Des militants mohawks réclament d’obtenir l’heure juste sur l’avenir d’un vaste terrain dans la Pinède qui vient de ravoir son zonage « résidentiel », dans la foulée de vives tensions et de processus juridiques entre la Ville d’Oka et un promoteur depuis quelques mois.

« Il est temps d’arrêter ces jeux. Veut-il ou ne veut-il pas construire ? Sinon, qu’il nous donne une garantie », lance la militante et artiste mohawk Ellen Gabriel, dans une déclaration transmise à La Presse mardi.

Cette affaire occupe bien des esprits dans la région depuis des mois déjà. En décembre, la municipalité d’Oka avait changé le zonage de la Pinède afin d’« assurer sa sauvegarde et sa mise en valeur dans l’intérêt public ». Le lieu avait alors été déclaré « patrimonial » et « en conservation environnementale », empêchant ainsi tout ensemble résidentiel sur ces terres.

Poursuite de 8 millions

La décision a toutefois rapidement engendré des tensions. Le propriétaire du terrain en question, Grégoire Gollin, a depuis déposé une poursuite de 8 millions contre la municipalité, jugeant qu’il s’agissait d’une « tentative d’expropriation déguisée » à son endroit.

À la mi-janvier, le maire d’Oka, Pascal Quévillon, est finalement revenu sur sa décision, en rétablissant officiellement le zonage résidentiel. « Huit millions, c’est l’équivalent de notre budget annuel. Je pense que les citoyens d’Oka, on n’a pas les moyens de payer ça. Les discussions qu’on a eues avec nos avocats, c’était qu’en remettant le zonage résidentiel, ça venait vraiment couper l’herbe sous le pied à M. Gollin. Et ça évite de gros pourcentages de la poursuite », a d’ailleurs admis l’élu en conseil municipal, qui n’a pas souhaité en dire plus, vu la judiciarisation du dossier.

C’est ce retour au zonage résidentiel qui inquiète les militants autochtones, dont leur porte-parole Ellen Gabriel, qui dit vouloir « protéger [les] terres pour que les générations actuelles et futures puissent en profiter ». « Tout projet de construction quel qu’il soit, de vente et d’atteinte à l’intégrité de la Pinède nous mettrait sur la voie du conflit », prévient-elle.

« Ce sont mes droits »

Joint par La Presse, Grégoire Gollin affirme que sa décision n’est toujours pas officiellement arrêtée quant à l’avenir de sa propriété, mais que « dans un avenir prévisible et probablement de [son] vivant, il n’y aura pas de développement sur ce terrain ».

« Ce que je n’ai pas accepté, c’est que la Ville m’enlève mes droits acquis, sans raison logique. C’est pour ça que j’ai déposé la poursuite. Je voulais rétablir la valeur de ce terrain, afin que, peu importe si je décide de le vendre, de le donner à un organisme ou, dans 10-15 ans, de bâtir, je puisse le faire. Si je le veux, je veux aussi pouvoir le léguer à mes enfants. Ce sont mes droits », tonne-t-il.

M. Gollin dit malgré tout maintenir son offre de faire du terrain « un cadeau écologique » à la communauté. « C’est un bien qui doit clairement être à la collectivité », poursuit-il, en disant être « toujours ouvert au dialogue ». Ellen Gabriel, elle, rétorque que ce « cadeau écologique » n’en est pas vraiment un. « J’ai parlé avec M. Gollin de son cadeau écologique lorsqu’il l’a proposé. Il y avait des conditions à remplir. Son cadeau était en réalité un échange contre la permission de vendre davantage de nos terres », déplore la militante.