(Ottawa) Le premier ministre Justin Trudeau souhaite que l’obtention d’un visa temporaire soit plus facile pour les demandeurs. Il veut que le système migratoire se préoccupe moins des risques qu’un visiteur reste au pays passé la date d’expiration de ce document.

« Soyons honnêtes, le système est encore fondé sur la capacité du demandeur à prouver qu’il ne restera pas au pays s’il vient ici. Il leur est plus facile de convaincre les autorités d’obtenir un visa s’il a un bon emploi, une maison et un bon statut chez lui », a-t-il dit.

Au cours d’une rencontre avec environ 25 étudiantes en sciences infirmières du collège Algonquin d’Ottawa, vendredi, certaines ont mentionné à M. Trudeau des problèmes concernant les visas.

Une étudiante a raconté comment elle s’était sentie seule et isolée lorsqu’elle a été hospitalisée pendant une période de sept mois au Canada. Sa mère a tenté deux fois d’obtenir un visa pour venir la visiter, mais chaque fois, sa demande a été rejetée.

M. Trudeau a répondu en disant qu’il était vital pour les Canadiens d’avoir foi en l’intégrité du système de l’immigration. Il a toutefois laissé entendre qu’il avait demandé au ministère de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté de changer sa mentalité défensive lorsque vient le temps d’accorder des visas.

« Il faut qu’on cesse de dire que les gens qui choisissent de rester sont de mauvaises gens, que ce n’est pas une bonne chose, a-t-il lancé. Notre ministre de l’Immigration, Sean Fraser, travaille fort à essayer de changer la manière dont on juge l’immigration et à s’assurer que des gens viennent s’installer ici. »

Le premier ministre a admis à l’étudiante que le ministère avait erré en refusant d’accorder un visa à sa mère.

« Pour les Canadiens, cela paraîtrait comme une injustice s’il existait une manière détournée d’obtenir un visa. Il faut trouver un équilibre. Mais je vous comprends. Votre mère aurait dû avoir le droit de venir vous voir. »

M. Trudeau a rappelé que de nombreuses personnes demandent de venir s’installer au Canada à cause des nombreuses crises qu’ils traversent chez elles.

Il reconnaît que le gouvernement fédéral doit veiller à aider les immigrants à prospérer au Canada, sinon les Canadiens pourraient commencer à avoir du ressentiment contre l’immigration.

« Un parti anti-immigrant éprouverait des difficultés à réussir au Canada parce que de nombreux Canadiens comprennent l’importance de l’immigration. Nous devons protéger le fait que les Canadiens appuient l’immigration. »

Par exemple, M. Trudeau a dit qu’il fait que le parc immobilier soit suffisant pour accueillir les nouvelles familles. Il a laissé entendre que l’immigration pourrait contribuer à régler ce problème.

« Il y a un manque de main-d’œuvre dans le secteur de la construction. Si nous attirons plus de gens pouvant construire des maisons, on va régler le manque de logements. Il existe des solutions. L’une d’entre elles consiste à accélérer le traitement des demandes en utilisant proprement des moyens numériques et des ordinateurs. »

Des conférences perturbées

La lenteur et le refus du ministère de l’Immigration à accorder des visas exaspèrent de nombreux intervenants, même à l’échelle mondiale.

Des tables rondes entières prévues le mois prochain à Montréal sont en suspens, car dans plusieurs cas, six participants à une activité n’ont pas encore obtenu leur visa pour entrer au Canada.

L’International Studies Association tiendra son congrès annuel à Montréal à la mi-mars. Son directeur, Mark Boyer, admet que ces problèmes de visas sont « extrêmement frustrants » et difficiles à gérer pour les organisateurs.

Selon la directrice des activités à l’International Studies Association, Jennifer Fontanella, environ 600 des 6000 universitaires invités pour l’évènement à Montréal ont des problèmes de visa, dont 80 ont essuyé un refus ; des centaines d’autres attendent une décision et au moins une centaine se sont désistés de la rencontre internationale.

En septembre dernier, de nombreux délégués avaient signalé des problèmes similaires lorsqu’ils ont tenté d’assister à Montréal à la conférence de l’« American Political Science Association ». Et en décembre, des centaines de délégués de pays en développement ont raté la conférence COP15 à Montréal en raison de problèmes de visas qui découlaient en partie de l’émission tardive d’accréditations par les Nations unies.

L’été dernier, le ministère canadien de l’Immigration a provoqué un tollé en refusant des visas à plusieurs délégués africains qui voulaient participer à la Conférence internationale sur le sida, également tenue à Montréal – certains participants ont parlé ouvertement de racisme.

Les données du ministère mises à jour mardi montrent que le traitement moyen des demandes de visa pour les personnes basées en Grande-Bretagne prend 217 jours, et 212 jours pour les personnes en France. Les citoyens de ces pays n’ont pas besoin de visa de visiteur pour venir au Canada, mais les universitaires de nombreux pays en développement qui sont établis à Paris ou à Londres ont besoin d’un visa pour assister à une conférence à Montréal.

« Le ministère de l’Immigration collabore avec les organisateurs d’évènements internationaux se déroulant au Canada pour coordonner le traitement des demandes de visa temporaire pour les délégués et participants », a affirmé un porte-parole du ministère, Jeffrey MacDonald, dans un courriel.

Selon lui, plusieurs éléments peuvent influencer la rapidité avec laquelle un dossier est traité comme l’exactitude des renseignements demandés ou les ressources et le personnel mis à la disposition du ministère.