Des policiers québécois se retirent de certaines opérations ou vont jusqu’à s’abstenir d’intervenir notamment par crainte de répercussions et de critiques dans l’espace public et dans les médias, conclut une étude réalisée par le Centre de recherche et de développement stratégique de l’École nationale de police du Québec (ENPQ).

Le désengagement policier, ou depolicing, est une abstention de la part du policier d'intervenir dans certaines situations pour éviter des répercussions, même quand la loi lui permet d’agir.

Le risque de recevoir une plainte en déontologie ou de faire l’objet d’une poursuite civile ou d’une enquête du Bureau des enquêtes indépendantes est au cœur des préoccupations des policiers consultés. « On peut être accusé au criminel pour avoir fait notre travail », estime un participant, selon le témoignage fourni par la chercheuse Camille Faubert.

La peur d’être filmé ou médiatisé et de faire le tour des réseaux est omniprésente, et crée un contexte propice au désengagement aux yeux des policiers, renchérit l’experte.

De nombreux participants craignent d’être accusés de profilage racial.

« Ces états d’esprit se traduiraient par une baisse des efforts et de l’implication au travail, l’hésitation à intervenir qui mène parfois à ne pas intervenir du tout et parfois à regarder à gauche quand ça se passe à droite », explique la chercheuse.

Conséquences diverses

Les conséquences rapportées par les 186 participants à l’étude sont diverses : démotivation, découragement, baisse d’attachement et d’intérêt envers la profession, démobilisation ou encore indifférence.

« Il y a une petite voix dans ma tête qui me dit que je vais être dans le pétrin », a confié un policier au cours de la recherche.

Parmi les policiers qui ont pris part à l’étude, 21 ont été sélectionnés au hasard pour des entrevues.

Les agents disent faire face aux critiques du public et à la méconnaissance du métier de policier, mais aussi à un manque de soutien organisationnel.

Le « sensationnalisme médiatique » et la perception du sentiment d’injustice ont aussi été évoqués.

L’ENPQ entend offrir des formations de sensibilisation à l’existence du phénomène. On vise à mettre en place des stratégies de prévention et à développer une approche de soutien aux gestionnaires.