(Québec) Le ministre du Travail, Jean Boulet, s’est incliné jeudi devant les familles adoptantes du Québec et leur a accordé le même nombre de semaines de congés parentaux qu’aux familles biologiques.

En novembre dernier, la Fédération des parents adoptants du Québec (FPAQ) et cinq autres organismes avaient dénoncé le projet de loi 51, qui accordait aux familles biologiques 55 semaines de congé, tandis que les familles qui adoptent hors Québec obtenaient 52 semaines et celles qui adoptent au Québec, 42 semaines.

La FPAQ avait alors rappelé que l’équité en matière de congés parentaux était une promesse électorale de la Coalition avenir Québec (CAQ) et que le ministre se trouvait à briser cette promesse de façon éclatante.

Selon la FPAQ, le gouvernement faisait preuve de discrimination à l’endroit des enfants adoptés, qui peuvent demander beaucoup de temps afin de surmonter leur sentiment d’abandon et tisser des liens forts avec leurs parents adoptifs. Elle accusait le ministre de créer deux classes de familles adoptantes : celles qui adoptent à l’international et les autres.

En point de presse à l’Assemblée nationale jeudi, M. Boulet a semblé reconnaître son erreur. Il a annoncé avoir déposé deux amendements majeurs à son projet de loi pour éliminer l’écart entre familles biologiques et adoptantes, et entre familles qui adoptent au Québec versus à l’étranger.

Il a créé une prestation d’accueil et de soutien de 13 semaines partageables entre les parents adoptants pour leur assurer le même temps de présence que les parents biologiques et pour « assurer une saine gestion humaine et harmonieuse de la réalité familiale des parents adoptants ».

En clair, si le projet de loi 51 est adopté, toutes les familles adoptantes pourront désormais bénéficier de 32 semaines de congés partageables, 10 semaines pour adoption et 13 semaines d’accueil et de soutien, pour un total de 55 semaines.

Les amendements apportés au projet de loi assurent une égalité au niveau de la durée et des montants de prestation. Le coût annuel de cette mesure est estimé à 3,4 millions.

M. Boulet avait d’abord justifié son projet de loi en novembre en disant que les mères biologiques avaient droit à un congé plus généreux étant donné qu’elles subissent les effets physiologiques d’une grossesse et d’un accouchement.

Le premier ministre François Legault avait vite repris l’argument selon lequel il y avait un sérieux risque de poursuites judiciaires de la part des mères biologiques si le gouvernement donnait exactement le même nombre de semaines aux parents adoptants qu’aux parents biologiques.

Jeudi, M. Boulet, accompagné de la députée péquiste Véronique Hivon et des responsables de la FPAQ, a déclaré avoir constaté le « consensus social » autour de la question des congés parentaux pour les familles adoptantes. « Je me suis adapté, a-t-il affirmé. On fait un pas en avant au plan social, on fait des gains et on le fait en équipe. »

Finalement, les « risques extrêmement sérieux de poursuites judiciaires de la part des mères biologiques » évoqués lors du dépôt du projet de loi sont peut-être « un peu moins sérieux » que ce que le gouvernement avait anticipé, a reconnu le ministre.

« La meilleure façon, c’était de créer un nouveau corridor dans notre projet de loi dédié spécifiquement à la réalité des familles adoptantes, a-t-il souligné, en affirmant s’être doté d’outils pour se prémunir contre les poursuites. En créant un nouveau type de prestations d’accueil et de soutien, on se donne des arguments sociaux et humains additionnels. »

La présidente de la FPAQ, Anne-Marie Morel, a aussitôt félicité le ministre. « Le gouvernement reconnaît que les enfants adoptés ont la même valeur que tous les enfants du Québec et de ce fait, peuvent bénéficier des mêmes privilèges de pouvoir passer au moins une année avec leurs parents à la maison », a-t-elle déclaré.

Pour sa part, Mme Hivon, elle-même une mère adoptive, a qualifié l’annonce du ministre d’« énorme avancée ».

« C’est un moment de reconnaissance sociale pour les familles adoptantes en démystifiant ce qu’est l’adoption aussi et en montrant que c’est une réalité qui est tout aussi importante évidemment que la réalité de la famille biologique, mais qui a aussi ses particularités, ses réalités. »

Les consultations publiques sur le projet de loi 51 débuteront le 17 mars à l’Assemblée nationale et se tiendront pendant quatre jours.