Les appels à la vigilance se multiplient au sujet du smog et de la qualité de l’air qui se dégrade dans plusieurs régions du Québec, en raison des incendies de forêt dans le nord de la province. Mais quels sont les risques exacts, et, surtout, pour qui ? À la maison, au travail, quels comportements faut-il adopter ?

Qualité de l’air « mauvaise »

Jugée bonne lundi matin, la qualité de l’air s’est rapidement dégradée depuis pour être considérée comme « mauvaise » sur la majeure partie de l’île de Montréal, soit un IQA (indice de qualité de l’air) dépassant les 50. Tant dans l’ouest qu’à l’est, au nord ou au centre-ville, cet indice surpassait mardi en fin de journée la barre de 70, avec un pic frisant le seuil de 100 au nord de l’île. Cet indice est calculé à partir de la concentration de cinq contaminants : l’ozone, le dioxyde de soufre, le dioxyde d’azote et le monoxyde de carbone, mais aussi les particules fines. Ces dernières sont particulièrement en hausse en cette période d'incendies

Prudence pour les plus vulnérables

« Tout le monde peut être affecté par la fumée des incendies, peu importe leur âge », note Marie-Claude Lacasse, porte-parole du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). « Les gens pourraient ressentir du larmoiement, des picotements des yeux et de la gorge, une toux légère, une irritation des sinus », illustre-t-elle. Mais la fumée des incendies de forêt « peut avoir un plus grand impact sur les personnes asthmatiques et celles souffrant de problèmes cardiaques ou respiratoires, comme l’emphysème et la bronchite chronique ». Ces personnes sont invitées à être très prudentes. Dans les régions plus touchées, on recommande d’éviter les activités extérieures et de fermer les fenêtres, voire de fermer son échangeur d’air.

Restez d’abord isolés, dit la Santé publique

Le DStéphane Perron, de l’Institut national de santé publique (INSPQ), affirme que le plus important – surtout pour les personnes à risque – « est de rester à l’intérieur ». « Pour la population en général, cela dit, ce n’est pas inquiétant pour la santé. Il faudrait que le niveau de particules monte pas mal plus pour qu’on dise aux parents d’arrêter de jouer avec leurs enfants dehors », soutient-il. Quant au port d’un masque N95, « ce n’est pas vraiment la solution en ce moment », ajoute M. Perron. « On veut surtout que les gens qui en ont besoin évitent de s’exposer, plutôt que de porter des équipements qui sont d’installation de qualité variable, et donc d’efficacité variable », dit-il.

« Incomplet », juge une intensiviste

Pour la Dre Amélie Boisclair, intensiviste, la position de la Santé publique est toutefois « incomplète ». « C’est correct de dire qu’on peut rester à l’intérieur lorsque possible, sauf que dans la vraie vie, il faut souvent sortir dehors. Ce n’est pas tout le monde qui peut rester chez soi non plus. Ils devraient le dire clairement : surtout si vous avez des problèmes de santé pulmonaire, avoir un N95 bien ajusté peut aider », indique la Dre Boisclair. Elle fait d’ailleurs un parallèle avec l’exposition au soleil. « Évidemment, la meilleure chose serait de rester chez soi, mais parce qu’on n’est pas Dracula, on met de la crème solaire. C’est un outil de protection, comme le N95, et il faut le dire. »

Des mesures à prendre en milieu de travail

La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) rappelle qu’il est essentiel de « diminuer l’exposition des travailleurs et des employeurs à cette fumée, pour éviter qu’ils soient incommodés ». Dans les bâtiments, elle recommande notamment de « mettre à l’arrêt les systèmes d’extraction et de ventilation en utilisant le mode de recirculation d’air lorsque c’est possible ». Autant que possible, tout travail exécuté à l’extérieur devrait aussi être repoussé. Si cela est inévitable, la Commission appelle pour sa part les entreprises à « privilégier l’exécution des tâches à l’intérieur d’une cabine filtrée et fermée ou, en dernier recours, porter une protection respiratoire de type N95 ».

Pourquoi le ciel est-il orangé ?

Non, vous ne rêvez pas : le ciel est orangé depuis lundi dans plusieurs secteurs de la province. Mais au-delà de dire que le phénomène est lié aux incendies, comment peut-on l’expliquer ? C’est que « les particules de la fumée dégagée dans l’air augmentent rapidement », rendant l’air plus pollué, observe le DPerron. « Le halo orangé qu’on voit est le résultat le plus visible, mais ce qui se passe à Montréal dépend de l’intensité des incendies et surtout des vents. Dès qu’il y a des changements à cet égard, ça change complètement la donne, puisque toutes ces particules voyagent moins », explique-t-il.