(Montréal) Des centaines de personnes se sont rassemblées dimanche devant le palais de justice de Montréal pour exprimer leur colère face à l’annulation du jugement Roe c. Wade garantissant le droit à l’avortement.

« J’étais enragée. C’est un droit qui ne devrait pas être contesté. C’est affolant de voir que l’on revient en arrière et que l’on met en danger les mêmes personnes », s’est exclamée Naomi Jouan, qui était présente à la manifestation de Montréal. « On pensait que c’était un droit acquis. Si ça arrive aux États-Unis, ça pourrait arriver au Canada », a renchéri son amie Julie-Anne Beaulac.

La Fédération du Québec pour le planning des naissances (FQPN) a organisé la manifestation de dimanche avec d’autres partenaires. Leurs objectifs sont de montrer leur appui envers les femmes des États-Unis et de dénoncer la montée du mouvement antiavortement au Québec.

Sous une chaleur accablante, des dizaines de personnes brandissaient des pancartes avec des inscriptions telles que « Mon utérus, mon choix » ou « En colère et solidaires ». Sandra Cordero tenait un cintre sur lequel était inscrit « loin de l’utérus, près du placard », en référence à cet objet souvent utilisé pour mettre fin à une grossesse lorsque l’avortement est interdit.

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Sandra Cordero

« Le cintre, c’est pour serrer du linge, pas pour être inséré dans l’utérus », a-t-elle dit, déplorant que les avortements pratiqués avec un objet non adapté puissent entraîner de nombreuses complications.

De la fiction

« Je suis en crisse. Pour nos voisins du Sud, c’est un gros retour en arrière. C’est dur, avoir des enfants. J’en ai trois, je les ai choisis et je les adore. Mais je ne peux pas m’imaginer la vie de quelqu’un à qui ce serait imposé », a affirmé Geneviève Comtois, vêtue d’une tunique rouge et d’un bonnet blanc inspirés de la série américaine La servante écarlate, qui décrit un futur proche où les femmes ont perdu leurs libertés.

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Manifestation devant le palais de justice de Montréal

Ce costume s’est imposé comme un symbole de protestation des femmes dans le monde entier. « C’est pour montrer aux gens que peut-être que ce ne sera plus de la fiction », a laissé tomber Mme Comtois, ajoutant que le Canada n’est pas à l’abri d’un tel revirement de situation. « Ici aussi, il y en a des gens qui sont antiavortement », dit-elle.

Julie Carbonneau secondait.

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Julie Carbonneau

J’ai tellement peur que ça ait un impact ici, on est juste à côté. C’est important de ne pas faire comme si on était invincibles. Ça peut nous arriver.

Julie Carbonneau

Steph Couture-Vanasse souhaitait venir manifester son mécontentement. « Quand j’ai appris que la décision Roe c. Wade avait été invalidée, j’étais vraiment choqué. C’est un gros recul pour le droit des femmes », a dit l’étudiant en droit. « Ma mère a eu recours à l’avortement. Pour moi, c’est important que les femmes puissent disposer de leur corps », a-t-il ajouté.

Ouvrir l’œil

La députée de Québec solidaire Manon Massé était sur place près du palais de justice de Montréal pour montrer son appui au mouvement pro-choix.

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Manon Massé, députée de Québec solidaire

Ces dictateurs de nos corps doivent comprendre qu’ils n’ont absolument aucune légitimité pour faire cela. Cette bataille aux États-Unis est un pas de recul, et il faut veiller, il faut être là et ouvrir l’œil, parce que le droit des femmes, c’est toujours fragile.

Manon Massé, députée de Québec solidaire

La députée était ravie de voir la mobilisation de femmes et des diversités de genre, mais elle a aussi souligné qu’il est important que les hommes soient à leurs côtés pour affirmer qu’ils reconnaissent ce droit.

Mme Massé souhaite envoyer un message solidaire aux personnes lésées par la situation aux États-Unis. « On doit tendre la main à nos sœurs américaines et leur dire : vous êtes la bienvenue au Québec. On veut qu’elles entendent notre solidarité », souligne la politicienne.

Elle estime que les droits des femmes et des minorités sont constamment en danger. « Avec Roe c. Wade, ce n’est pas juste le droit des femmes qui va manger la claque, c’est aussi le droit des minorités sexuelles, c’est aussi le droit à la contraception. Je ne dirais pas qu’on est menacés, mais le danger est toujours sous-jacent », a affirmé Manon Massé.

Avec La Presse Canadienne