La saison dernière, le Canadien de Montréal a confié son contrat de traiteur à un restaurant ayant accueilli à répétition des membres du crime organisé en violation des règles sanitaires en 2020 et en 2021.

En juin 2021, le Prima Luna de Rivière-des-Prairies a reçu son avis de convocation de la Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ). L’audition du dossier du restaurant par la RACJ n’est pas terminée, comme l’a rapporté La Presse mardi. Motifs : violation des règles sanitaires, présence de Hells Angels et de mafieux entre ses murs et saisie d’un revolver dans une pièce en mai 2021.

Quelques mois plus tard, le Prima Luna préparait la nourriture pour Carey Price, Cole Caufield, Nick Suzuki et les autres employés des Glorieux au centre d’entraînement de Brossard.

Selon le porte-parole du Canadien, le restaurant a nourri l’équipe « pendant quelques mois la saison dernière ». Sur quelle période exactement ? « Ce n’est pas une information qu’on va divulguer », répond simplement Charles Saindon-Courtois, porte-parole du Canadien.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE INSTAGRAM DU PRIMA LUNA

Le propriétaire du Prima Luna, Andrea Dell’Orefice, au golf de Kahnawake avec l’ancien directeur général du Canadien Marc Bergevin et le vice-président aux opérations hockey et affaires juridiques John Sedgwick, en septembre 2021

Dans la preuve déposée devant la Régie, les policiers relèvent six rassemblements au Prima Luna entre décembre 2020 et mai 2021, malgré l’interdiction de recevoir le public à cause des règles sanitaires.

Chaque fois, ils y ont repéré des criminels notoires – parfois plusieurs d’entre eux –, dont les Hells Angels Martin Robert et Stéphane Plouffe, ainsi que les mafieux Francesco Del Balso, Marco Pizzi et leur « patron de la rue », Davide Barberio.

Arme cachée à l’intérieur

Lors de la dernière intervention inscrite au dossier, le 29 mai 2021, les agents du groupe Éclipse ont arrêté Michel Lamontagne, une recrue des Hells Angels. Les policiers venaient de trouver un revolver de calibre 38 caché dans une pièce de débarras dont il sortait.

Le ministère public l’a d’abord accusé de possession d’arme, mais il a bénéficié d’un arrêt du processus judiciaire.

Parmi les convives présents ce soir-là pour fêter l’anniversaire de Lamontagne, 13 traînent un lourd passé criminel. Des Hells Angels, des membres de la mafia, mais aussi Annie Arbic, fille de la narcotrafiquante Sharon Simon, la « reine de Kanesatake » et femme du Hells Martin Robert.

À la fin de leur intervention, les agents avaient remis 70 constats d’infraction aux règles sanitaires, dont quatre au propriétaire, Andrea Dell’Orefice.

Selon les policiers, le patron « contrevient sciemment aux décrets en santé publique ».

Ils disent avoir constaté en mars 2021 un système pour dissimuler l’exploitation du restaurant malgré l’interdiction en vigueur : utilisation du stationnement et de la porte arrière, rideaux fermés…

Lors de l’intervention de mai 2021, les lumières étaient éteintes quand les policiers se sont rendus dans la salle de réception, même si 35 personnes s’y trouvaient.

Les agents ont ensuite vu des convives partir sans payer sans qu’Andrea Dell’Orefice n’intervienne.

« Les agents n’ont pas vu les clients régler des factures de leurs repas », indique la police, qui se dit « perplexe quant à la facturation et à la perception des taxes ».

Contrat terminé, dit le Canadien

Le club de hockey dit comprendre les « allégations graves » au sujet de son ancien fournisseur, mais assure que sa relation d’affaires avec le Prima Luna est terminée.

« On n’était pas au courant qu’ils étaient dans cette situation », dit Charles Saindon-Courtois, porte-parole du Canadien.

Il affirme que l’organisation a déjà « rapatrié à l’interne » les services de traiteur pour son personnel. « On n’est plus à contrat avec eux. »

Il a refusé de dire combien le Canadien a payé en factures au Prima Luna la saison dernière.

Contacté par La Presse, le propriétaire du Prima Luna a refusé de répondre à nos questions sur ses violations alléguées des règles sanitaires et la présence répétée de membres du crime organisé dans son restaurant.

« Ils vont au Costco aussi, ils vont au Centre Bell », dit Andrea Dell’Orefice, en parlant des caïds qu’il a accueillis malgré les restrictions liées à la COVID-19.

Il assure qu’il n’a rien à avoir avec eux. « Je n’ai rien à faire avec ce qu’il y a dans le journal. »

Avec la collaboration de Daniel Renaud, La Presse