Parce qu’ils estiment que « le logement n’est pas une business comme une autre », 500 organisations communautaires et groupes sociaux demandent au gouvernement québécois d’adopter une politique d’habitation basée sur le droit au logement.

« On traite le logement comme une simple marchandise et les locataires comme des pions actuellement, alors il faut recadrer le débat sur le droit au logement », a lancé Véronique Laflamme, porte-parole du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), mardi au cours d’une conférence de presse, en compagnie d’autres représentants de groupes militants.

Partout au Québec, près de 500 ménages se sont retrouvés sans logement le 1er juillet 2021. D’autres doivent se contenter de logements insalubres ou trop petits pour leurs besoins, et de plus en plus de locataires doivent choisir entre se nourrir et payer le loyer, en raison de la hausse des coûts du logement, déplorent-ils. Sans compter la hausse constante du nombre de personnes itinérantes.

Le logement est la plus grosse dépense de tous les ménages, rappelle Virginie Larivière, porte-parole du Collectif pour un Québec sans pauvreté.

Le coût du logement est un véritable cauchemar pour les ménages en situation de pauvreté qui doivent se résoudre à couper dans d’autres besoins essentiels, en particulier la nourriture, pour arriver à payer leur loyer et éviter de se faire évincer pour non-paiement de loyer.

Virginie Larivière, porte-parole du Collectif pour un Québec sans pauvreté

« Cela ne s’améliorera sûrement pas avec la hausse combinée des loyers et du coût de l’alimentation », dénonce Mme Larivière.

La situation du marché du logement a des effets négatifs sur plusieurs autres droits, comme ceux à la santé, à l’éducation, à l’alimentation, à la sécurité ou encore à l’égalité, déplore Philippe Néméh-Nombré, vice-président de la Ligue des droits et libertés. « Cela vient aussi aggraver la discrimination dont souffrent notamment les ménages racisés, les familles, les personnes sur l’aide sociale ou celles en situation de handicap, » dit-il.

Les logements trop chers ont aussi un impact sur les femmes victimes de violence conjugale, fait remarquer Louise Lafortune, porte-parole du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale (RMFVVC). « Plusieurs femmes hésitent à quitter un conjoint violent, parce qu’elles craignent de se retrouver à la rue, rapporte-t-elle. Il arrive même parfois que des femmes qui avaient malgré tout pris cette décision se résignent à retourner chez leur ancien conjoint, parce qu’elles ne trouvent pas de logement ou qu’elles n’arrivent pas à payer le loyer de l’appartement trop cher qu’elles avaient loué de peine et de misère. »

Une éventuelle politique québécoise de l’habitation devrait reconnaître toutes ces situations, disent-ils. Elle devrait mener à la construction d’un plus grand nombre de logements sociaux et à plus de protection pour les locataires.

Dans la Charte

La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse a recommandé que le droit au logement soit inscrit explicitement dans la Charte québécoise des droits et libertés, note Véronique Laflamme.

Mais le logement au Québec est d’abord considéré comme un bien de consommation, voire une occasion de profits, ce qui est encore plus vrai vu la place grandissante des sociétés d’investissements, fonds de retraite et grands promoteurs immobiliers sur le marché de l’habitation.

Véronique Laflamme, porte-parole du Front d’action populaire en réaménagement urbain

Le gouvernement Legault a promis d’adopter ce printemps un plan gouvernemental en habitation, mais selon Mme Laflamme, « ce sera un coup d’épée dans l’eau en l’absence d’une vision globale et de mesures vraiment structurantes à long terme comme la réalisation massive de logements sociaux, le contrôle obligatoire des loyers, un registre national des baux et des protections efficaces contre les évictions. »

Des groupes d’aide aux sans-abri, de défense des droits, de protection de l’environnement, d’aide alimentaire, de lutte contre la violence conjugale et une longue liste d’autres organismes de tous les horizons appuient la demande pour une politique de l’habitation.

En savoir plus
  • 610 000
    Nombre de personnes ayant eu recours à de l’aide alimentaire au Québec en 2021, ce qui représente une hausse de 22 % par rapport à 2019
    SOURCE : Collectif pour un Québec sans pauvreté
    95 635
    Nombre de ménages locataires qui consacrent plus de la moitié de leur revenu à se loger, avec un revenu annuel médian de 12 494 $
    Source : FRAPRU