Des résidants qui s’opposent aux vols de nuit et à la croissance tous azimuts de l’aéroport international Montréal-Trudeau viennent de subir un cinglant revers devant les tribunaux. Non seulement la Cour supérieure a rejeté leur requête à une étape préliminaire, mais leurs demandes « abusives » pourraient leur coûter cher.

Le groupe de citoyens Pollués de Montréal-Trudeau (PDMT) et leurs dirigeants Pierre Lachapelle, Francine Lauzon et Antoine Bécotte ont tiré sur tous les fronts dans une procédure judiciaire déposée il y a un an contre Aéroports de Montréal (ADM). PDMT dit représenter les résidants de la métropole « qui subissent la pollution générée par le passage à basse altitude des avions qui atterrissent et décollent » à Montréal-Trudeau.

Les citoyens demandaient essentiellement trois choses à ADM : l’application stricte d’un « couvre-feu » aérien à Montréal-Trudeau, l’imposition d’une étude d’impact environnemental sur le projet de nouvelle aérogare et 1 million de dollars par année depuis 2005 en dommages punitifs en raison du développement « sans contrôle » du trafic aérien.

Mais avant même de tenir un procès, le juge Serge Gaudet a rejeté la requête des demandeurs la semaine dernière, puisque celle-ci était « clairement vouée à l’échec ». Fait notable, le juge a déclaré « abusives » plusieurs demandes de PDMT sur le couvre-feu nocturne, puisque la Cour supérieure avait déjà tranché la question en 2018. En droit, on ne peut remettre en cause une question déjà tranchée, sauf dans de rares exceptions.

Bien que rien ne montre que les demandeurs soient de mauvaise foi, il reste que ces demandes avaient été explicitement rejetées par un jugement passé en force de chose jugée et qu’il était déraisonnable de les présenter à nouveau sans plus de justification.

Extrait de la décision du juge Serge Gaudet

Le groupe de citoyens avait remporté une victoire il y a deux ans, lorsque la Cour supérieure avait autorisé leur action collective contre les nuisances sonores à Montréal-Trudeau. Des dizaines de milliers de Montréalais des quartiers centraux de l’île pourraient ainsi recevoir une compensation au terme du procès, lequel n’a toujours pas eu lieu.

Toutefois, la juge avait alors refusé de fixer les critères du trafic aérien nocturne et de soumettre Montréal-Trudeau à un couvre-feu de ses activités de 23 h à 7 h, puisque cela est du ressort du gouvernement fédéral.

Aéroports de Montréal a ainsi 15 jours pour déposer une demande de « réparation additionnelle » et ainsi réclamer des dommages et les frais de l’instance au groupe de citoyens. ADM affirme « évaluer » la question.

Une nouvelle aérogare incertaine

PDMT demandait également à la Cour d’imposer une étude d’impact environnemental avant d’autoriser le projet de nouvelle aérogare et de nouvelles pistes de sortie rapide. Or, ce débat est « prématuré et théorique », selon le juge, puisqu’on ignore toujours si le projet va se matérialiser. Un dirigeant d’ADM a témoigné que la nouvelle aérogare – annoncée en grande pompe il y a deux ans pour une inauguration d’ici 2030 – n’était toujours qu’au stade de l’élaboration.

Finalement, PDMT réclamait des millions de dollars en dommages punitifs en raison des atteintes à leurs droits fondamentaux. Cette demande est toutefois irrecevable, puisque la Cour supérieure l’a déjà rejetée en 2018. De plus, PDMT ne peut plaider représenter les « populations riveraines », selon le juge.

Un « dossier prioritaire »

ADM accueille « favorablement » le jugement et assure que la gestion du climat sonore demeure un « dossier prioritaire ». « ADM déploie des efforts soutenus pour assurer un équilibre entre le rôle du site aéroportuaire et le maintien d’une cohabitation harmonieuse avec les communautés riveraines », indique la directrice des relations médias Anne-Sophie Hamel.

Le président de PDMT, Pierre Lachapelle, n’était pas en mesure de commenter mercredi, puisque l’organisation n’avait pas pris position.