« Enfin, on va commencer les travaux. » Le ministre des Transports, François Bonnardel, a lancé vendredi la phase 1 du prolongement de l’autoroute 19 entre Laval et Bois-des-Filion, espérant ainsi concrétiser un projet qui fait l’objet de discussions depuis des décennies.

Ce premier blitz de travaux, qui coûtera 60 millions et qui s’échelonnera jusqu’en 2023, consiste essentiellement en la construction de quatre nouveaux échangeurs sur le boulevard Dagenais Est, la rue Saint-Saëns Est, les boulevards des Laurentides et des Mille-Îles et le boulevard Adolphe-Chapleau. L’échangeur de l’autoroute 640 et de la route 335 fera par ailleurs l’objet d’une réfection.

IMAGE FOURNIE PAR LE MINISTÈRE DES TRANSPORTS

Détails de la phase 1 du prolongement de l'autoroute 19

Une nouvelle chaussée sera aussi érigée entre l’axe Dagenais Est et le boulevard Industriel. « On va avoir trois voies de chaque côté, dont des voies réservées pour le transport collectif et les voitures électriques », a soulevé M. Bonnardel à ce sujet, en promettant aussi de faire une place aux piétons et aux cyclistes.

Comme prévu, un stationnement incitatif sera implanté à l’intersection nord-est des autoroutes 19 et 640, pendant qu’un nouveau pont verra le jour à l’est du pont Athanase-David, au-dessus de la rivière des Mille Îles. Des « écrans antibruit » seront enfin installés dans « différents secteurs » aux abords de l’autoroute.

Ottawa contribue à hauteur de 260 millions pour le projet dans sa globalité, dont le coût approximatif était évalué à environ 700 millions il y a quelques années. Le coût actualisé n’a pas été révélé vendredi, comme des appels d’offres sont en cours.

Une question de « volonté politique » ?

Dans le monde politique, des discussions entourant le prolongement de l’autoroute 19, sur la couronne nord, ont lieu depuis les années 1960. « Certaines personnes ici en parlent depuis avant même ma naissance », a d’ailleurs ironisé vendredi le nouveau maire de Laval, Stéphane Boyer, âgé de 33 ans.

Plusieurs gouvernements ont en effet promis de concrétiser ce projet au fil du temps, sans que cela n’ait jamais réellement lieu. « C’est une question de volonté politique », a répondu vendredi le ministre Bonnardel, en assurant que cette fois sera la bonne.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Le ministre des Transports, François Bonnardel, aux côtés du nouveau maire de Laval, Stéphane Boyer, et du ministre fédéral de la Justice, David Lametti

De l’ancienne ministre libérale des Transports Julie Boulet, en 2007, au premier ministre Jean Charest en 2010, au ministre péquiste Sylvain Gaudreault en 2013 en passant par le premier ministre Philippe Couillard en 2018, « tout le monde un jour a annoncé une première pelletée de terre », a reconnu M. Bonnardel.

J’avais dit à mes équipes que le jour où on ferait un point de presse pour annoncer le début des travaux, il y aurait une pépine dans la cour. Et c’est ce qu’on voit aujourd’hui : il y a des tracteurs, il y a des travailleurs sur le chantier. On commence.

François Bonnardel, ministre des Transports

Il reste que plusieurs considérations s’imposent. Déjà en 2015, le Bureau des audiences publiques sur l’environnement (BAPE) avait invité le ministère des Transports (MTQ) à revoir son projet. « Tout en reconnaissant l’urgence d’agir, une analyse comparative plus approfondie est requise entre les scénarios d’autoroute à deux voies ou de boulevards urbains, y compris celui avec carrefours plans et échangeurs », y avait notamment expliqué l’organisme.

Le projet de prolongement qui avait été autorisé en 2018 par le gouvernement Couillard était toutefois identique, ou presque, au projet original que le BAPE avait repoussé, en demandant à Québec de retourner faire ses devoirs.

Cette fois, François Bonnardel promet que le chantier sera « carboneutre ». « On veut vraiment arriver à l’indice GES zéro, donc on va planter énormément d’arbres pour compenser les pertes de milieux humides qu’il pourrait y avoir sur les différents travaux », a-t-il assuré.

Autoroute 19 : tronçon par tronçon

Début des années 1960 : Premiers travaux sur l’autoroute 19. À l’origine, le projet doit relier le boulevard Taschereau, sur la Rive-Sud, à la ville de Saint-Jérôme, dans les Laurentides.

1970 : Le premier tronçon de l’A19, dont le pont Papineau-Leblanc, jusqu’au boulevard Henri-Bourassa à Montréal, est ouvert.

1973 : Le gouvernement du Québec exproprie toute une partie du centre-ville de Bois-des-Filion et des terrains à Laval pour prolonger l’autoroute. Cette blessure est toujours vive dans l’histoire de la ville, 45 ans plus tard.

1976 : L’autoroute 19 se rend jusqu’à l’autoroute 440 à Laval.

1989 : On procède à de nombreux réaménagements ponctuels sur la route 335 pour répondre à la demande automobile toujours croissante.

2004 : Le cinquième tronçon, jusqu’au boulevard Dagenais, est ouvert.

2008 : Un sixième tronçon s’ajoute entre l’autoroute 640 et le boulevard Adolphe-Chapleau (route 344) à Bois-des-Filion. La route 335 est élargie à quatre voies.

2010 : Québec relance le projet de parachèvement de l’autoroute 19 jusqu’à Bois-des-Filion.

2014 : Des consultations du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) révèlent des réserves importantes par rapport au projet.

Janvier 2015 : Le BAPE conclut à la nécessité d’une intervention du ministère des Transports (MTQ) dans le corridor de l’autoroute, mais recommande une nouvelle étude comparative de scénarios d’autoroutes et de boulevards urbains.

Août 2015 : Le MTQ annonce par communiqué qu’il procède à une analyse sur la faisabilité d’un boulevard urbain dans le cadre du projet de parachèvement de l’autoroute 19.

2017 : L’évaluation environnementale du projet par le ministère de l’Environnement est suspendue, à la demande du MTQ. Le dossier est « réactivé » en avril 2018.

26 mai 2018 : Le ministère de l’Environnement recommande la réalisation du projet d’autoroute à quatre voies avec voies réservées au transport en commun.

3 juillet 2018 : Le gouvernement libéral de Philippe Couillard adopte un décret de réalisation pour le parachèvement de l’autoroute.