Les producteurs de sirop d’érable du Québec craignent pour l’avenir de leurs productions. Ils demandent que le gouvernement révise son plan pour assurer la protection des érablières en terres publiques.

Toujours sur la table à dessin, ce plan prévoit entre autres la protection de 24 000 hectares à potentiel acéricole. « Ça nous semble insuffisant quand on a une vision du développement à long terme », indique le président des Producteurs et productrices acéricoles du Québec (PPAQ), Luc Goulet, en entrevue avec La Presse.

D’après l’association, si Québec décide de maintenir sa cible, il fera le choix de sacrifier les érables qu’on perdra aux mains de l’industrie forestière. Car sur ces terres publiques, l’industrie forestière et l’acériculture convoitent toutes deux les érables. L’une pour son bois, l’autre pour sa sève.

Le souhait des producteurs de sirop d’érable est tout autre. Sur les 400 000 hectares de forêts publiques à potentiel acéricole qu’ils croient disponibles, ils veulent que 200 000 soient réservés pour « des activités durables comme l’acériculture, afin d’assurer son futur pour les 50 prochaines années au moins ».

Du côté du gouvernement, on affirme être ouvert à d’autres possibilités. Le seuil établi à 24 000 hectares pourrait être appelé à changer, nous indique Fanny Lindsay-Fortin, au nom du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs.

« Notre position, c’est d’avoir une banque dynamique [d’hectares exploitables], dit-elle. Ce qu’on veut, c’est d’être toujours en mesure d’offrir des superficies aux producteurs agricoles, lorsqu’il y a une augmentation des demandes de permis d’exploitation. »

Les 24 000 hectares seraient donc disponibles à court terme pour des demandes.

Une ressource convoitée

D’après Luc Goulet, des PPAQ, la cohabitation des industries doit être au cœur des solutions, puisque dans certaines régions, la moitié des productions de sirop d’érable exploitent des arbres sur les terres publiques. Il souligne entre autres le rôle que peuvent jouer les acériculteurs dans l’industrie forestière.

Par exemple, il existe des méthodes d’aménagement qui permettent de conserver le potentiel acéricole tout en coupant certains arbres. Les coupes sont pensées pour répondre aux besoins des érablières, tout en assurant la formation d’une colonie d’érables qui se régénère. Le bois coupé peut ensuite être acheminé aux industries forestières.

Discussions en cours

Le Ministère veut également hausser la norme actuelle qui sert à définir quels érables peuvent être entaillés. Ainsi, un acériculteur ne pourrait pas récolter la sève d’un arbre ayant un certain diamètre. Cette mesure serait établie dans l’objectif des pratiques plus durables de permettre aux arbres de mieux se régénérer d’année en année, défend Fanny Lindsay-Fortin.

Cette nouvelle norme n’est pas bien reçue chez les producteurs, qui évaluent à 1,8 million le nombre d’entailles qu’ils risquent de perdre. « Pour nous, ça a un impact quand même majeur du côté financier, souligne Luc Goulet. Demain matin, des entreprises vont perdre 25 % de leurs revenus parce que 25 % de leurs entailles ne respectent pas la nouvelle norme. »

Les PPAQ discutent avec le Ministère dans le but de trouver des solutions qui seraient à la fois rentables et durables. Ils affirment connaître des méthodes qui permettent d’atténuer les effets négatifs de l’entaillage des petits arbres.

« Mais comme on voit dans les rapports, il y a beaucoup d’inconnues, et peu d’études ont été faites sur les répercussions à long terme des méthodes de prélèvement de la sève, souligne Luc Goulet. C’est pourquoi on en discute avec le Ministère. »

« On veut faire une place aux acériculteurs, on veut bien le faire et on veut le faire en partenariat avec les autres utilisateurs du territoire », assure Fanny Lindsay-Fortin.