Mamadou Konaté a travaillé en CHSLD durant toute la pandémie. Détenu depuis plus d’une semaine au Centre de surveillance de l’immigration à Laval, il fait maintenant face à l’expulsion. Québec solidaire réclame une intervention de Québec pour qu’il soit libéré.

« Mamadou Konaté a risqué sa vie pour prendre soin des aînés du Québec et aujourd’hui, la manière dont on le remercie, c’est de le mettre en prison et de le menacer [d’expulsion] », a dénoncé le co-porte parole de Québec solidaire Gabriel Nadeau-Dubois, lors d’un point de presse, vendredi, à Montréal.

« C’est plus qu’une gifle. C’est un coup de poing dans le ventre », a déclaré le député de Gouin, avant d’en appeler « au sens de l’humanité de la ministre de l’Immigration du Québec », Nadine Girault, afin qu’elle intercède en faveur de Mamadou Konaté auprès d’Ottawa.

Originaire de la Côte d’Ivoire, M. Konaté s’est établi au Québec en 2016 pour fuir la guerre civile. Durant la pandémie, il a travaillé comme préposé à l’entretien ménager en zone rouge dans un CHSLD, où il a contracté la COVID-19.

PHOTO FOURNIE PAR DES PROCHES

Mamadou Konaté travaillait en zone rouge d’un CHSLD, où il a contracté la COVID-19.

Le 16 septembre dernier, M. Konaté s’est rendu de manière volontaire à l’Agence des services frontaliers du Canada afin de régulariser son statut. Sa demande d’asile a été rejetée et il a été arrêté sur place.

Au début des années 2000, alors que la Côte d’Ivoire était au bord d’une guerre civile, M. Konaté s’est impliqué dans un groupe rebelle qui cherchait à renverser le gouvernement.

« C’est la raison pour laquelle Ottawa veut l’exclure du pays, a expliqué l’avocat de M. Konaté, Stewart Istvanffy, affirmant que son client n’a aucun dossier judiciaire au Canada. M. Konaté n’est pas un criminel. C’est un bon gars, qui a toujours travaillé. Il était présent lorsqu’on avait besoin de lui. »

Depuis sa détention, deux demandes de libération ont déjà été rejetées en audience. Sa date de renvoi n’a pas encore été fixée.

Des proches sous le choc

« Mamadou est une personne généreuse et très fiable, toujours prête à demeurer en poste », a souligné Amélia Orellana, grande amie de M. Konaté, en entrevue avec La Presse.

Arielle Laurion s’est dite secouée lorsqu’elle a appris que son ami et collègue était incarcéré. « Je n’y croyais pas […]. On ne se doutait pas du tout que c’était une possibilité. »

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Rassemblement pour Mamadou Konaté, travailleur immigrant en CHSLD menacé d'expulsion, devant le Complexe Guy-Favreau. Sur notre photo, Jean-Philippe Bergeron et Arielle Laurion, amis de Mamadou Konaté.

En août, Ottawa et Québec ont annoncé la mise en place d’un programme spécial visant à permettre aux demandeurs d’asile qui ont travaillé en soins pendant la pandémie de rester de façon permanente dans la province.

« Quand Mamadou a vu l’annonce, il avait tellement espoir. Il pensait enfin pouvoir officialiser sa demande d’asile », a raconté Arielle Laurion à La Presse.

Le gouvernement fédéral a toutefois restreint le programme de régularisation pour retirer des professions admissibles les préposés à l’entretien, comme les gardiens de sécurité, à la demande de François Legault.

L’opposition blâme Québec

« C’est une injustice flagrante qui ne tient qu’à la posture du gouvernement du Québec », a dénoncé vendredi le député de Québec solidaire Andrés Fontecilla.

Même son de cloche du côté du Parti libéral du Québec. « Les conditions du programme sont basées sur un choix arbitraire, basé uniquement sur le fait que la CAQ ne veut pas trop d’immigrants au Québec », a dénoncé le député Gaétan Barrette.

Contactée par La Presse, le cabinet de la ministre de l’Immigration, Nadine Girault, a refusé de commenter le cas de M. Konaté. De son côté, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada n’a pas voulu se prononcer sur ce cas précis.

Le Parti québécois n’a pas réagi.