Le Canadien vient de perdre. Air connu. En prolongation. C’est presque bon. Martin St-Louis arrive au point de presse. Il prend une gorgée d’eau en boîte, pendant qu’un journaliste formule la première question. C’est à propos du but controversé, qui a donné la victoire aux Stars de Dallas. Réponse du coach :

« C’est pas une décision que j’aime, mais dans ma jeune carrière d’entraîneur, faut que tu la respectes un peu, alors je vais la laisser comme ça. »

Le journaliste lui fait remarquer qu’il a retraité au vestiaire, aussitôt le but marqué, sans attendre la possible révision. Il sourit, en fermant les yeux : « Oui, on m’a dit de retourner tout de suite, je suis allé sur le banc et je l’ai vu sur la télé… C’est des choses que j’apprends comme entraîneur, faut que tu fasses attention de pas partir du banc trop tôt. »

Il ricane, un peu. Les journalistes, aussi.

Ses prédécesseurs se présentaient devant la presse comme on se présente à une coloscopie. Le balai bien serré, en ayant hâte d’en finir. Pas lui. Il s’installe là, avec tout son swag. Vous voulez jaser de la game ? Ça tombe bien, moi aussi, c’est de ça que j’ai envie de parler.

Cette attitude fait tellement de bien. Parce qu’il ne jase pas de la game avec seulement quelques scribes, il raconte sa vision à des milliers de fans. Qui trippent autant hockey que lui.

La jasette se poursuit. On l’interroge à propos de Brendan Gallagher, revenu au jeu, après en être sorti, en petits morceaux. Une fois de plus. St-Louis vante la combativité du vétéran : « C’est un gars qui est très euh… tough, comme on dit, que ce soient des bobos, ici et là, j’suis pas surpris que Gally est revenu. Pis j’suis pas surpris de l’énergie, et de la… la… la toughness ? »

Il se retourne vers la vice-présidente communication, Chantal Machabée, comme il le fait chaque fois qu’il peine à trouver un mot en français. St-Louis est né à Laval, mais toute sa vie d’adulte, il l’a passée aux États-Unis. In English. Il aurait bien aimé rester ici, mais le Canadien le trouvait trop petit. Alors il est devenu un membre du Temple de la renommée, ailleurs. Il pourrait donc terminer son envolée dans la langue de Michael Rousseau, sans qu’on puisse lui en vouloir. Ben non, il a la politesse d’insister pour trouver le bon mot, dans la langue de ceux à qui il parle. Il a l’humilité de se faire aider par la VP, dans l’ombre, à sa droite. C’est hyper charmant. Et ça en dit beaucoup sur la nature de cet homme.

Quand il a été nommé entraîneur par intérim, le 9 février dernier, le CH était une équipe morte. Sans âme. Sans identité. Atroce à voir jouer. Il l’a complètement transformée. Du jour au lendemain. Elle s’est mise à compter. Elle ne gagne pas tout le temps, mais elle n’abandonne jamais. Pourtant, ce sont les mêmes joueurs. Mais ils sont tous à leur mieux. Oui, grâce à l’arrivée d’un seul homme. Il ne s’appelle pas saint pour rien !

Quel est le secret de cet inespéré succès ? Un mot. TRUST. Comment on dit, Chantal ? CONFIANCE. C’est ça, la confiance. Les petits gars ne croyaient plus en eux. Et voilà qu’un leader les a tirés vers le haut. Parce que la confiance est quelque chose de contagieux. Et Martin St-Louis inspire et expire la confiance. Ça fait beaucoup de gouttelettes dans les airs.

Pas la fausse confiance. Pas l’arrogance surfaite des athlètes hautains, qui ne fait que masquer leur manque de confiance. Pas la confiance vaniteuse. Non, la vraie confiance humble du gars qui n’a rien à cacher.

Le petit Martin n’avait pas le choix d’avoir confiance en lui, parce que tous les autres doutaient de lui. Il n’y a pas de place, dans la LNH, pour les 5 pi 8 po, en patins. Tous ces dénigreurs l’ont eu sur le nez comme un Romain se penchant vers Astérix. Une Coupe Stanley, une médaille d’or olympique, une Coupe du monde, trois Lady Byng, deux Art Ross, un Lester B. Pearson et un Hart. Ce que la confiance peut faire.

Et pour passer, directement, de coach de pee-wee à coach de la plus prestigieuse équipe de la planète, il faut en avoir en surplus.

Que vous aimiez le hockey ou non, inspirez-vous de Martin St-Louis comme coach de vie. Vous voulez vous améliorer ? Vous voulez progresser ? Être la meilleure version de vous-même, comme on dit sur Instagram ? Faites-vous confiance. Cessez de vous critiquer. Cessez de vous diminuer. Ça va juste vous empirer.

Et vous voulez que votre enfant s’améliore ? Qu’il progresse ? Qu’il devienne la meilleure version de lui-même, comme on dit sur TikTok ? Faites-lui confiance.

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Cole Caufield, le 15 mars dernier

Il y a quelques semaines, Cole Caufield n’était pas du calibre de la Ligue nationale. Il fallait le retourner dans les mineures. Et voilà que, actuellement, il est en feu. Il n’hésite plus. Il dégaine son tir à la vitesse de l’éclair. Il se fait confiance.

Cela dit, la confiance a ses limites. Même si Michael Pezzetta se fait confiance, à l’extrême, il ne comptera pas 50 buts par saison. Mais il va fournir sa part. Et ce sera ça de pris.

Le point de presse est presque terminé. Un bon mot pour le gardien Jake Allen, avant de s’en aller :

« Y a pas grand-chose qui arrive par hasard dans la vie. À moins que tu prends le Lotto 6/49. Le reste, c’est tout le temps des décisions que tu prends. Jake mérite tout ce qu’il a, parce qu’il travaille fort. »

Un coach de vie, je vous dis.