Le ministère du Patrimoine tente de recouvrer la somme de quelque 122 000 $ qui a été versée l’été dernier au Community Media Advocacy Centre (CMAC) dans le cadre d’une campagne visant à lutter contre le racisme dans la radiodiffusion.

Le financement à cet organisme a été retiré le 23 septembre après que des propos antisémites et francophobes publiés sur les réseaux sociaux par l’un de ses principaux consultants, Laith Marouf, eurent été portés à l’intention du gouvernement Trudeau deux mois plus tôt, soit le 18 juillet.

Devant le peu d’empressement de CMAC à donner suite à une demande de remboursement, le ministère a décidé de retenir les services d’une agence de recouvrement, a-t-on appris lundi lors du témoignage de la sous-ministre déléguée du ministère du Patrimoine, Mala Khanna, devant un comité parlementaire.

« Le gouvernement tente en ce moment d’obtenir un remboursement de cette somme et nous avons retenu les services d’une agence de recouvrement pour le moment. Mais nous regardons toutes les options qui s’offrent à nous », a indiqué Mme Khanna en évoquant une poursuite judiciaire.

En tout, CMAC avait obtenu un financement de 133 000 $ de la part du ministère du Patrimoine. Mais une somme de 11 000 $ avait été retenue par Ottawa au moment de l’octroi du financement.

Le ministère du Patrimoine s’est retrouvé dans l’embarras l’été dernier après que l’on a déterré une série de tweets antisémites et francophobes publiés par Laith Marouf au cours des dernières années.

Parmi ses nombreuses publications controversées, M. Marouf a notamment écrit que les « suprémacistes blancs juifs » devraient recevoir « une balle dans la tête » et que les « Frogs ont un quotient intellectuel de moins de 77 ».

Le ministre fédéral de la Diversité et de l’Inclusion, Ahmed Hussen, s’était montré indigné par les propos controversés de Laith Marouf, qui donne des conférences pour CMAC. Et il avait ensuite demandé à Patrimoine Canada d’examiner le financement accordé à cet organisme.

Durant la réunion du comité du patrimoine, lundi, les députés ont exprimé leur colère que le ministère du Patrimoine ait mis au moins deux mois avant de mettre fin au financement. Le député libéral Anthony Housefather s’est pour sa part dit outré qu’aucun fonctionnaire n’ait effectué les vérifications qui s’imposent avant d’accorder le financement.

« Est-ce qu’il y a quelqu’un qui a pensé à faire une simple recherche sur Google ? », a demandé M. Housefather, soulignant que les tweets de Laith Marouf étaient facilement accessibles.

« Nous nous en sommes tenus aux vérifications initiales qui touchaient CMAC », a indiqué la sous-ministre Mala Khanna. « Mais nous avons maintenant changé nos démarches pour faire plus de vérifications. Nous avons appris des leçons de ce triste épisode », a-t-elle ajouté.

M. Housefather s’est aussi insurgé du temps que le Ministère a mis pour annuler le financement. Il a souligné que les deux mois étaient inacceptables. Mme Khanna a expliqué que le ministère a d’abord suspendu le financement le 19 août et qu’il a été annulé le 23 septembre, soit 30 jours plus tard, comme le prévoient les ententes de financement. Mais depuis cette controverse, le ministre peut mettre fin immédiatement à une entente de financement si le receveur ne répond plus aux critères d’admissibilité.

« Ce retard à prendre une décision qui semble si évidente pour tout le monde, alors que vous avez sous les yeux des tweets, des déclarations qui sont absolument inacceptables, francophobes, antisémites, haineux au possible… Qui n’a pas mis ses culottes pour mettre un terme immédiatement à ce contrat ? », a laissé tomber le député du Bloc québécois Martin Champoux.

« Je suis d’accord avec vous, on aurait dû réagir beaucoup plus vite en pareille circonstance. Encore une fois, si ça devait arriver, nous agirions plus vite. On voulait s’assurer de faire les choses comme il le faut. On a revu le contrat », a répondu la sous-ministre, visiblement mal à l’aise.

Elle a précisé qu’aucun employé du Ministère n’avait fait l’objet de mesures disciplinaires en lien avec cette affaire.