(Ottawa) Les élus ne chôment pas lorsque les travaux de la Chambre des communes font relâche. Certains parcourent des centaines, voire des milliers de kilomètres pour retourner dans leur circonscription, où ils tentent d’aider les gens à résoudre leurs problèmes. Cinq députés nous ont raconté une histoire qui les a particulièrement marqués depuis qu’ils sont élus.

Une nouvelle véranda pour garder leur assurance

Il est parfois difficile avec la pénurie de main-d’œuvre de trouver un entrepreneur en construction pour de petits contrats. Le député libéral Stéphane Lauzon en a cherché un sans succès pour un couple de septuagénaires de Saint-André-Avellin, en Outaouais. Ceux-ci devaient se doter d’une nouvelle véranda rapidement, sans quoi ils perdaient l’assurance sur leur maison. « Il n’y a pas grand entrepreneurs qui veulent aller dans le fond de la ruralité, dans une petite maison d’un couple aîné, constate-t-il. C’est un problème. »

L’ex-enseignant en formation professionnelle a donc décidé de sortir ses clous et son marteau pour construire lui-même un escalier et une véranda avec l’aide de sa fille de 13 ans. « Ça ne prend pas grand-chose pour aider quelqu’un, fait-il remarquer. On fait un petit geste comme ça, ça peut paraître très banal, mais ça peut changer la vie de quelqu’un. Pour eux, c’était un gros stress. Ils n’en dormaient plus. » Le couple a payé les matériaux et le député a été récompensé par un plat de cigares au chou !

De l’eau chaude pour ses derniers jours

Lorsqu’il a reçu un coup de fil d’une employée d’un CLSC de sa circonscription il y a un peu plus d’un an, Louis Plamondon ne se doutait pas qu’il allait être à ce point remué. Le député bloquiste a aidé beaucoup de gens au fil de ses 37 années de carrière politique, mais il ne peut oublier le couple à qui il s’apprêtait à donner un coup de pouce. Une dame âgée s’occupait de son mari très malade qui tenait à mourir à la maison. Mais impossible pour les préposés aux bénéficiaires de lui faire prendre son bain hebdomadaire : il n’avait plus d’eau chaude.

PHOTO ADRIAN WYLD, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Le député bloquiste Louis Plamondon

Le couple qui vivait dans une extrême pauvreté n’avait pas d’argent pour se payer un nouveau chauffe-eau. « Des fois, il faut trouver des moyens en dehors de tous les programmes gouvernementaux », constate l’élu. Il a donc sollicité une quincaillerie pour acheter lui-même un nouveau chauffe-eau à bon prix, puis a trouvé un plombier et un électricien prêts à donner de leur temps pour l’installer.

« Trois mois et demi après, j’ai reçu une lettre sur un vieux papier jauni », se rappelle-t-il. La femme remerciait le député d’avoir pu permettre à son mari de mourir à la maison. « Quand j’ai reçu ça, je pleurais, ajoute-t-il. C’était beau de voir à quel point cette femme-là était reconnaissante d’avoir quelque chose d’assez simple quand même, d’avoir eu de l’eau chaude pour un bain toutes les semaines. »

Arrêté deux semaines avant Noël

Les démarches d’Elizabeth May ont évité l’expulsion à un homme sans histoire qui vivait dans une communauté autochtone sur l’île de Penelakut, en Colombie-Britannique. L’histoire remonte à 2014, mais la députée y songe encore. « Des employés de l’Agence des services frontaliers ont frappé chez lui, l’ont arrêté et lui ont passé les menottes », raconte l’ex-cheffe du Parti vert. Ils l’ont ensuite incarcéré dans le sous-sol de l’aéroport de Vancouver dans le but de le renvoyer aux États-Unis.

PHOTO BLAIR GABLE, ARCHIVES REUTERS

Elizabeth May, ex-cheffe du Parti vert

Richard Jerman s’était installé avec sa conjointe canadienne en Colombie-Britannique 37 ans auparavant, mais avait négligé de faire des démarches pour acquérir la citoyenneté canadienne parce que les Autochtones peuvent se déplacer librement de part et d’autre de la frontière. Or, il n’avait pas le statut requis, même si son père était originaire d’une communauté autochtone de la Californie, puisqu’il avait grandi dans une famille d’accueil blanche après la mort de sa mère. Au Canada, il avait tout de même un numéro d’assurance sociale, un permis de conduire et une carte d’assurance maladie.

« C’était un cas urgent, se rappelle Mme May. Nous avions 24 heures seulement avant le moment de son expulsion. » Alertée par une professeur d’ethnobiologie qui connaissait bien la famille, Mme May a trouvé un avocat, a averti les médias et a contacté le bureau du ministre de l’Immigration de l’époque, Chris Alexander. Trois mois plus tard, M. Jerman, qui avait pu retrouver ses enfants et petits-enfants, recevait sa citoyenneté canadienne.

Sauvés de la faillite

La pandémie est difficile pour beaucoup d’entrepreneurs qui peinent à joindre les deux bouts. Le député conservateur Bernard Généreux en sait quelque chose, lui qui possède une imprimerie depuis 30 ans. Lorsqu’une entreprise de sa circonscription l’a contacté en 2020 pour l’aider à démêler une situation, il n’a pas hésité. En faillite, elle avait réussi à vendre sa division de transport pour se renflouer. Or, des fonctionnaires estimaient que l’acheteur n’était pas habilité à l’acquérir en vertu de la loi fédérale. La transaction tombait entre les mailles du filet.

« Des fois, ils ne perçoivent pas que la terminologie qui est employée peut avoir un impact sur un nombre important de travailleurs, explique-t-il. C’est ce qu’on a fait valoir et on a gagné notre cause. Les gens étaient vraiment contents. » Les démarches ont duré six mois. Le député et son équipe ont envoyé des lettres et discuté avec des fonctionnaires. Une vingtaine d’emplois dans le Bas-Saint-Laurent ont ainsi été sauvés.

Touchée par la générosité des gens

Leah Gazan venait d’être élue depuis quelques mois à peine lorsque la portée de son rôle de députée a pris tout son sens.

PHOTO SEAN KILPATRICK, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

La députée néo-démocrate Leah Gazan

Le 26 décembre 2019, un incendie ravage un immeuble résidentiel du West End, l’un des quartiers les plus pauvres de Winnipeg. Une trentaine de personnes se retrouvent sans logis en pleine période des Fêtes. La députée néo-démocrate et d’autres élus locaux font donc appel à la générosité des gens pour obtenir des dons afin de permettre aux victimes de cet incendie de repartir à neuf. Casseroles, vêtements, téléviseurs, ustensiles… les boîtes et les sacs s’accumulent. « Mon bureau était complètement rempli de dons, à un point tel que les pompiers ont fait deux voyages en camion pour remettre tous ces objets à ces gens qui avaient tout perdu », se remémore-t-elle.