En plus de pouvoir bientôt consommer du poulet abattu directement à la ferme, les Québécois auront accès à plus d’œufs issus de petits élevages et à des aliments à base de lait cru de chèvre, de brebis et de bufflonne. C’est dans une perspective de diversification et d’actualisation de l’offre agricole du Québec que le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ), André Lamontagne, annonce ces actions bien concrètes.

On ne verra pas 50 000 poules pondeuses de plus en production du jour au lendemain, dans une multitude de fermes à petite échelle, mais c’est la possibilité qu’offre cette ouverture du MAPAQ et de la Fédération des producteurs d’œufs du Québec (FPOQ).

Jusqu’ici, les artisans éleveurs n’avaient droit qu’à 99 pondeuses à l’extérieur du système de gestion de l’offre. Le Programme d’aide au démarrage de producteurs d’œufs de la FPOQ, qui existe depuis 2018, permettait d’attribuer annuellement un maximum de cinq droits d’utilisation d’au plus 500 pondeuses. Dès le prochain appel de projets, qui devrait avoir lieu vers la fin de l’automne 2022, ce droit d’utilisation sera étendu à tous ceux et celles qui en feront la demande. Le MAPAQ et la FPOQ projettent à moyen terme une centaine de candidatures potentielles, de là le chiffre de 50 000 poules pondeuses de plus en marge du système industriel.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Les fermes artisanales pourront commercialiser des produits cuits à base de lait cru de chèvre, de brebis et de bufflonne, dans le cadre d’un projet-pilote.

Les producteurs devront respecter les normes de production du cahier des charges pour la production d’œufs de consommation à petite échelle développé par un groupe de travail composé de producteurs, de vétérinaires et d’agronomes, entre autres, coordonnés par le Centre de référence en agriculture et agroalimentaire du Québec.

Le programme bonifié prévoit de nombreux services d’accompagnement pour les petits artisans, nous assure Jean Bernard Marchand, directeur de cabinet adjoint du ministre Lamontagne. Il y aura entre autres suivi à la ferme et dépistage de la bactérie Salmonella enteritidis, marketing, communication, recherche, aide à la mise en marché, ainsi qu’un programme de produit industriel pour gérer les surplus, au besoin.

Lait cru, mais cuit !

Pour un artisan fermier comme Dominic Lamontagne, c’est l’autre action du MAPAQ qui est une grande source de réjouissance, soit le projet-pilote permettant aux petits éleveurs de commercialiser des produits cuits faits à base de lait cru de leurs chèvres, brebis ou bufflonnes. Il faudra bien entendu être titulaire d’un permis de préparation générale d’aliments délivré par le Ministère.

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Dominic Lamontagne amène ses chèvres au ruisseau.

« Par exemple, ici, on va pouvoir aller traire la chèvre le matin et utiliser son lait pour préparer des pâtisseries, comme des cannelés ou encore des crèmes caramel, qui seraient servis chez nous le soir même dans le cadre d’une table champêtre ou le lendemain dans un marché public. Avec la possibilité d’abattre son propre poulet à la ferme, c’est l’aboutissement d’au moins 10 années de militantisme acharné pour ma conjointe Amélie et moi », déclare l’auteur des livres La ferme impossible et L’artisan fermier.

Certes, le lait de vache demeure intouchable, « propriété » exclusive de la Fédération des producteurs de lait du Québec. Il est impossible de vendre du lait de vache sans détenir de coûteux quotas (environ 25 000 $ par vache).

L’intérêt des récentes nouvelles mesures et des projets-pilotes ne paraît peut-être pas évident au premier abord. « Le MAPAQ ouvre une porte à quelque chose qui n’existe pas, explique Dominic Lamontagne. C’est la possibilité pour une famille de démarrer une petite ferme et de gagner sa vie convenablement. Les maraîchers existants aussi pourraient ajouter œufs, volaille, produits cuits à base de lait cru à leur offre pour avoir une vraie plus-value et sans un investissement de 1 million de dollars pour monter un abattoir de proximité et une usine laitière ! »

« En [nous] adaptant aux besoins et aux attentes des consommateurs qui souhaitent avoir accès à davantage de produits locaux et régionaux, nous faisons un pas de plus vers une autonomie alimentaire qui favorise l’innovation de nos entrepreneurs et la vitalité de nos régions », déclare pour sa part le ministre Lamontagne, dans un communiqué.

Rappelons que les exploitants souhaitant participer au projet-pilote d’abattage de poulets à la ferme ont jusqu’au 30 juin pour soumettre leur candidature pour la première année. Les exploitants qui souhaitent participer au projet-pilote autour du lait cru ont jusqu’au 29 juillet 2022 pour soumettre leur dossier.