L'accusation d'un enseignant pour crimes sexuels bouleverse toute la communauté de l'école Adélard-Desrosiers

Parents, élèves et autres intervenants de l’école Adélard-Desrosiers sont sous le choc, après le dépôt d’une vingtaine d’accusations contre un enseignant de 27 ans pour divers crimes de nature sexuelle. Car pour plusieurs d’entre eux, Dominic Blanchette était connu pour sa proximité avec les jeunes filles.

« Au fil du temps, il s’est rapproché de plus en plus des filles. Il assistait souvent à leurs activités parascolaires. Il leur donnait plus de permissions. Il faisait même des photos et des vidéos avec elles. C’était constant », raconte un élève ayant eu M. Blanchette comme professeur en sixième année. « Parfois, dans les équipes sportives, il faisait en sorte que des filles s’assoient sur lui pendant les pauses », poursuit-il.

Mardi, La Presse révélait que quatre personnes de plus s’étaient manifestées dans le dossier de Dominic Blanchette, cet enseignant de l’école primaire Adélard-Desrosiers, à Montréal-Nord, déjà accusé d’agression sexuelle sur une enfant de 11 ans. Au total, le professeur fait maintenant face à plus de 20 chefs d’accusation, dont plusieurs d’agression sexuelle.

Depuis l’établissement de détention de Rivière-des-Prairies, Blanchette a comparu mercredi pour fixer la date de son enquête sur remise en liberté, étape préliminaire à son procès. Un retour devant la Cour est prévu le 21 juillet. À ce moment, M. Blanchette pourrait être appelé à témoigner.

PHOTO FOURNIE PAR LE SPVM

Dominic Blanchette

« On s’objecte fermement à sa remise en liberté, pour la sécurité du public et des victimes, mais également pour ne pas miner la confiance du public envers l’administration de la justice », a déclaré à La Presse MAnnabelle Sheppard, procureure de la Couronne.

Un milieu « bouleversé »

« J’ai quatre enfants, dont trois qui ont fréquenté l’école. Mes enfants sont sous le choc, ma fille a beaucoup pleuré. Ça a été très dur pour eux et pour moi ces dernières semaines », confie une mère de famille sous le couvert de l’anonymat, puisque certains de ses enfants fréquentent toujours l’école Adélard-Desrosiers.

Un professeur de l’école Adélard-Desrosiers affirme pour sa part que le personnel enseignant est « bouleversé » par la situation. D’autres intervenants ayant gravité autour de Dominic Blanchette sont aussi ébranlés.

Il faisait constamment des câlins, il était très affectueux avec les jeunes, parfois trop. La ligne était mince souvent, disons.

Un professeur d'une autre école, qui a côtoyé l’accusé à quelques reprises

« On sentait qu’il se dévouait à ses jeunes. Et il était très impliqué dans la communauté. Il vendait d’ailleurs des contenus pédagogiques à la tonne sur Mieux Enseigner, un site de création de contenus. Plusieurs profs ont d’ailleurs participé à une campagne de désabonnement à sa page dans les dernières semaines », note un professeur d'une autre école, qui a côtoyé l’accusé à quelques reprises.

Une ex-employée de la bibliothèque située tout près de l’école Adélard-Desrosiers témoigne aussi de comportements déplacés observés dans l’exercice de ses fonctions, et s’inquiète surtout pour les jeunes de l’école, déjà « très vulnérables et issus de familles défavorisées ».

C’était le genre à faire des nasty jokes, à faire des commentaires un peu déplacés en général.

Une ex-employée de la bibliothèque située tout près de l’école Adélard-Desrosiers

Selon la classification des écoles primaires en fonction de leur indice de défavorisation publiée en février 2021 par le Comité de gestion de la taxe scolaire de l’île de Montréal, l’école Adélard-Desrosiers arrivait au rang des écoles les plus défavorisées dans la métropole.

La protection des élèves en priorité

Dans une lettre envoyée aux parents mercredi, en réaction aux révélations de La Presse, la directrice de l’école Adélard-Desrosiers, Lucie Aylwin, dit comprendre que les parents puissent être choqués et inquiets. « Soyez assurés que le bien-être et la sécurité de nos élèves sont toujours notre priorité et que nous mettons tout en œuvre pour les réconforter et les accompagner », écrit-elle, précisant toutefois avoir « l’obligation légale de ne révéler aucune information qui pourrait permettre » d’identifier les victimes.

Au centre de services scolaire de la Pointe-de-l’Île (CSSPI), la porte-parole, Valérie Biron, affirme qu’une équipe d’intervention a été mobilisée pour les élèves et le personnel. Tous les parents des élèves de la classe de M. Blanchette ont aussi été contactés personnellement par téléphone. Le CSSPI dit aussi avoir recommandé aux parents d’« être attentifs aux réactions de leur enfant, de communiquer avec l’école s’ils avaient des inquiétudes et de faire appel aux professionnels au besoin ».

Une enquête est toujours en cours dans le dossier de Dominic Blanchette.

Ces dernières semaines, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) avait indiqué que M. Blanchette « aurait occupé des emplois dans plus d’un établissement scolaire » et disait chercher d’autres « victimes potentielles ».

La critique libérale en éducation, Marwah Rizqy, réclame une enquête du ministère de l’Éducation sur le cas de Dominic Blanchette. Elle dit se demander « comment cet enseignant a pu tisser sa toile » et « s’il y a des gens qui savaient et qui ont décidé de faire l’autruche » au sein de l’école.

De son côté, le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, rappelle que le brevet d’enseignement de Dominic Blanchette a été révoqué ces dernières semaines, ce qui l’empêche de pratiquer son métier à nouveau. « Ces comportements sont inadmissibles », a-t-il indiqué mardi.