« Tout le monde a le droit à la vie, à la santé », souffle Christine Ndjomouo, les yeux embués, parmi la centaine de proches et de membres de la communauté camerounaise qui s’étaient rassemblés devant l’hôpital Charles-Le Moyne, sur la Rive-Sud, samedi, afin de réclamer justice pour sa sœur, Mireille Ndjomouo.

« Justice pour Mireille ! Santé pour tous ! », scandait la foule, au rythme des klaxons et des sifflets. « Ça me fait chaud au cœur, tous ces gens venus rendre hommage à Mireille », confie Christine Ndjomouo. Elle n’a pas dormi depuis des jours. La mort de sa sœur — et les circonstances nébuleuses dans lesquelles elle s’est produite — occupe tout son esprit.

PHOTO BERNARD BRAULT, LA PRESSE

Mireille Ndjomouo est entrée à l’hôpital Charles-Le Moyne, à Greenfield Park, le lundi 1er mars pour des douleurs à la hanche. Après quelques jours, Mme Ndjomouo a dit à ses proches qu’elle souhaitait être transférée dans un autre hôpital, parce que son état de santé l’alarmait. Son ventre était gonflé. Elle éprouvait des difficultés à respirer et remarquait des réactions cutanées à la pénicilline qu’on lui aurait administrée.

Infirmière clinicienne, Christine Ndjomouo s’est battue pour se rendre au chevet de sa sœur, en vain. Jusqu’à l’appel à l’aide de Mireille Ndjomouo, publié dimanche matin sur les réseaux sociaux.

« Aidez-moi, je ne veux pas mourir et laisser mes enfants. Je suis étouffée. Je suis allergique à la pénicilline, mais ils m’ont injectée à la pénicilline, sachant très bien que je suis allergique », suppliait Mireille Ndjomouo dans une vidéo qui a été vue des milliers de fois.

Dimanche soir, après des heures de négociations, selon Christine Ndjomouo, l’hôpital Charles-Le Moyne a finalement accepté de transférer sa sœur à l’Hôpital général juif. Elle y est restée un peu plus d’une journée, avant de mourir le mardi 9 mars. Pour Christine Ndjomouo, c’était le début d’une quête. Pourquoi sa sœur n’a-t-elle pas été transférée plus tôt ? Pourquoi lui a-t-on donné de la pénicilline ? Elle espère que l’enquête annoncée vendredi par le Bureau du coroner déterminera les circonstances de la mort de sa sœur.

Pour l’heure, elle se concentre sur les funérailles de celle qu’elle décrit comme une combattante coquette, qui aimait ses enfants.

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Faire toute la lumière

Pour l’avocat et entrepreneur social Fabrice Vil, il importe que l’enquête du coroner ratisse large, très large. « Il faut absolument que toute la lumière soit faite dans ce dossier-là, et jusqu’au but. Je soutiens absolument la démarche de la famille », a-t-il dit à La Presse.

« La question première dans le cas de Mireille Ndjomouo, c’est de savoir pourquoi on lui a administré de la pénicilline alors qu’elle refusait clairement et qu’elle était allergique. Aussi, ce que je comprends, c’est que ça a pris des pressions de la communauté, même après la vidéo, pour la transférer de l’hôpital. C’est là-dessus qu’il faut se concentrer », ajoute M. Vil.

Si rien n’indique pour le moment que Mme Ndjomouo ait été victime de quelque forme de racisme, il ne faut pas pour autant immédiatement et rapidement évacuer ce débat, ajoute celui qui est également chroniqueur. « La question fondamentale, c’est : comment les [établissements hospitaliers] traitent tous les individus, y compris ceux des communautés racisées ou autochtones ? », soutient-il.