Dénonçant une « ambiance toxique » à l’Association des policières et policiers provinciaux du Québec et accusant des adversaires de s’attaquer à sa réputation et à son intégrité, Pierre Veilleux, qui préside l’APPQ depuis neuf ans, ne se représentera pas à la tête de l’organisme en novembre prochain.

M. Veilleux en a fait l’annonce jeudi après-midi dans une lettre envoyée à tous les 5400 policiers et policières de la SQ et dont La Presse a obtenu copie.

« Le climat de travail au sein du Conseil de direction et du Bureau exécutif est devenu difficile pour moi-même et plusieurs autres membres du Conseil de direction, et ce, depuis plusieurs semaines », écrit d’abord M. Veilleux, en mettant la table du contexte de son départ.

« J’ai l’impression depuis plusieurs mois que le traitement que certains me font vivre n’est pas dans sa forme digne des valeurs syndicales que nous devrions prôner à l’intérieur de notre association ».

« … surtout le fait que certains, avec leurs intentions malveillantes, persistent avec acharnement à attaquer personnellement ma réputation et mon intégrité sur la place publique, et ce, pour leurs propres intérêts personnels électoralistes, qui me sont dommageables ».

« … ce contexte difficile, que je n’ai jamais souhaité, mais redouté, est malheureusement en train d’avoir des répercussions importantes sur ma personne et sur ma vie personnelle. Je crois sincèrement que je ne mérite certainement pas de vivre ce genre de traitement et que je me dois de songer à me protéger. J’ai toujours été heureux au travail, mais là, l’ambiance est rendue toxique, ça va trop loin », écrit notamment M. Veilleux.

Une contravention de 132 $

Selon nos informations, les choses se seraient envenimées entre M.  Veilleux et des directeurs lors d’un comité de direction spécial qui s’est tenu en novembre dernier.

Il aurait notamment été question, lors de ce comité, d’une contravention captée par photo radar de 132 $ reçue par M.  Veilleux, alors qu’il conduisait son véhicule de fonction fourni par l’APPQ, et qui aurait été payée par l’association-comme ce serait le cas depuis plusieurs années. Mais durant la rencontre, Pierre Veilleux aurait coupé court aux discussions et annoncé qu’il rembourserait la contravention.

Des études supérieures en journalisme suivies par un vice-président de l’APPQ et payées par celle-ci, et une histoire de meubles et d’articles récupérés après une rénovation, que des membres de l’exécutif auraient apportés à la maison, auraient également provoqué des critiques à l’endroit du président.

Pierre Veilleux attribue ses critiques « au contexte politique de l’élection générale devant avoir lieu en cette dernière année de mandat » et montre du doigt l’un de ses présumés dénigreurs qui aurait annoncé sur les réseaux sociaux qu’il se présenterait à la présidence à l’automne.

Avant d’être président, Pierre Veilleux a été vice-président durant six ans et demi et avant cela, délégué syndical.

Il dresse un bilan positif de son passage à la présidence, soulignant entre autres les conditions obtenues dans le dernier contrat de travail, les recours amorcés au niveau de l’arbitrage exécutoire et le développement global de l’association.

Il promet de continuer à défendre les intérêts des policiers et policières de la SQ jusqu’à la fin de son mandat. Il prendra sa retraite par la suite.

« Je tiens à vous souligner que j’ai toujours tenté au fil des années de faire les choses correctement avec comme priorité le respect des gens et l’atteinte des objectifs que nous nous étions fixés ».

« … mon rôle de président m’a certainement contraint à l’occasion à décevoir certains d’entre vous à travers vos attentes puisqu’il est difficile de plaire à tous, ou encore de bousculer certains à l’occasion lors de nos échanges. Cependant, soyez assurés que j’ai toujours travaillé dans le sens de vos intérêts et celui de l’ensemble des membres », écrit M. Veilleux.

Règles inexistantes

M. Veilleux ne le nomme pas mais l’une des personnes visées dans sa lettre est le vice-président aux ressources humaines de l’APPQ, Mathieu Sauvageau, policier depuis 28 ans.

Le 11 avril dernier, M. Sauvageau a lui aussi envoyé une lettre aux membres dont La Presse a obtenu copie et dans laquelle il soulève ce qu’il croit être des irrégularités, notamment au niveau de la fiscalité reliée à l’utilisation du véhicule de fonction fourni par l’association. Il affirme également que l’association aurait payé une autre contravention perçue par un employé.

« Étant membre du bureau exécutif depuis 3 ans et demi, j’ai constaté depuis mon entrée en fonction qu’il y avait des pratiques douteuses et que les règles de gouvernance étaient inexistantes. Le Président a mentionné lors de ces conférences que des constats d’infraction étaient payés depuis 40 ans et que cette pratique était acceptée. Cette affirmation en dit long sur les règles de gouvernance de votre Association. Posez-vous la question suivante: "Est-ce que mes cotisations syndicales servent à payer ça ?"

« Le Président a admis avoir fait des erreurs, je considère qu’il s’agit d’erreurs de jugement graves. »

« Je ne peux pas croire qu’on cherche à banaliser le remboursement de constats d’infraction. La question ne devrait jamais se poser car il s’agit d’une valeur d’intégrité fondamentale », écrit notamment M. Sauvageau.

Joint par La Presse, ce dernier n’a pas voulu commenter la situation mais a admis que les mots d’encouragement venant de collègues l’ont inciter à se présenter à la présidence, « avec une équipe, pour un mandat transitoire de quatre ans », a-t-il dit.

« Là, on va parler d’avenir. On est peut-être dû pour un changement », a-t-il déclaré à La Presse.

Pour joindre Daniel Renaud composez-le (514) 285-7000, poste 4918, ou écrivez à drenaud@lapresse.ca