(Ottawa) Plus de sept ans après l’accident ferroviaire de Lac-Mégantic, la vérificatrice générale du Canada constate que le ministère fédéral des Transports ne surveille pas adéquatement la sécurité des voyageurs et des marchandises sur rail.

Dans un rapport déposé jeudi après-midi aux Communes, Karen Hogan rapporte qu’il y a eu « d’importantes améliorations » de la surveillance, mais que le gouvernement fédéral ne réussit pas à déterminer si sa surveillance améliore la sécurité ferroviaire.

« C’est là la grosse lacune que nous avons soulevée », a-t-elle fait remarquer au cours d’une conférence de presse pour commenter son rapport.

« Si on va investir du temps et de l’énergie, on devrait être en mesure de savoir si l’activité améliore vraiment la sécurité », a-t-elle insisté.

Réagissant à cette critique, le ministre fédéral des Transports a tenu à indiquer qu’aucun pays ne fait ce que Mme Hogan réclame à son ministère.

« Ce que la vérificatrice générale nous demande, c’est d’ajouter une couche de plus de vérification de la sécurité », a affirmé le ministre Omar Alghabra.

« Nous avons cherché à travers la planète une autre juridiction qui ferait ce qu’elle demande et nous n’en avons trouvé aucune », a-t-il dit.

Tout de même, le ministre croit que c’est « une bonne idée » et promet d’y travailler.

« Rien ne nous empêche d’être les premiers dans le monde à faire cela. Et nous nous engageons à le faire », a-t-il ajouté.

Aux premières pages du chapitre sur la sécurité ferroviaire, le rapport de la vérificatrice générale (VG) souligne l’augmentation de l’activité ferroviaire, notant, par exemple, qu’entre 2017 et 2018, la quantité de mazout et de pétrole brut transportés par train a fait un bond de plus de 45 %.

« Cette intensification du trafic ferroviaire entraîne l’usure des voies ferrées, ce qui peut présenter des risques supplémentaires pour la sécurité », fait-on remarquer. On s’inquiète également de « l’augmentation des terres aménagées à proximité des opérations ferroviaires » et « du prolongement des voies ferrées dans les zones urbaines ».

Et pourtant, le ministère fédéral des Transports n’arrive pas, non plus, à mesurer l’efficacité des systèmes de gestion de la sécurité des compagnies de chemin de fer.

« Le ministère n’avait pas fourni de directives suffisamment détaillées aux compagnies de chemin de fer pour qu’elles produisent leurs données sur la sécurité. Par conséquent, les renseignements étaient parfois incomplets, de qualité inégale ou présentés tardivement », écrit-on.

Le bureau du vérificateur général qui surveille les activités du gouvernement fédéral s’était déjà penché sur ces questions en 2013, quelques semaines avant la tragédie à Lac-Mégantic. Et ses recommandations d’alors n’ont pas été « entièrement mises en œuvre », selon Mme Hogan.

« Huit ans après notre dernière vérification, il reste beaucoup à faire », s’est étonnée Mme Hogan.

Le ministre Alghabra assure comme ses prédécesseurs que la « sécurité ferroviaire est (sa) priorité numéro un ».

« Sans aucun doute, la sécurité est un projet d’amélioration continue », d’après lui.

Réactions de l’opposition

À la lecture du rapport de la vérificatrice, le député bloquiste Maxime Blanchette-Joncas s’est inquiété.

« Après 14 ans, il est temps que le message passe. Des quantités importantes de matières dangereuses circulent tous les jours à travers nos municipalités et régions. Sans surveillance adéquate, le transport ferroviaire n’est pas sécuritaire », a écrit le député dans un communiqué.

Le député conservateur Luc Berthold, qui représente la circonscription de Mégantic-L’Érable, s’est montré tout aussi cinglant.

« Le précédent ministre des Transports (Marc Garneau) répétait sans cesse que la sécurité ferroviaire était sa première priorité. Le rapport nous démontre qu’il a visiblement échoué », a écrit le député dans un communiqué diffusé en fin de journée, jeudi.

« J’invite le nouveau ministre des Transports à faire mieux, plus vite, et à faire en sorte que cette fois, ce rapport ne reste pas sans réponse », a-t-il réclamé.