Bon ben, on dirait bien que cette fois, c’est la bonne. Nous aurons droit, cette année, à un Noël comme dans le temps. Sans restriction, sans bulle, sans distanciation, sans masque, sans Zoom. Un Noël d’antan. Le premier depuis 2019. Enfin ! Ça va faire du bien ! On va faire le party ! On va s’éclater !

Sauf que ça ne se fera pas tout seul. Annuler, c’était facile. Un appel ou un texto, c’était réglé. On pouvait se reposer la conscience en paix, en se disant combien on aurait aimé recevoir la parenté. Combien on l’aurait gâtée. Combien on l’aurait couverte de notre générosité. Malheureusement, on ne pouvait pas. C’était pas de notre faute. C’était la faute aux « trois amigos ». Joyeux Noël, la gang ! On se reprendra !

Ne pas annuler, c’est une autre paire de manches. D’abord, il faut organiser ce que l’on n’annule pas. C’est pas mal plus compliqué. Comment fait-on ça, déjà ? Trois ans, c’est loin. Vous rappelez-vous la complexité de la tâche ?

D’abord, il faut dresser la liste des invités. Combien et qui ? Pas évident, han ? En 2020, c’était facile, on ne pouvait réveillonner qu’avec les gens de notre foyer. L’année dernière, le quota était de dix convives. On recevait les proches les plus proches et le tour était joué. Mais ce Noël, on fait quoi ? On revient à la tablée de 2019 ou on profite des précédents causés par la pandémie pour éliminer ceux qu’on désirait éliminer depuis longtemps, sans oser le faire, tradition oblige ? C’est tentant. Qu’est-ce qu’on fait avec oncle Germain et tante Delphine ? Où trace-t-on la ligne ? À quatorze ? À vingt ? À trente ?

Quelle raison donne-t-on à ceux qu’on n’invite plus ? On a vendu nos chaises ? On a déménagé dans plus petit ? On a perdu leur contact ? On a la COVID longue ?

Et la bouffe ? En trois ans, tout a changé. Les allergies se sont multipliées et le végétalisme s’est répandu. Trouver un menu qui fait l’unanimité est une mission impossible. On prépare combien d’options ? On achète combien d’EpiPen ? Et les cadeaux ? Les deux dernières années, c’était simple. On donnait des cadeaux aux gens que l’on voyait, et comme on ne voyait personne, ça ne coûtait pas cher. Mais cette année, à qui on en donne et à qui on n’en donne pas ? Gros dilemme. Le pire, c’est quand on reçoit un cadeau de quelqu’un à qui on avait décidé de ne pas en donner. On se sent tellement cheap. On se sent cheap pour dix fois le montant économisé.

Et puis, il n’y a pas que les réceptions à gérer, il y a les invitations, aussi. En 2020 et en 2021, rien de plus simple : personne ne nous invitait. Notre congé des Fêtes était vraiment un congé. On se prélassait, on profitait du grand air, on faisait le plein. Ça va être le retour des grandes négociations. Quand va-t-on dans ma famille ? Quand va-t-on dans la tienne ? Faut-il vraiment aller dans la tienne ? Quand va-t-on chez mes amis ? Quand va-t-on chez les tiens ? Faut-il vraiment aller chez les tiens ?

Il n’y a pas assez de journées pour remplir toutes ses obligations. Vous allez regretter les Noëls en mou. Car qui dit voir du monde dit s’habiller comme du monde. Va falloir renouveler votre garde-robe. Oui, les Noëls d’antan, c’est des Noëls d’argent ! Et depuis 2019, tout n’a pas seulement changé, tout a inflationné ! Le coronavirus était doux pour la Visa.

Parlant de virus, c’est pas ça qui va manquer. Au lieu d’en avoir un qui nous empêche de sortir, il va y en avoir plein qui vont courir. Sans masque et sans distanciation, on va tous se les passer, allègrement. Le nez va couler autant que la crème de menthe verte. Les urgences vont déborder de malades et Nez Rouge va déborder de soûlons.

J’oubliais les décorations. Cette année, il ne suffit pas d’embellir votre fond de Zoom. Il faut décorer la maison au complet. En dedans et en dehors.

Il vous reste quatre semaines pour vous préparer à tout ça. Aucune chance que le trio Legault-Dubé-Boileau vienne vous sauver. Le Noël 2022 aura lieu. Au complet. À fond. Avec tous ses excès. À vous de les contrôler. À vous de les mesurer. Joyeux temps des Fêtes, les ami·e·s ! Dans six semaines, c’est terminé !