Je vous ai demandé de me dire quels sont les enjeux qui vous tiennent à cœur dans l’actuelle campagne municipale à Montréal. Le moins que l’on puisse dire, c’est que vos préoccupations sont variées et touchent plusieurs sphères de la vie urbaine. 

Mais si je devais résumer cela en quelques mots, je dirais que vous souhaitez vivre dans une ville où l’on se préoccupe de l’environnement, où la beauté et la propreté règnent à chaque endroit et où l’on peut circuler facilement.

Le concept de fluidité est toutefois aléatoire.

Pour commencer, vous avez été nombreux à me dire que l’état de la ville se dégrade, que vous trouvez les rues et les trottoirs sales, que le mauvais entretien des parcs vous désole. Cela vous déprime.

« Tout est sale et crotté ! Ça pue partout et tout le temps. Et que dire des poubelles publiques mal entretenues ? », tient à dire Diane Saint-Pierre. « Allez marcher sur l’avenue du Parc, de Mont-Royal à Van Horne. J’ai tellement honte ! C’est d’une saleté incroyable », ajoute France Bourdon.

Comme je l’écrivais dans mon dossier de dimanche, la place de la voiture à Montréal est le sujet qui divise le plus les citoyens. En voici la preuve.

« Ma principale préoccupation est la fluidité des déplacements. Depuis quatre ans, c’est le chaos total, tant pour les usagers que pour les commerçants ! Personne ne surveille quoi que ce soit et la ville semble être livrée sur un plateau d’argent aux entrepreneurs qui font ce qu’ils veulent. On dirait un ‟open-bar” pour eux », écrit Jean-Daniel Arbour.

« Les rues sont impraticables. Il est devenu difficile de circuler en automobile », constate Daniel Proulx. « Des rues transversales, comme Saint-Zotique, sont devenues hostiles aux automobilistes », remarque Robert Matte.

À contrario, d’autres croient que l’on devrait imiter d’autres villes et repenser la place de la voiture dans nos rues.

« Je rêve qu’on fasse ce qui se fait à Paris en termes de réduction de la place de la voiture et de réattribution de l’espace aux piétons, cyclistes et transports collectifs », affirme Pierre Antoine Vaillancourt.

Et cela passe par un nouvel équilibre avec les autres modes de transport. « Je souhaite une plus grande sécurité lors de mes transports actifs (marche, vélo, etc.), demande Jean-François Roy. J’ai été sidéré d’entendre Denis Coderre proposer de déconstruire une portion du REV sur la rue Bellechasse. À mon avis, on doit mettre plus de dos d’âne, de bollards, de saillies de trottoir et de pistes cyclables pour la sécurité de tous. »

À lire vos témoignages, on se rend compte que les grands projets qui faisaient rêver les Montréalais dans les années 1960, 1970 et 1980 sont complètement révolus. Les préoccupations environnementales les ont solidement supplantés. Il est évident que, pour vous, l’avenir de la planète est aussi l’affaire des villes.

« L’enjeu numéro un de cette campagne est l’environnement, croit d’ailleurs Jacques Nacouzi, commerçant de la rue Saint-Denis. Les villes sont celles qui souffriront le plus de la catastrophe climatique. Il faut lutter contre les changements climatiques en diminuant drastiquement la place de l’auto en milieu urbain. »

Hugues Beauregard a une vision définie de ce qui devrait être fait. « Il faut augmenter les îlots de fraîcheur par l’aménagement de coins de verdure. Il faut réduire la présence de l’asphalte et du ciment et favoriser les toits verts et blancs. »

De son côté, Jean-Paul Dubreuil déplore le manque de leadership de la Ville en matière de compostage. « Les politiciens n’ont pas le courage d’imposer le compostage obligatoire. Cela serait pourtant une mesure écologique de juridiction municipale qui aurait un impact important sur l’environnement et sur l’économie ».

Sam pense que ces mesures vont au-delà de la protection de l’environnement. « Cela permet aussi une meilleure équité sociale entre les classes sociales. »

La question du logement abordable figure bien en haut de vos préoccupations. « Je suis une monoparentale qui habite un 3 ½ avec ma fille âgée de 23 ans qui est aux études. Elle ne peut pas se permettre de payer un loyer au prix que ça coûte », raconte Nassima Aknak.

« Le droit à un logement sain à un prix abordable et dans un environnement agréable est certainement un enjeu majeur pour les Montréalais, dit Geneviève Guay. Cela dit, comme le financement vient des paliers supérieurs, on aurait dû en faire un enjeu aussi au fédéral et on devrait y revenir aux élections provinciales. »

Émilie Brunet a emménagé dans le Sud-Ouest avec son conjoint et ses enfants. Avec le temps, elle a compris que son logement avait besoin d’amour. « L’enjeu principal qui me vient en tête est l’aide financière accordée aux propriétaires de bâtiments patrimoniaux et vieillissants. Des fois, je pense à l’ampleur des dépenses à venir pour requinquer notre propriété dans les prochaines années et l’envie me prend de partir pour une banlieue éloignée. »

Vesna Dell’Olio habite le quartier Saint-Michel depuis plus de 20 ans. Elle prône la présence et la survie des services de proximité. « Actuellement, il n’y a que de grandes surfaces très éloignées pour faire notre épicerie. J’aimerais qu’une administration municipale travaille à la revitalisation du quartier en encourageant des commerces, comme des fruiteries et des librairies, à venir s’installer dans notre quartier. Et surtout qu’on encourage ces commerces à le faire avec un souci architectural. Venez marcher sur Saint-Michel pour voir à quel point c’est laid ! »

Il est intéressant de voir que vos préoccupations sont intimement liées à la réalité de votre arrondissement ou de votre quartier, comme Mireille Leduc, qui vit à L’Île-Bizard. « Ce serait bon que les candidats se souviennent que, même perdus dans l’Ouest-de-l’Île, on existe. Ici, on a deux enjeux principaux : un pont vieillissant qui doit être remplacé et le transport en commun. Quand j’entends parler du REV, je me dis que c’est bien loin de ma réalité. »

Le sort du mont Royal a beaucoup occupé l’actualité des derniers jours. Cela vous a interpellé. « On doit se préoccuper du traitement qu’on est en train de faire subir à notre belle montagne, déplore Marie Beaulieu. En ce moment, on cloisonne tout le côté nord-ouest. C’est tellement triste et déprimant. »

En terminant, certains d’entre vous trouvent qu’on assiste actuellement à une surenchère de promesses. Et cela vous rend dubitatifs.

« Il y a une quantité astronomique d’annonces et de promesses, m’a écrit Nicolas Thibault. Trop, c’est comme pas assez. Il n’y a pas une semaine qui se passe sans un nombre important d’engagements et de promesses. Ce qui devient populaire a son engagement dans la minute qui suit. »

Ce lecteur a raison. À force de se faire bombarder de promesses, on en vient à ne plus savoir quelles sont les priorités. Et surtout à perdre de vue leur réalisation.