Des employés de centres jeunesse à travers le Québec tapent du pied : bon nombre d’entre eux n’ont toujours pas reçu les primes salariales dues en avril dernier qu’on leur avait pourtant promises lors de la signature de la plus récente convention collective. Le gouvernement, lui, assure procéder « dans les meilleurs délais ».

« Nos patrons se lancent la balle indéfiniment. Le ministère [de la Santé et des Services sociaux] nous dit que les CISSS et CIUSSS ont les codes pour verser les primes manuellement, mais eux disent qu’ils attendent une mise à jour du système gouvernemental pour le faire, car manuellement, ce serait trop complexe », dénonce la représentante nationale de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) pour la région de Laval, Natacha Pelchat.

La convention collective de centaines de travailleurs en centres jeunesse prévoyait qu’au 1er avril dernier, des primes de 4 % et 7 % devaient être versées aux employés, en fonction de leur statut.

À ce jour, sept régions n’ont toutefois jamais vu la couleur de cet argent : le sud et l’ouest de Montréal, Laval, Lanaudière, l’Estrie, le Saguenay–Lac-Saint-Jean et l’Abitibi-Témiscamingue. Selon nos informations, près de 5000 personnes pourraient être touchées par ces retards.

« Ça affecte tous nos membres qui travaillent à la DPJ, mais aussi les centres jeunesse, les éducateurs. Ils ne se sentent pas respectés, pas reconnus. Et quand on sait qu’il y a déjà une pénurie de personnel, cette prime est une mesure d’attraction importante. On ne peut plus attendre », fustige Julie Houle, de l’APTS au CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal.

« Notre monde est désabusé »

Pour les deux représentantes syndicales, c’est une question de respect. « Ça devrait être une priorité, ces primes. On nous répète sans cesse vouloir être un employeur de choix, alors qu’ils le démontrent. Notre monde est désabusé : ils sont tannés, sont brûlés, sont fatigués. On leur demande du temps supplémentaire, mais on ne les reconnaît pas à leur juste valeur », insiste Mme Houle.

PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, LA PRESSE

Natacha Pelchat, représentante nationale de l’APTS pour la région de Laval

On parle de plus de 3000 $ non remboursés, dans certains cas. Ce sont des montants considérables, surtout à un moment où l’inflation est élevée et où le coût de la vie augmente rapidement.

Natacha Pelchat, représentante nationale de l’APTS pour la région de Laval

Si rien n’est fait d’ici la rentrée, des démarches juridiques pourraient devoir être entamées devant le Tribunal administratif du travail (TAT), prévient par ailleurs sa collègue de l’exécutif du Centre-Sud. « Ce sont des choses qu’on envisage un peu partout, et il y a déjà des choses qui ont été faites pour d’autres primes qui tardent à rentrer. On va continuer à se battre, c’est certain. C’est inacceptable de traiter les gens qui travaillent avec nos jeunes, qui n’ont déjà pas des conditions faciles, de cette façon-là », soupire-t-elle.

« Ces primes, elles sont dans un contrat de travail qui a été signé. Ce n’est pas une promesse qui peut ne pas être tenue », insiste Mme Pelchat.

Québec jure être en action

Appelé à réagir, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) – responsable du versement de ces primes – a indiqué à La Presse que « les travaux en lien avec le versement des sommes dues en vertu des nouvelles mesures introduites dans les conventions collectives se poursuivent afin de finaliser le tout dans les plus brefs délais ».

« Les équipes de rémunération, tout comme les fournisseurs des systèmes de paie, ont travaillé d’arrache-pied depuis l’hiver afin d’assurer le versement des sommes dues aux employés du réseau », affirme la porte-parole du Ministère, Marjorie Larouche.

Les primes accordées dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire et l’application des nouvelles conventions collectives ont entraîné une charge de travail importante pour les équipes.

Marjorie Larouche, porte-parole du ministère de la Santé et des Services sociaux

Mme Larouche signale également que le Ministère « a respecté son engagement de verser les sommes en vertu de l’équité salariale en date du 16 juin dernier ».

Au total, pour l’ensemble du Québec, les DPJ ont traité 132 632 signalements au cours de l’année 2021-2022, comparativement à 117 904 l’an dernier, une hausse de 12,5 %. Il s’agit d’une moyenne de 363 situations d’enfant signalées par jour au Québec.

Dans la métropole, la DPJ de Montréal (services aux enfants francophones) a reçu 12 967 signalements, soit une hausse de 8,22 % par rapport à l’an dernier. Batshaw (services aux enfants anglophones dans la métropole) a reçu 4645 signalements, soit une augmentation de 16,39 %. En Montérégie, le nombre de signalements traités a aussi augmenté. On parle d’une hausse de 3000 signalements comparativement à l’exercice 2020-2021, pour un total de 20 837 cette année. On note aussi une baisse des signalements retenus (415 de moins que l’an dernier).