(Ottawa) Le bruit assourdissant des klaxons a joué avec les nerfs des résidants du centre-ville d’Ottawa tout au long du week-end. Le maire Jim Watson souhaite le départ des manifestants qui paralysent le centre-ville depuis samedi. « Ce n’est que le début », ont lancé des participants du mouvement Canada Unity, installés dans le froid polaire au parc de la Confédération dimanche. Ils se disent prêts à rester des semaines, voire des mois, « tant qu’il le faudra ». La police se prépare toutefois à négocier jusque dans la nuit pour les convaincre de se déplacer.

« Nous avons des agents qui communiquent avec les organisateurs du convoi pour leur demander de s’en aller comme ils pensaient le faire », a indiqué la porte-parole de la Police d’Ottawa, Amy Gagnon.

Des grappes d’agents de la paix étaient bien visibles au centre-ville de la capitale canadienne dimanche, se promenant dans la foule. La facture pour cette forte présence policière est estimée à environ 800 000 $ par jour.

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Parallèlement, les députés qui devaient se déplacer au parlement pour la reprise des travaux à la Chambre des communes lundi attendaient des directives du sergent d’armes pour savoir s’ils pourraient s’y rendre. Ils pourraient être plus nombreux à choisir d’assister aux débats virtuellement.

Les échos des klaxons ont repris dès le lever du soleil au centre-ville de la capitale canadienne, dimanche, prise d’assaut par des milliers de personnes et de véhicules jusqu’au milieu de la nuit samedi. Les manifestants, en appui aux camionneurs contre la vaccination obligatoire, demandent la fin de toutes les mesures sanitaires.

« Les résidants se sentent comme des prisonniers dans leur propre maison », a déploré le maire d’Ottawa dans une entrevue diffusée sur CBC dimanche, en appelant la police à les déplacer.

« Les résidants du centre-ville en ont assez, a dénoncé à son tour la conseillère municipale Catherine McKenney sur Twitter. Des klaxons toute la nuit, des croix gammées, des gens qui urinent et défèquent en public. […] Les habitants ont le droit d’avoir la paix et du répit de ces actes dégoûtants. »

Des enquêtes policières pour menaces et vandalisme ont été ouvertes, notamment concernant la profanation de la statue de Terry Fox et du monument commémoratif de guerre du Canada.

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Des enquêtes policières pour menaces et vandalisme ont été ouvertes, notamment concernant la profanation de la statue de Terry Fox.

Le convoi stationné rue Wellington, face au parlement, s’étendait sur quelques kilomètres, dimanche en fin de journée, et paralysait une bonne partie du centre-ville. D’autres rues ont été bloquées par la Ville au moyen de de grosses déneigeuses pour empêcher les véhicules de s’y entasser.

Dans un communiqué émis en milieu d’après-midi, la police a indiqué qu’elle allait commencer à déplacer la foule et les camions hors du centre-ville. « Cette démarche fera appel à d’importants effectifs policiers et municipaux », a-t-elle tenu à préciser.

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Samedi, des manifestants ont intimidé les bénévoles d’une soupe populaire pour obtenir de la nourriture. Un usager a également été agressé par des manifestants, et l’agent de sécurité qui s’est porté à son secours a été accueilli par des menaces et des insultes racistes.

Des croix gammées sur des pancartes et des drapeaux ont semé l’indignation. L’usage de ce symbole a été condamné par le ministre des Transports, Omar Alghabra, le chef du Nouveau Parti démocratique, Jagmeet Singh, et plusieurs organisations juives.

Le premier ministre Justin Trudeau n’a fait aucun commentaire dimanche. Il prévoit toutefois faire une déclaration et répondre aux questions des journalistes lundi avant-midi.

Pas tous dans le même panier, dit Legault

Le premier ministre François Legault est demeuré prudent au sujet des manifestations, qu’il a refusé de condamner catégoriquement.

« C’est important de ne pas mettre tous les camionneurs, tous les antis, tous les non-vaccinés dans le même paquet, a-t-il déclaré. Les camionneurs, on en a besoin pour livrer la nourriture, les marchandises. Il faut essayer de tendre la main. »

Le premier ministre a rappelé que la vaccination obligatoire imposée par le gouvernement fédéral était une mesure réservée aux « camionneurs qui vont et viennent des États-Unis », et non à ceux qui ne se promènent qu’au Québec et au Canada.

À ceux qui auraient la tentation de se lancer dans un mouvement de désobéissance civile, M. Legault leur demande d’être solidaires de la majorité des Québécois.

« On ne s’en va nulle part »

Les manifestants rencontrés par La Presse dimanche matin n’avaient pas l’intention de plier bagage. « On va rester jusqu’à ce qu’on manque d’essence ou qu’on se fasse évacuer », ont déclaré Vince et Charlene, deux trentenaires stationnés tout près du monument commémoratif de guerre du Canada, qui n’ont pas voulu s’identifier davantage. Plusieurs réservoirs d’essence s’entassaient dans la boîte de leur camionnette. Le couple a passé la nuit de samedi à dimanche sa camionnette en marche.

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Les organisateurs du mouvement Canada Unity étaient pour leur part installés au parc de la Confédération, un peu plus loin. Des remorques, des génératrices et plusieurs véhicules récréatifs motorisés longeaint le canal Rideau. « On est un groupe qui a travaillé très fort pour mettre tout ça en place », a expliqué un homme qui a dit s’appeler James Oswald, en provenance de Kingston. Lui-même fait partie du comité organisateur depuis six mois.

Dans l’une des remorques, des sacs de nourriture ont été préparés. « On va rester jusqu’à ce qu’il [le premier ministre Justin Trudeau] soit parti, a affirmé M. Oswald. On est prêts à rester pendant des mois. On ne s’en va nulle part. »

Kenny Vallières, 35 ans, est arrivé de Montréal samedi pour soutenir la manifestation. Il a dormi dans un parc, à côté d’un feu entouré de balles de foin. « On veut se faire entendre et respecter, a-t-il martelé. L’heure est grave. On banalise ce que les non-vaccinés vivent ! »

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Jamie Hart et Kenny Vallières

« On est ici parce qu’on n’a pas le choix », a renchéri Jamie Hart, un vétéran de l’armée canadienne et conducteur d’un des véhicules de Canada Unity. Selon lui, le Canada est symbole, partout sur la planète, de paix et de liberté, mais plus sur son propre territoire. « Je vais rester tant qu’eux [les organisateurs] restent ! »

« C’est notre liberté qui part en feu », a lancé un autre protestataire, qui a préféré ne pas être photographié.

Avec La Presse Canadienne