie aérospatiale grâce à une zone d’innovation (25 novembre).

Développement social

La MRC des Appalaches signe une entente avec le Centre de pédiatrie sociale des Appalaches pour les enfants de la région (4 novembre).

Sherbrooke met en place une démarche pour favoriser l’inclusion sociale dans son centre-ville (16 novembre).

La MRC de Témiscamingue lance un projet de capsules vidéo visant à démystifier les pratiques artistiques des artistes du territoire (16 novembre).

L’Ancienne-Lorette devient partenaire financier d’un projet de frigo partage (21 novembre).

Environnement

La Ville de Montréal met en place un fonds de recherche pour sauver cinq espèces menacées (21 novembre).

La Ville de Saint-Lin–Laurentides refuse de dézoner des terres agricoles, un geste nécessaire pour l’environnement, mais nuisible aux revenus fonciers de la Municipalité — Saint-Lin donne ainsi une leçon au gouvernement du Québec1 (22 novembre).

Lisez l’éditorial « Quand Saint-Lin donne une leçon à Québec »

Et des chercheurs se prononcent : « La clé de la lutte contre la décarbonisation : les villes », un rapport de KPMG (17 novembre). « L’après COP27 : il faut cibler les villes pour accélérer la réduction des émissions de GES » (21 novembre).

Je le sais, vous êtes plusieurs à vous dire que les villes devraient arrêter d’investir dans tous ces domaines et s’en tenir à leurs tâches du siècle dernier.

Le problème dans cette approche est qu’elle est théorique. C’est ce qui se passe dans la réalité qui pousse les villes à agir. Elles répondent à des besoins réels. Elles le font aussi avec l’appui de leurs citoyens et, croyez-moi, quand une ville exagère, elle se le fait dire assez rapidement.

Le conflit entre les nouveaux rôles des villes et les anciens n’en est pas un de pertinence, mais bien de financement. Les villes doivent s’occuper des gens comme des propriétés. En environnement, en développement social, en immigration, en culture, leur rôle est essentiel. Mais la fiscalité ne suit pas, donc les villes doivent choisir ce qu’elles négligeront. Rues ? Bibliothèques ? Sports ? Aînés ?

Les villes s’investissent dans de nouveaux domaines tout simplement parce que c’est nécessaire. Il devient chaque jour de plus en plus nécessaire que le Québec adapte la fiscalité municipale à cette nécessité, c’est-à-dire à la réalité sur le terrain.