Une brèche a été découverte dans la sécurité interne de Loto-Québec. La police et la direction de la société d’État croient qu’un employé corrompu a mis en place un stratagème frauduleux pour accéder aux comptes de joueurs et détourner des sommes à son profit, a appris La Presse.

Un employé de 37 ans, résidant de Terrebonne, Martin Raymond, a été formellement accusé mercredi d’une série d’infractions criminelles en lien avec cette affaire, au palais de justice de Saint-Jérôme. Les accusations découlent d’une enquête de l’Unité permanente anticorruption (UPAC).

« M. Raymond travaillait au centre d’appels du jeu en ligne », confirme Marisol Schnorr, chef du service des affaires publiques à Loto-Québec.

L’employé de la société d’État est accusé d’abus de confiance par un fonctionnaire public, de fraude de plus de 5000 $ à l’endroit de Loto-Québec, de possession de renseignements personnels à des fins criminelles et d’usage non autorisé d’un ordinateur.

Le chef d’accusation d’abus de confiance fait référence à « l’accès aux comptes clients et l’utilisation frauduleuse de sommes d’argent ». Les faits se seraient étalés sur quelques mois entre l’hiver et l’été 2020, alors que l’accusé était employé de Loto-Québec. Un chef d’accusation de fraude de plus de 5000 $ contre un particulier concerne par ailleurs des faits qui se sont étalés de 2017 à 2020, mais il s’agit d’un évènement distinct, puisqu’à l’époque, l’accusé ne travaillait pas encore pour la société d’État.

Intrusion dans des comptes

L’accusé était absent à la cour et s’est fait représenter par son avocate, MChristine Brosseau. « Nous n’avons pas de commentaire », a-t-elle répondu lorsqu’on l’a questionnée sur les accusations contre son client.

Selon les bribes d’informations disponibles à ce stade-ci de l’affaire, les sommes détournées qui ont pu être déterminées se limitent à un peu plus d’une vingtaine de milliers de dollars. L’enquête tend toutefois à démontrer que près d’une trentaine de comptes personnels de jeu en ligne pourraient avoir été compromis.

Certains clients avaient apparemment laissé leur compte inactif pendant une certaine période, ce qui aurait permis à l’employé de s’y introduire et, à l’occasion, de faire main basse sur des sommes d’argent, sans attirer l’attention.

L’UPAC a refusé de discuter du dossier pour l’instant, mais des documents judiciaires déposés à la cour montrent que ses enquêteurs étaient sur le coup depuis environ un an. Le 19 août 2020, les policiers ont obtenu un mandat d’entrée chez l’employé, dans le cadre de leur enquête. Le lendemain, les crimes ont cessé, selon le dossier de l’accusé. M. Raymond ne travaillait plus pour la société de jeux de hasard depuis mai 2020. Au total, il a été à son emploi moins d’un an.

Loto-Québec souligne que ce sont ses propres services de sécurité interne qui ont détecté des agissements suspects de la part de l’employé. « Les différents mécanismes de contrôle et systèmes de vérification en place à Loto-Québec ont permis d’identifier certaines irrégularités. Le service de police a aussitôt été contacté », affirme Mme Schnorr. Sans préciser en détail ce qu’il est advenu des sommes mises en cause, la porte-parole assure qu’« aucun client n’a été lésé » en fin de compte.

Un site très populaire

Sur son site web, Loto-Québec offre plusieurs options de jeu en ligne. Pour participer, il faut se créer un compte individuel et fournir des renseignements personnels.

Des reportages récents publiés dans La Presse ont mis en lumière l’explosion du jeu en ligne depuis le début de la pandémie. La plateforme de jeu en ligne de Loto-Québec a vu sa fréquentation grimper de 132 % au cours de la dernière année.

Selon un grand sondage de l’Institut national de santé publique du Québec, pas moins de 20 % des Québécois ont joué à des jeux de hasard et d’argent sur l’internet depuis un an. Pour près de la moitié d’entre eux, il s’agissait d’une première expérience en la matière. 

Rectificatif Des corrections ont été apportées à ce texte. Une version antérieure rapportait que la fraude s’était étalée de 2017 à 2020 chez Loto-Québec. Or, les accusations relatives à l’année 2017 concernent un évènement distinct survenu avant l’embauche de l’accusé par la société d’État. Une correction a aussi été apportée au titre d’emploi de l’accusé.