(Ottawa) Au 16e jour de l’occupation, les camionneurs qui manifestent à Ottawa contre les mesures sanitaires ne comptent pas partir de sitôt, au grand désarroi des résidants et des commerçants.

« C’est l’enfer. Je déteste ce qui se passe en ce moment. Je n’ai jamais été aussi malheureuse de toute ma vie », dit Lea Howard, qui habite au centre-ville d’Ottawa. « Je ne peux pas sortir de chez moi. Je me fais harceler parce que je porte le masque », dit-elle.

La jeune femme envisage de s’acheter un drapeau du Canada, comme la majorité des manifestants. « Je me dis que je vais peut-être moins me faire harceler et être plus en sécurité », dit-elle.

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Centre-ville d’Ottawa, samedi

La plupart des gens qu’elle connaît ont décidé de quitter le centre-ville jusqu’à ce que les manifestations soient terminées. « Il y a des personnes âgées dans mon immeuble et elles ne peuvent aller nulle part. C’est un cauchemar », dit-elle.

L’Ontarienne n’en peut plus du bruit des klaxons, de la musique et des cris. « C’est comme si j’habitais dans une gare ferroviaire. » Les fins de semaine sont intolérables, dit-elle.

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Lea Howard, résidante du centre-ville d’Ottawa

La semaine passée, il y avait des feux d’artifice et ça sonnait comme des coups de feu chez moi.

Lea Howard, résidante du centre-ville d’Ottawa

Lundi, un juge de la Cour supérieure de l’Ontario a donné raison aux résidants du centre-ville qui demandaient aux camionneurs d’arrêter de klaxonner. Malgré l’injonction, d’une durée de 10 jours, le bruit des klaxons retentissait samedi dans les rues de la capitale.

Les commerces en mode survie

Assise derrière le comptoir, Jade Hon regarde les manifestants passer devant la vitrine. « Quand j’arrive le matin, je me dépêche d’entrer dans la boutique, dit l’employée du magasin de vêtements pour enfants Hatley, un des rares commerces ouverts au Marché By. Au moins, il n’y a personne qui veut rentrer dans une boutique pour enfants, alors je n’ai pas eu d’ennuis pour le moment », ajoute-t-elle.

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Jade Hon, employée de la boutique Hatley

Quelques commerces plus loin, Dave Mangano, le propriétaire du restaurant italien The Grand dans le Marché By, est exténué. « Chaque minute, il y a des clients qui essaient d’entrer sans masque et sans passeport vaccinal, dit-il. Ça met beaucoup de pression sur le personnel, parce qu’il doit constamment intervenir. »

Les employés du restaurant fournissent toutefois des masques aux clients qui le désirent. « Plus de la moitié refusent de les porter. On doit donc leur refuser l’entrée », dit-il.

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Dave Mangano, propriétaire du restaurant The Grand

Samedi après-midi, à peine une dizaine de clients étaient dans le restaurant. « Normalement, à cette heure-ci, on aurait eu une file à l’extérieur », se désole-t-il. Son chiffre d’affaires a diminué de 90 % depuis deux semaines.

Le propriétaire a tout de même fait le choix de rester ouvert, afin de permettre à ses employés de continuer à travailler. « On ne veut pas tous les perdre, mais on perd de l’argent en ce moment », dit-il.

M. Mangano et nombre d’autres commerçants du quartier envisagent de faire fi temporairement des mesures sanitaires. « On pense accepter les clients non vaccinés et sans masque bientôt. On est vraiment rendus en mode survie », conclut-il.