Tout comme bien d’autres autochtones du pays, les enfants de Kitcisakik ont été retirés de leur famille pour être placés dans un système éducatif visant à les assimiler. Une partie d’entre eux ont déposé une demande d’autorisation d’exercer une action collective contre le Procureur général du Canada et la compagnie d’assurances Royal & Sun Alliance du Canada.

À la demande du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, pratiquement tous les enfants de Kitcisakik étaient envoyés au pavillon résidence Notre-Dame-de-la-Route, entre 1975 et 1991.

Des jeunes déracinés qui pouvaient voir leur famille presque uniquement pendant les vacances estivales, peut-on lire dans le document déposé au palais de justice de Montréal, le 27 avril dernier. Et ce, malgré le fait que cette résidence était située près de Kitcisakik, dans la réserve faunique La Vérendrye.

Comme dans bien d’autres pensionnats autochtones du pays, des enfants « ont subi des violences généralisées lors de leur séjour à la résidence, ayant notamment causé des lésions corporelles permanentes ». De nombreux exemples des formes de violence que les enfants auraient subies sont décrits, dont des agressions sexuelles de la part d’employés. Pour échapper à ces « violences physiques, psychologiques et sexuelles », beaucoup d’enfants ont fugué, lit-on également.

Témoignage crève-cœur

À la Commission d’enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec (commission Viens), un ancien de cette résidence a livré un témoignage crève-cœur sur les souffrances qu’il y a subies, dont des agressions sexuelles commises par le père Edmond Brouillard, qui était entre autres président du conseil d’administration de la résidence. Cet homme était « un prédateur sexuel » qui a d’ailleurs plaidé coupable à des accusations d’agressions sexuelles sur six enfants des communautés de Kitcisakik et de Lac-Simon.

Dans la foulée de cette vague de dénonciations d’agressions sexuelles, dont celles commises par le père Brouillard, la résidence a finalement fermé ses portes en 1991.

Si elle est autorisée par la Cour, l’action collective viserait le Procureur général du Canada, qui serait responsable des dommages subis par les membres de ce groupe et qui aurait manqué à « son obligation d’agir en tant que parent soucieux du bien-être de son enfant ».

Par ailleurs, puisqu’une police d’assurance a été souscrite pour l’organisme à but non lucratif sous le nom « Pavillon résidence Notre-Dame-de-la-Route (Edmond Brouillard) », la compagnie Royal & Sun Alliance du Canada serait aussi visée par cette action collective. La compagnie d’assurances serait tenue de « réparer les dommages découlant des fautes » des administrateurs et des employés de la résidence, affirme la demande d’autorisation déposée par le cabinet d’avocats Dionne Schulze. Les fautes reprochées sont notamment d’avoir favorisé la séparation des enfants avec leur famille, d’avoir encouragé des mesures de discipline violentes et d’avoir toléré des agressions sexuelles.