Depuis mardi, l’organisme dirigé par Carolina Manganelli, Action Réfugiés Montréal, peut de nouveau présenter des dossiers de parrainage au ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI). Ce n’est pas le cas de 18 autres organisations mises sur une liste noire par Québec pour avoir « fourni un renseignement ou un document faux ou trompeur ».

« Alléluia ! », lance Mme Manganelli, dont l’organisme a « passé le test ». « Nous travaillons fort jour et nuit pour pouvoir déposer nos 20 dossiers d’ici le 16 février. »

Le Programme de parrainage collectif des personnes réfugiées à l’étranger du gouvernement du Québec avait été suspendu en octobre 2020, le temps de mener des enquêtes sur l’intégrité de certains groupes, ce qui a mené à l’exclusion pendant un an de 18 organisations.

La Presse a fait le point sur la situation avec Carolina Manganelli, Stephan Reichhold, responsable de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI), et Sylvain Thibault, dont le groupe parraine des Congolais réfugiés en Ouganda.

Combien de demandes d’engagement sont jugées admissibles en 2022 ?

Les groupes de deux à cinq personnes et les organismes qui souhaitent parrainer des réfugiés pourront déposer un maximum de 825 demandes d’ici le 16 février. « Il y a un grand engouement, affirme Stephan Reichhold, responsable de la TCRI. C’est sûr qu’il y aura plus de demandes que de places disponibles. »

Comment les demandeurs seront-ils choisis ?

Par tirage au sort. « Ça, c’est vraiment déchirant pour les groupes qui sont en contact avec ces familles, qu’elles soient en Turquie, au Liban ou en Afrique, qui ont beaucoup d’espoir, commente M. Reichhold. Dans deux mois, si les dossiers ne sont pas tirés au sort, c’est terrible d’annoncer ça. » Mme Manganelli ajoute qu’elle essaie de ne pas trop y penser. « On fait tout ce qu’on peut de notre côté et on espère être chanceux. »

Le gouvernement a-t-il eu raison de suspendre les demandes pour mener une enquête sur certains groupes ?

« C’est une bonne chose que cette enquête soit menée parce que, comme dans tout, il y a toujours des abus, malheureusement, explique la directrice d’Action Réfugiés Montréal. On n’est pas surpris, mais on est contents d’avoir le droit, encore une fois cette année, de déposer des demandes. »

De nombreux organismes qui ont fait l’objet d’enquêtes avaient vu le jour avec l’arrivée des réfugiés syriens, en 2015 et 2016, rappelle Stephan Reichhold.

Du jour au lendemain, c’est passé de 500 à 5000 demandes. Il y a eu des manquements sérieux, c’était un peu n’importe quoi.

Stephan Reichhold, responsable de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes

« Il y a certains avocats et consultants qui connaissent bien le système et qui ont trouvé des failles. Et ils ont commencé à vendre des places à des familles réfugiées bien nanties pour faire de l’argent. Et il n’y avait pas de plafond. Donc, ils déposaient des centaines et des centaines de demandes. Ils ont fait des millions de dollars avec ça.

« L’esprit du programme, c’est que des citoyens québécois ramassent des dons pour aider une famille réfugiée qui est dans la misère, alors que ce qu’on a vu, c’était des centaines de Syriens millionnaires qui avaient assez d’argent pour venir ici comme investisseurs. Donc, ça a complètement dérapé. »

Les problèmes sont-ils réglés ?

Un grand ménage a été fait, assure le responsable de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes. « On espère que l’intégrité du programme sera respectée. Mais c’est très difficile pour le gouvernement de retracer la source de l’argent qui va permettre au groupe ici de parrainer des réfugiés. »

Combien de temps s’écoule-t-il entre une demande acceptée et l’arrivée des réfugiés au Québec ?

Au moins deux ans. « Il faut que ça aille plus vite », insiste Sylvain Thibault, qui parraine des réfugiés en Ouganda. « Nos dossiers déposés en janvier 2020, ça traîne. Nous, on est en contact quotidien, presque, avec ces gens-là. On voit ce que fait la COVID là-bas. On voit que les écoles sont fermées, que les jeunes ne vont plus à l’école. Ils vont arriver ici, on ne sait pas quand. On espère qu’ils vont arriver en 2022, cet été. Mais ils vont arriver encore plus maganés qu’ils étaient. Et nous, dès qu’on a déposé le dossier, on aurait été prêts à les recevoir la semaine d’après. »

Organismes exclus

Voici la liste des organismes exclus pour un an : Assemblée chrétienne du réveil des nations, Association éducative transculturelle, Association musulmane de l’Amérique du Nord à Laval (AMAN-Laval), Association musulmane turque de Montréal, Centre canadien de la jeunesse, Communauté arménienne catholique de Montréal, Congrégation Shaare Zedek, Église évangélique baptiste arabe de Montréal, Église orthodoxe d’Antioche de la Vierge Marie, Église orthodoxe Saint-Nicolas d’Antioche, Église orthodoxe Saint-Georges de Montréal, Église bulgare St-Ivan Rilsky, Fondation IQRA, Fondation Message de l’Islam, Mosquée Al Ansar, Parrainage réfugiés du Grand Montréal, Regroupement des Marocains au Canada et Société druze canadienne du Québec.

Source : ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration