Vous avez reçu un avis de la Ville de Montréal vous annonçant que vous devez remplacer votre vieille entrée d’eau en plomb pour améliorer la qualité de votre eau potable ? Attention, la facture pourrait être salée si les travaux sont réalisés par l’entrepreneur mandaté par la Ville.

C’est ce qu’a constaté Marie-Claude Renaud, quand elle a appris qu’elle devait changer l’entrée d’eau de son triplex, dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve.

L’entrepreneur mandaté par la Ville lui a indiqué que la facture des travaux pourrait varier entre 5000 $ et 7000 $, sans pouvoir être plus précis.

Mme Renaud a ensuite sollicité un autre entrepreneur, qui lui a fait une soumission s’élevant à 4100 $.

Pourquoi une telle différence de prix ? En plus, l’entrepreneur privé me donne une garantie de cinq ans, alors que la garantie de la Ville est de seulement un an.

Marie-Claude Renaud, propriétaire d’un triplex dans Hochelaga-Maisonneuve

Des milliers de propriétaires devront changer leurs entrées d’eau en plomb d’ici 2030 : la Ville de Montréal estime leur nombre à 79 000 sur son territoire, mais des opérations de dépistage sont toujours en cours.

En 2006, la Ville s’est engagée à remplacer tous les tuyaux de plomb de la portion publique de son réseau de distribution d’eau, en encourageant fortement les propriétaires à changer par la même occasion la partie privée de leur entrée d’eau. Ces remplacements se font lorsqu’une rue est en chantier, par exemple pour une réfection d’égout ou de canalisation ou pour l’asphaltage.

Mais les encouragements n’ont pas suffi : moins de 10 % des propriétaires l’ont fait.

« Si les propriétaires ne font pas les travaux, ça ne règle pas notre problème de santé publique. Pire : ça signifie que nos investissements publics ne servaient à rien, parce que s’il restait un ou deux mètres de tuyaux en plomb du côté privé, ça annulait complètement l’effort, il pouvait encore y avoir du plomb dans l’eau potable », explique Sylvain Ouellet, responsable des infrastructures et de l’eau au comité exécutif.

Obligation de faire les travaux

En octobre 2019, Montréal a donc adopté un règlement obligeant les propriétaires concernés à faire les travaux requis sur leur partie privée. S’ils n’obtempèrent pas, leur entrée d’eau sera changée par l’entrepreneur de la Ville en même temps que la partie publique, et on leur enverra la facture.

Le remplacement de la partie privée de l’entrée d’eau par un entrepreneur embauché par le propriétaire doit se faire avant le chantier de la Ville ; impossible de procéder en même temps que les travaux municipaux.

Les citoyens peuvent payer ce qu’ils doivent à la Ville en un versement, mais ils peuvent aussi étaler le paiement sur une période de 15 ans, moyennant le paiement d’intérêts, via leur compte de taxes municipales, rappelle Sylvain Ouellet.

Même si une entente de paiement est possible, comment se fait-il que la Ville ne puisse pas offrir de meilleurs prix aux résidants, alors qu’elle peut réaliser des économies d’échelle ?

M. Ouellet refuse de se prononcer sur un cas précis.

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Sylvain Ouellet, responsable des infrastructures et de l’eau au comité exécutif de la Ville de Montréal

Certaines situations peuvent être complexes, et nécessiter par exemple la démolition d’un escalier.

Sylvain Ouellet, responsable des infrastructures et de l’eau au comité exécutif de la Ville de Montréal, pour expliquer les prix

Le service des communications indique que « le montant moyen actuellement estimé par la Ville de Montréal se situe autour de 6000 $ par entrée d’eau. Ce montant peut varier en fonction de la longueur du branchement et des obstacles qui empêchent la réalisation des travaux à l’intérieur ou à l’avant de la maison. »

Sylvain Ouellet ne veut pas dissuader les propriétaires de demander des soumissions à des entreprises privées, mais il fait remarquer que cette façon de procéder est plus compliquée que le remplacement de l’entrée d’eau par la Ville.

De plus, le propriétaire ou son entrepreneur devront payer pour obtenir un permis d’occupation du domaine public, le temps que durent les travaux, note Marie-Claude Renaud.

Au moins, Mme Renaud aura plus de temps pour faire exécuter les travaux par son entrepreneur : le chantier dans sa rue, qui devait démarrer au début du mois, a été reporté au printemps 2022.