Pour dénoncer l’expulsion du Centre Eaton d’une mère qui allaitait son bébé en public, une centaine de femmes se sont réunies dans le centre commercial du centre-ville de Montréal pour nourrir leur enfant à leur tour.

« On pensait être six ou sept personnes, mais finalement, on est beaucoup plus ! Je ne peux pas croire qu’en 2022, c’est encore un tabou ou un débat d’allaiter en public », tonne Gabrielle Charest, l’une des organisatrices de l’évènement tenu dimanche après-midi.

Les salles d’allaitement ne sont pas toujours accessibles rapidement. Les femmes qui ne les utilisent pas, par choix ou faute d’autres options, ne devraient pas être chassées de l’espace public, pense-t-elle. « C’est juste un bébé qui a faim », résume la maman en allaitant son poupon.

Assise sur un banc devant un magasin du Centre Eaton, Isabelle Côté donnait le sein à son bébé de 4 mois, le 19 mars dernier. À sa grande surprise, une agente de sécurité de l’établissement lui a demandé de quitter les lieux. On lui a suggéré d’utiliser la salle d’allaitement prévue à cet effet.

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Isabelle Côté et son fils

« Je me sentais comme une voleuse. Je me sentais humiliée. Ça me dépasse que ça me soit arrivé », avait dit la maman en entrevue avec La Presse au sujet de sa mésaventure. Elle a d’ailleurs décidé de déposer une plainte à la Commission des droits de la personne à la suite de l’incident.

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La directrice du Centre Eaton, Melyssa Houle, a indiqué que l’incident de samedi dernier était un cas isolé. « Le Centre Eaton de Montréal encourage l’allaitement maternel dans toutes ses aires communes, tel que prescrit par la Charte des droits et libertés québécoise et canadienne », a-t-elle écrit dans un courriel.

Marie-Ève Héroux n’a jamais été apostrophée par un individu mécontent alors qu’elle allaitait son petit Elliot. Mais la nouvelle mère se sent parfois dévisagée, alors que l’acte lui semble tout à fait naturel. « C’est pourquoi j’étais outrée. Ça m’a beaucoup touchée. Si ton enfant mange une collation, vas-tu le cacher ? », demande-t-elle.

Sa mère, Isabelle Héroux, est du même avis. « À mon époque, c’était encore gênant, les gens ne comprenaient pas. Des années plus tard, je ne veux pas que ma fille ait à se cacher. »

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Les salles d’allaitement ne sont pas toujours accessibles rapidement. Les femmes qui ne les utilisent pas n’ont souvent pas d’autres options.

Gabrielle Meloche, des affaires publiques chez Ivanhoé Cambridge, décrit l’évènement de samedi dernier comme un fâcheux incident. « Ce n’est même pas un débat qui a lieu d’être. Les femmes ont le droit d’allaiter où elles veulent. C’est vraiment une erreur de la part de l’agente de sécurité. »

L’évènement s’est tenu non pas pour la défendre, mais pour normaliser l’allaitement, insiste pour sa part Isabelle Côté. « Ce que j’ai compris cette semaine, c’est que ce n’est pas un cas isolé. Des dizaines de mères ont vécu la même chose. Allaiter, c’est difficile. On doit se sentir fière et à l’aise de le faire. »