Jérôme Saunier, qui se déplace en fauteuil roulant, estime que l’accessibilité universelle devrait être un enjeu de premier plan à Montréal. S’il salue les efforts d’élus locaux, le résidant de Verdun dénonce un manque de réflexion lors de la conception du mobilier urbain.

Le nouveau mobilier aménagé rue Wellington – qui est piétonne cet été – est populaire auprès des citoyens. Une balançoire ainsi que certains placotoirs affichent une vignette bleue indiquant qu’ils sont accessibles aux personnes en situation de handicap. En voulant essayer ces installations, Jérôme Saunier s’est rendu compte qu’elles n’étaient en réalité pas adaptées.

« La rampe pour accéder à la balançoire est trop raide, donc on ne peut pas y monter de façon autonome en fauteuil roulant manuel ni se tourner pour faire face au banc », explique-t-il. M. Saunier a publié un texte sur Facebook pour dénoncer la situation. Depuis, l’arrondissement a retiré la signalisation trompeuse.

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Rampe d’accès menant à une balançoire, rue Wellington. L’installation n’est pas adaptée aux personnes en situation de handicap, selon Jérôme Saunier.

La semaine dernière, une tournée de la rue Wellington a été réalisée avec le comité citoyen responsable de l’accessibilité, selon Pierre L’Heureux, conseiller d’arrondissement à Verdun. « On a vu immédiatement que la balançoire n’était pas adaptée. Ça a été mal conçu, mais ça va être corrigé », assure-t-il au téléphone.

Le comité n’a pas été impliqué en amont, puisque c’est la SDC Wellington qui est responsable du projet, selon M. L’Heureux. « Habituellement, nos installations sont analysées par nos services et des experts externes pour s’assurer qu’elles sont accessibles », précise-t-il.

Problèmes d’accessibilité

Un projet de revitalisation du stationnement Éthel de 4 millions, à Verdun, vient d’être annoncé. Il prévoit un escalier reliant la rue Wellington au dernier étage du stationnement, mais pas d’accès pour les personnes à mobilité réduite.

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Pierre L’Heureux, conseiller d’arrondissement à Verdun

C’est un projet de la Ville et de la SDC, l’arrondissement est seulement partenaire. Dans l’idéal, il faudrait un ascenseur. On va voir ce qui pourrait être fait, ce serait inexcusable de faire abstraction [de l’accessibilité].

Pierre L’Heureux, conseiller d’arrondissement à Verdun, à propos du projet de revitalisation du stationnement Éthel

Autre exemple dans l’arrondissement de L’Île-Bizard–Sainte-Geneviève : le nouveau belvédère du parc-nature du Bois-de-L’Île-Bizard est doté uniquement d’escaliers. Impossible d’y accéder autrement.

L’accès au métro de Montréal demeure également très restreint. Seules 16 stations sur 68 sont munies d’un ascenseur. D’ici 2025, 25 stations supplémentaires devraient toutefois être équipées d’ascenseurs.

« Que ce soit les placotoirs de Verdun ou les problèmes d’accessibilité ailleurs, c’est toujours la même histoire, lance Steven Laperrière, directeur général du Regroupement des activistes pour l’inclusion au Québec (RAPLIQ). Des organismes ont amplement les connaissances pour pallier ce genre de situation, mais ils ne sont pas consultés. »

Montréal propose des programmes d’aide à l’accessibilité des commerces. Mais ce n’est pas assez efficace, selon Steven Laperrière, car assurer l’accessibilité universelle n’est pas obligatoire. « Ça s’améliore, mais à très petits pas », ajoute-t-il.

Plan d’accessibilité universelle

À Verdun, qui s’est doté d’un plan d’accessibilité universelle, la réglementation a été modifiée pour que les bâtiments subissant des rénovations tendent vers l’accessibilité.

La loi québécoise ne permet pas aux arrondissements d’exiger que les accès aux commerces soient universels. On a quand même introduit des objectifs et plusieurs sont devenus accessibles. L’arrondissement investit des millions depuis huit ans pour l’accessibilité universelle.

Pierre L’Heureux, conseiller d’arrondissement à Verdun

Jérôme Saunier reconnaît les efforts de l’arrondissement et de la SDC Wellington, qui a réservé des places de stationnement aux personnes à mobilité réduite, à diverses intersections. Des rampes d’accès au trottoir ont aussi été installées, pour éviter aux personnes en fauteuil roulant d’aller jusqu’au bout du trottoir pour monter dessus.

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L’entrée de Desjardins, rue Wellington, est accessible universellement.

« Il y a plein de réussites rue Wellington, relève Billy Walsh, président-directeur général par intérim de l’Association des sociétés de développement commercial de Montréal (ASDC). Ce n’est pas parfait, mais il y a une grande sensibilité [en matière d’accessibilité universelle]. Comme on fait beaucoup de choses pour la première fois, on s’ajuste au fur et à mesure. »

Un enjeu plus large

À l’approche des élections municipales, l’organisme Ex aequo, qui défend les droits des personnes à capacité réduite, prépare une plateforme de revendications. « Aucun parti n’a nommé de candidat en situation de handicap pour un poste au conseil de la Ville, indique Jérôme Saunier, actif dans l’organisme. Comment les choses peuvent-elles changer si on n’a aucun représentant dans les processus décisionnels ? »

Seul le parti Ensemble Montréal présente une candidate à mobilité réduite, Lise Poulin, comme conseillère d’arrondissement dans Lachine.

1 million

Au Québec, 16,1 % des personnes de 15 ans ou plus ont une incapacité, soit 1 053 350 personnes.

Source : Office des personnes handicapées du Québec