(Edmonton) Plusieurs musulmanes ne sont pas rassurées devant la montée de l’islamophobie et l’augmentation du nombre d’agressions contre des femmes portant le hijab au pays.

Sana Chaudhry, une psychothérapeute âgée de 31 ans d’Oakville, en Ontario, souligne que le port du hijab est une façon d’exprimer sa foi dans l’islam. Pour elle, cela signifie modestie et beauté.

Elle a pris la difficile décision de ne plus porter le sien en public en 2016 après avoir été agressée deux fois. La première fois, un homme lui a arraché son hijab pendant qu’elle faisait des courses. La seconde fois, c’est un homme qui est venu par-derrière pour essayer de lui fermer une portière de sa voiture sur une main pendant qu’elle sortait des sacs d’épicerie.

Mme Chaudhry dit vouloir continuer de porter son hijab, mais ses expériences personnelles et d’autres attaques contre des musulmanes – au moins 10 dans la seule ville d’Edmonton au cours des six derniers mois – l’en ont dissuadée.

Cette peur s’est accrue à la suite de la récente attaque ciblée contre une famille de London. Un homme âgé de 20 ans a foncé sur elle avec son camion, tuant quatre personnes, dont deux femmes portant un hijab.

« C’est une peur subconsciente qui s’infiltre dans tous les aspects de la vie. Il est vraiment difficile de se sentir en sécurité », soupire Mme Chaudhry.

Ses amis qui portent le hijab ressentent la même chose, ajoute-t-elle.

Si ces attaques ont semé l’effroi parmi les femmes musulmanes du pays, certaines refusent de se laisser détourner de leurs convictions religieuses.

« Nous vivons dans une société qui n’accepte pas vraiment l’islam ou notre choix de porter un hijab », dit Nadia Mansour, une résidente de Prince George, en Colombie-Britannique, âgée de 18 ans.

Selon elle, la décision de la Cour supérieure du Québec de maintenir la Loi sur la laïcité de l’État, qui interdit le port de signes religieux à certains employés relevant du gouvernement, prouve que les femmes musulmanes qui choisissent de porter un hijab ne sont pas acceptées par la société.

Les gens nous regardent. J’ai été victime d’intimidation à l’école secondaire parce que je portais un hijab. Je l’ai même enlevé pendant une courte période. Mais honnêtement, j’en ai marre d’entendre ces sottises. En fait, je n’ai plus peur. C’est ma religion et je la défendrai.

Nadia Mansour

Aruba Mahmud, une artiste de London, en Ontario, dit que ce sont toutes les femmes qui ressentent les retombées des récentes agressions.

PHOTO GEOFF ROBINS, LA PRESSE CANADIENNE

Aruba Mahmud, devant un mémorial pour les quatre membres d’une famille tués lors de l’attaque terroriste à London

« Je suis plus vigilante. J’ai peur que ces attaques se poursuivent, mais je ne veux pas que cette peur commence à dicter une décision importante, commente-t-elle. J’en ai marre d’expliquer mon existence. »

Jamal Osman, le vice-président de la communauté musulmane de la mosquée d’Edmonton, dit se sentir en colère parce qu’il ne devrait pas être de la responsabilité des Canadiennes de se protéger.

« Il est frustrant de devoir prendre les choses en main et de pousser nos soi-disant représentants à respecter leur engagement envers la sécurité des citoyens canadiens. Cela se résume à la Loi. Si celle-ci n’est pas en mesure de défendre ses propres citoyens, alors quel genre de contrat social avons-nous établi ? »

Cette dépêche a été produite avec l’aide financière des Bourses de Facebook et de La Presse Canadienne pour les Nouvelles.