Rien n’a vraiment changé à la tête pourrie de la FTQ-Construction, à part les noms. L’esprit est le même. La même gang de bums est aux commandes.

Et le plus beau de l’affaire ? Comme aux temps criminels de Jocelyn Dupuis, le président de la puissante Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec ne fera rien pour que ça change. Rien, rien, rien.

E-rien.

La FTQ-Construction, c’est des cotisations de 30 millions par année à la centrale FTQ. C’est aussi un syndicat de gros bras qui a toujours su fermer les gueules.

C’est donc peu dire que d’affirmer que la FTQ-Construction tient le reste de la FTQ par la bourse.

Jeudi, ma collègue Émilie Bilodeau nous a appris que le syndicaliste Rénald Grondin avait commis du harcèlement et des agressions sexuelles à répétition sur sa secrétaire. Pendant deux ans. Entre 2008 et 2010. Une décision de la Commission des lésions professionnelles en fait foi. La victime vit encore un enfer psychologique, 12 ans plus tard.

Lisez l’article « Il a gravi les échelons malgré des agressions »

À l’époque, Grondin était directeur général du très anonyme syndicat des manœuvres inter-provinciaux (AMI), affilié à la FTQ-Construction.

CAPTURE D’ÉCRAN TIRÉE D’UNE VIDÉO DES SOUPERS DES BÂTISSEURS

Rénald Grondin était président de la FTQ-Construction jusqu’à sa démission, jeudi dernier.

En 2018, six ans après qu’une juge a décrit noir sur blanc dans une décision publique les sévices sexuels de Grondin, il se retrouve à la présidence de la FTQ-Construction. Les noms n’apparaissent pas à la décision de 2012, mais après une décision aussi grave impliquant l’AMI, impossible de penser sérieusement que l’information n’ait pas circulé.

Comment lui-même a-t-il pensé faire ça sans danger ? Parce qu’il connaît sa gang.

Comment personne ne l’en a empêché ? Parce que c’est sa gang.

Ça résume assez bien comment ce boys club n’a rien à cirer de la loi, des droits des femmes et de tout ce qu’ils prétendent défendre dans leurs communiqués, comme l’a bien expliqué ma collègue Rima Elkouri vendredi.

Lisez la chronique « FTQ-Agression »

Lisons tout de même ce communiqué de jeudi : « Pour la FTQ-Construction, le harcèlement sexuel et psychologique, c’est tolérance zéro. Nous savons que nous opérons dans une industrie à prédominance masculine avec un climat difficile pour les travailleuses et nous devons être un exemple pour tous et toutes. »

C’est-ti pas beau, ça, rien qu’un peu, ça ? To-lé-ran-ce-zé-ro !

Non mais quelle blague.

L’avocat représentant l’AMI, où sévissait Grondin, était Robert Laurin. MLaurin est aussi… l’avocat de la FTQ-Construction. Et l’avocat n’a rien dit quand ce gars-là allait devenir le président de la FTQ-Construction ? Il n’a pas même pris la peine d’alerter la direction ? Les travailleurs, qui paient son salaire ?

Me semble que c’est pas fin, ça, MLaurin. Me semble que c’est une information hautement pertinente, non ?

Interrogé par ma collègue Émilie Bilodeau, MLaurin a répondu ceci : « Ce n’était pas à moi de lever la main à la FTQ-Construction. Je suis procureur. Je ne suis pas dirigeant. »

C’est joli, non ?

MLaurin n’avait pas la même réserve quand il allait faire bombance aux soupers bien arrosés de Jocelyn Dupuis aux frais du travailleur, comme en font foi les travaux de la commission Charbonneau.

Parlons-en donc, de la commission Charbonneau. On en a appris, des choses, sur ce sympathique syndicat.

Je nous ramène à mars 2009. Les médias ont commencé à publier les notes de frais princières du syndicaliste Jocelyn Dupuis, alors directeur de la FTQ-Construction. Ça sent la fraude à plein nez aux dépens du travailleur de la construction – Dupuis sera plus tard condamné à un an de prison, au fait.

Le président de la centrale, Michel Arsenault, n’aime pas trop l’odeur de scandale. D’autant que Dupuis a aussi des liens avec des proches des Hells Angels et de la mafia. Il vient d’apprendre que le directeur de la FTQ-Construction de l’époque, Richard Goyette, a demandé l’approbation du caïd Raynald Desjardins (bras droit de Vito Rizzuto) avant d’accepter le poste. Pour être certain qu’il ne « fasse pas de marde ».

Arsenault appelle un de ses conseillers politiques. Il s’inquiète de ce qu’il apprend. Son conseiller lui dit : « La gangrène est plus pognée qu’on pense. »

Réponse de Michel Arsenault ?

« J’ai pas avantage à m’ingérer. On va repousser ça sur eux autres. Si on a un affilié tout croche, pourquoi je prendrais ça sur mes épaules ? »

Voilà, résumée en quelques mots, l’approche de la FTQ face à cet État dans l’État. Rien dire et laisser faire.

Ça non plus, ça n’a pas changé, si vous avez lu les platitudes de l’actuel président, Daniel Boyer, un homme authentiquement sensible à la promotion des femmes dans l’industrie de la construction, etc.

À noter aussi : le nom de Rénald Grondin apparaît plusieurs fois dans le rapport de la commission. Il était un proche, très proche de Jocelyn Dupuis. Il était au courant des magouilles, des élections syndicales truquées, du copinage avec le crime organisé.

Le simple fait d’avoir été acoquiné avec le groupe de Dupuis devrait suffire à le disqualifier.

Mais on est à la FTQ-Construction. Alors, bof !

Les constatations d’un tribunal sur son harcèlement et ses agressions répétées ?

Y a rien là ! Même l’avocat du syndicat ne voit pas de motif d’alerter qui que ce soit !

Communiqué du syndicat : « Notre organisation durcira ses enquêtes pour s’assurer qu’une telle situation ne se reproduise pas et s’assurera d’honorer les standards élevés qu’exigent les membres qui nous ont choisis partout à travers la province. »

Elle est bonne, avouez. Tout ce monde se connaît, se fréquente, se copine depuis des années. Mais ça leur prend des « enquêtes » pour savoir à qui ils ont affaire…

Ils vous diront que des enquêtes (de la CCQ notamment) ont eu lieu et n’ont rien révélé. Sauf que la seule vérification permise est celle du casier judiciaire. Or, Grondin n’a jamais été accusé au criminel pour ce harcèlement et ces agressions. C’était « seulement » du droit du travail.

Si vous voulez mon avis, ils savaient très bien à qui ils avaient affaire. Il siège à des instances depuis des années, connaît tout le monde et est connu de tout le monde.

Et c’est exactement pour ça qu’il était président jusqu’à jeudi.

Parce que rien ne doit changer, à la FTQ-Construction.

Parce que « la gangrène est pognée plus qu’on pense », mais que ça fait l’affaire de plein de gens. Et que la FTQ-Construction, avec ses 80 000 membres, c’est aussi la FTQ tout court.